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La réforme de la régularisation des docteurs à diplôme étranger hors UE entre en vigueur

Si les épreuves de vérification des connaissances (EVC) restent un concours, elles évoluent avec la création d'un voie interne plus favorable aux médecins étrangers qui comblent déjà les manques dans les hôpitaux français.

Si les épreuves de vérification des connaissances (EVC) restent un concours, elles évoluent avec la création d'un voie interne plus favorable aux médecins étrangers qui comblent déjà les manques dans les hôpitaux français. - -

La réforme des épreuves de vérification des connaissances (EVC), le concours que les médecins à diplôme hors Union européenne doivent passer pour obtenir le plein exercice en France, se concrétise par l'ouverture de postes plus nombreux à pouvoir aux praticiens exerçant déjà dans l'Hexagone.

Voilà le premier acte d'une réforme à la fois attendue et décriée. Un arrêté paru au Journal officiel (JO) le 28 juin entérine une des promesses du ministre de la Santé Yannick Neuder en matière de régularisation des médecins à diplôme hors Union européenne (UE). Les épreuves de vérification des connaissances (EVC), qui constituent la première étape indispensable à franchir pour espérer obtenir, in fine, l'autorisation de plein exercice en France, sont revisitées sous une nouvelle formule.

Très critiqué en 2023 et 2024 pour des raisons de suppressions massives de postes attribués par rapport au nombre de postes initialement à pourvoir fixé par arrêté ministériel, le concours est désormais scindé en deux voies interne et externe. La voie interne, qui s'adresse aux praticiens qui prêtent déjà main-forte aux hôpitaux en manque de bras pour répondre à la demande de soins, est constituée d'une seule épreuve théorique là où les candidats à la voie externe doivent aussi passer une épreuve pratique.

La voie interne est aussi plus avantageuse car elle offre bien plus de postes à pourvoir aux Padhue déjà en exercice en France. Toutes spécialités confondues, 3.800 postes sont en effet ouverts en voie interne contre seulement 400 pour la voie externe, qui s'adresse aux Padhue n'ayant jamais mis les pieds dans les établissements de santé français. En cas de réussite au concours, les lauréats s'engagent dans un parcours de consolidation des compétences (PCC) d'une durée de deux ans maximum, avant de passer devant une commission d'autorisation d'exercice pour enfin être inscrit à l'Ordre des médecins.

Le nombre de postes en médecine générale a presque doublé

Surtout, alors que la désertification médicale s'étend largement dans le pays, le ministère de la Santé a ouvert au total 1.434 postes en médecine générale dont 1.354 en voie interne et 80 en externe. C'est presque deux fois plus que le nombre de postes qui étaient à pourvoir dans cette même discipline l'année dernière. Pour la session 2024 du concours, 826 postes étaient en effet ouverts... sur le papier.

En réalité, une fois la liste des lauréats publiée en janvier 2025 sur le site du Centre national de gestion (CNG) (établissement sous la tutelle du ministère de la Santé qui gère l'organisation des EVC), 30% des postes initialement fixés par arrêté ministeriel ont été supprimés pour la médecine générale. Ainsi, seulement 563 candidats ont été déclarés lauréats au concours dans cette discipline. Et toutes spécialités médicales confondues, ce sont 20% des 3.749 postes intialement prévus qui ont été supprimés, provoquant la colère des syndicats et associations représentatifs des Padhue.

Les Padhue restent sceptiques

Forcément, la transformation du concours avec la création d'une voie interne a priori plus avantageuse aux Padhue exerçant déjà en France ne suffit pas à rassurer ces praticiens maintenus dans la précarité avec des contrats courts, payés entre "1.400 et 2.200 euros net par mois". "C'est juste pour faire du buzz médiatique, s'emporte Abdelhalim Bensaidi, président par intérim de l'association pour l'Intégration des praticiens à diplôme étranger engagés contre la crise (Ipadecc). C'est bien beau d'avoir 1.400 postes en médecine générale mais si derrière on en supprime encore 30 ou 40%, cela ne change strictement rien.

"Aujourd'hui on redemande au Premier ministre de faire un geste républicain aux Padhue qui travaillent dans les hôpitaux depuis 5 ans et qui, pour certains, n'ont pas été reçus au concours avec 14 de moyenne générale alos qu'ils ont bouché les trous et répondu présents pendant le Covid et ont servi à la nation".

Le problème, c'est qu'en cas d'échec aux EVC, les Padhue qui exerçaient déjà en France sous un statut temporaire ne peuvent pas poursuivre leur pratique de la médecine indéfiniment sur le territoire. Une évolution législative, portée par le député Horizons de Seine-et-Marne Frédéric Valletoux en fin d'année 2023 octroie en effet un nouveau statut de praticien associé contractuel temporaire (Pact) aux Padhue qui ont échoué à la session 2024 du concours et qui s'engagent à repasser les épreuves en 2025. Ce statut leur permet d'exercer pendant 13 mois renouvelables une fois. Autrement dit : passé 26 mois maximum, s'ils n'ont pas réussi les EVC, ils ne seront plus autorisés à pratiquer la médecine en France.

Fin du numerus apertus pour les internes en France

En parallèle de la régularisation des Padhue aux contours jugés trop opaques par les médecins à diplôme hors UE, le gouvernement s'attelle à recombler les déserts médicaux en formant davantage de médecins dans les universités françaises.

Le 27 juin, une proposition de loi promulguée au JO et portée par Yannick Neuder lorsqu'il était encore député de l'Isère, supprime le numerus apertus. Ce nombre ouvert avait été instauré en 2019 en lieu et place du numerus clausus dans le but, déjà, d'augmenter le nombre d'étudiants formés dans les facultés de médecine. Ce numerus apertus était néanmoins fixé selon deux critères précis : les capacités d'accueil des universités et les besoins de santé du territoire concerné, estimé par les agences régionales de santé (ARS). Dans les faits, le nombre de places ouvertes était d'abord lié aux capacités d'accueil très limitées des universités, ce qui n'actait pas vraiment la fin du numerus clausus et conduisait de nombreux étudiants à mener des études de médecine à l'étranger.

Désormais, le texte concocté par l'actuel ministre de la Santé prendra d'abord en considération les besoins de santé du territoire, dans le but d'accueillir plus d'étudiants en médecine dans les facultés.

Caroline Robin