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"Je laisserai une CFDT qui va bien": Laurent Berger quittera la direction du syndicat le 21 juin

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Dans une interview au Monde, le secrétaire général de la CFDT annonce qu'il quittera dans deux mois la direction du premier syndicat de France. Il devrait être remplacé par Marylise Léon, actuellement numéro deux de la confédération.

La page Laurent Berger va se tourner à la CFDT. A la tête du premier syndicat de France depuis novembre 2012, le secrétaire général de la confédération annonce qu'il va quitter son poste.

"Je pense que, le 21 juin, je laisserai une CFDT qui va bien", déclare Laurent Berger dans une interview au Monde, précisant avoir proposé au bureau national que ce soit Marylise Léon, actuelle numéro deux, qui lui succède.

Plus de 10 ans à la tête de la CFDT

Une décision qu'il qualifie de "mûrement réfléchie" et qu'il assure avoir prise dès la fin de 2021. Mais le contexte sanitaire puis politique avec l'élection présidentielle ainsi que son mandat de président de la Confédération européenne des syndicats l'ont poussé à reporter l'échéance.

"J’occupe ce poste depuis dix ans et demi, soit une durée proche de celle des mandats de mes prédécesseurs, François Chérèque et Nicole Notat", explique-t-il. "Initialement, je songeais partir un tout petit peu plus tôt, en juin 2022, mais il aurait été compliqué de le faire à ce moment-là."

Marylise Léon favorite pour la succession

C'est Marylise Léon, la secrétaire générale adjointe de la CFDT depuis 2018 qui a la faveur de Laurent Berger pour lui succéder.

"Elle est dynamique, elle a une compréhension du monde du travail qui est forte, parfois plus fine que la mienne – par exemple sur la question des nouvelles formes d’emplois", indique-t-il dans Le Monde.

Laurent Berger ne tarit pas d'éloges sur sa camarade de la CFDT. "Elle s’est battue avec énergie lors des négociations sur l’assurance-chômage et elle est convaincue que la transition écologique doit s’effectuer de façon juste sur le plan social. Elle est appréciée au sein de la maison, elle est proche des gens, humaine", appuie-t-il.

Unique candidat à sa succession, Laurent Berger avait été réélu en juin 2022 avec 96,68% des voix et avait annoncé qu'il n'irait pas jusqu'au bout de son mandat. Son combat contre la réforme des retraites aura donc été son dernier en tant que patron de la CFDT.

Une opposition ferme contre le report de l'âge légal dictée notamment par les délégués réunis en Congrès en juin dernier. Ces derniers avaient retoqué un amendement proposé par la direction qui estimait que "l'allongement de l'espérance de vie [pouvait] justifier une augmentation de l'âge moyen de liquidation" ouvrant la voie à une éventuelle négociation avec le gouvernement notamment sur la durée de cotisation.

Mais la question des retraites est une pomme de discorde depuis des décennies entre la direction de la CFDT, la base du syndicat et les différents gouvernements avec lesquels ils ont eu à négocier. D'ailleurs c'est pour panser les plaies d'une CFDT divisé à la suite du soutien très critiqué à l'époque de la direction à la réforme des retraites de 2003, que François Chérèque choisit Laurent Berger comme successeur en 2012.

Un pur produit de la CFDT

Né en 1968 à Guérande en Loire-Atlantique d'un père ouvrier soudeur sur les Chantiers de l'Atlantique et d’une auxiliaire de puériculture, Laurent Berger est en effet un pur produit de la CFDT issu de la base. Brièvement salarié d'une association d'insertion au milieu des années 90, il y crée une section syndicale CFDT (syndicat auquel militait son père de culture ouvrier chrétien) et devient délégué du personnel de cette structure. Il grimpera ensuite tous les échelons du syndicat et intègre le bureau national de la CFDT en 2003 avant d'être élu six ans plus tard à la Commission exécutive confédérale, son instance dirigeante.

Elu en 2012, Laurent Berger marque ses différences de priorité avec son prédécesseur. Quand François Chérèque, marqué par les années de chômage de masse, fait de l'emploi une priorité, Laurent Berger met davantage le curseur sur les conditions de travail. Face au gouvernement et au Medef, le leader de la CFDT impose ainsi dans la négociation le compte personnel d'activité, la complémentaire santé pour tous, le compte pénibilité ou encore le compte personnel de formation (le fameux CPF).

Un syndicalisme plus pragmatique, soucieux du quotidien des travailleurs qui a la faveur des salariés. En 2018, pour la première fois la CFDT devient le premier syndicat français lors des élections professionnelles. Ce sont se réjouit à l'époque Laurent Berger d'ordinaire plutôt discret.

Un statut que la CFDT conserve à l'issue des élections de 2022.

Avec 640.000 adhérents (chiffre expertisé à la différence de ceux d'autres syndicats), la CFDT se présente comme le premier syndicat de France. Néanmoins il n'a pas échappé à l'hémorragie d'adhésions constaté dans l'ensemble du monde syndical depuis au moins une décennie. La CFDT revendiquait en effet 850.000 adhérents en 2010, soit près de 200.000 de plus qu'aujourd'hui. La France reste un des pays les moins syndiqués de l'Union Européenne avec un taux de 11% (23% en moyenne dans l'UE) et qui a eu tendance à baisser lors de la dernière décennie selon la Dares. Redonner du lustre au syndicalisme en France? La future direction de la CFDT ne manquera donc certainement pas de travail.

Frédéric Bianchi
https://twitter.com/FredericBianchi Frédéric Bianchi avec AFP Journaliste BFM Éco