Pour faire des économies sur le remboursement, l'Assurance maladie propose de baisser encore les prix des médicaments (et les labos s'énervent)

Voilà une idée qui ne ravit pas du tout les laboratoires pharmaceutiques. Dans son rapport "Charges et produits", dévoilé mardi 24 juin et censé éclairer les politiques en prévision du prochain projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2026, la Caisse nationale de l'assurance-maladie (Cnam) propose de baisser les prix des médicaments afin d'enrayer la dérive des comptes de la Sécu, dont le déficit est estimé à 16 milliards d'euros cette année.
Plus précisément, la Cnam cible les produits de santé dont l'améliroation du service médical rendu est jugé comme mineur (ASMR IV), afin de baisser les coûts relatif à leur prise en charge de 20% par patient d'ici 2030. Le but de cette mesure est notamment de compenser "la forte hausse des coûts depuis 2017".
Un décalage de prix
Et pour cause, des remises ont été négociées entre le Comité économique des produits de santé (CEPS) et les laboratoires pharmaceutiques permettant aux industriels de maintenir leurs médicaments à un prix public plus élevé (prix facial) tandis que l'Assurance maladie rembourse sur la base d'un prix net négocié à un niveau plus bas.
Or, "ce décalage entre prix facial et prix net engendre une dépense supplémentaire pour les finances publiques, via une augmentation des marges versées aux pharmaciens et grossistes, calculées sur le prix facial", détaille la Cnam.
De même, le rapport s'attaque aussi aux médicaments dont l'amélioration du service médical rendu est jugé insuffisant par la Haute autorité de santé (ASMR V), mais qui font malgré tout l'objet d'un remboursement car ils apportent une économie dans le coût du traitement. Pourtant le prix d'un certain nombre de ces médicaments est déjà bien bas. C'est par exemple le cas du Spasfon: prescrit dans le traitement de douleurs digestives et spasmodisques, ce médicament est remboursé par l'Assurance maladie à hauteur de 15% de 2,45 euros, honoraires de dispensation en officine compris.
"On a l’impression que la Cnam reste sur les recettes habituelles d’économies, qui, en agissant sur la baisse des prix, ne sont plus soutenables pour les entreprises. Ils suggèrent que les évaluations des produits de santé sont devenues laxistes et qu’on paierait trop cher ces médicaments. Or, ces évaluations sont faites par la Haute autorité de santé qui est indépendante et ne cesse de renforcer ses exigences et la CNAM elle-même participe au Comité Économique qui fixe les prix des médicaments." , souligne auprès de BFM Business, Juliette Moisset, directrice de l'accès et des affaires économiques du Leem, le lobby français des industries pharmaceutiques.
Vers un déremboursement des médicaments pris en charge à 15%?
Pour inciter les laboratoires à se plier aux baisses de prix, le rapport de la Cnam suggère de jouer sur la contrainte. Il s'agirait par exemple de conditionner le remboursement des médicaments à faible service médical rendu à des baisses de prix effectives, de l'ordre de "20% minimum par rapport au prix net du comparateur le moins cher". Autrement dit, si les industriels refusent d'engager ces efforts, alors leurs produits pourraient ne plus être remboursés par la Sécu.
Le 2 juin sur le plateau de LCP, le ministre de la Santé et de l'accès aux soins Yannick Neuder a déjà ouvert la porte au déremboursement des produits de santé qui ne sont pris en charge par l'Assurance maladie qu'à 15%. Un aussi faible taux de remboursement est en effet associé à un service médical rendu jugé faible par la HAS. "Moi je préfère rembourser les médicaments pour lesquels il y a un service médical rendu maximal", a plaidé le ministre, soit les médicament aujourd'hui remboursés à 65%, voire 100% dans certains cas.