La progression de la mobilité sociale des jeunes "interrompue depuis le début des années 2000"

"La progression de la mobilité sociale s'est interrompue depuis le début de la décennie 2000", selon France Stratégie - Joël Saget / AFP
L'origine sociale pèse sur le destin des jeunes en France, et les politiques publiques menées pour y faire face, aux moyens jugés modestes, restent morcelées et peu coordonnées, sans s'attaquer structurellement aux racines des inégalités, souligne un rapport de France Stratégie publié ce mardi.
"Les perspectives de promotion sociale se sont améliorées depuis trente-cinq ans pour tous les jeunes, sous l'effet de l'augmentation de la part des emplois de professions intermédiaires, cadres et professions intellectuelles supérieures", analyse France Stratégie, service de prospective de Matignon.
Mais, si le développement de ces emplois qualifiés a bénéficié aux jeunes de tous milieux, "cette progression de la mobilité sociale s'est interrompue depuis le début de la décennie 2000", une détérioration qui "concerne surtout les jeunes hommes", ajoute-t-il.
69% des jeunes issus d'une famille ouvrière occupent un emploi d'ouvrier ou d'employé
Ainsi, les jeunes occupent "souvent la même position que leurs parents", constate le rapport: en 2019, cinq à huit ans après la fin de leurs études, plus de 80% de ceux nés dans des familles à "dominante cadre" exerçaient un emploi de cadre ou profession intellectuelle supérieure ou intermédiaire, et 69% de ceux issus d'une famille ouvrière un emploi d'ouvrier ou d'employé. Ce poids de l'origine "s'observe dès leur entrée sur le marché du travail", avec un diplôme qui diffère "fortement" selon le milieu social, poursuit le rapport.
Face à cette situation, les politiques publiques en faveur de la mobilité sociale des jeunes sont "multiples" (plus de 50 dispositifs de l'État en 2022) et d'une "grande hétérogénéité", explique le rapport. La moitié portent sur l'éducation, 40% sur l'emploi et le reste sur d'autres domaines, comme la culture ou la citoyenneté. Les moyens engagés se chiffrent à 13 milliards d'euros en 2022, soit environ 12,5% des moyens alloués par l'Etat à la jeunesse, détaille-t-il, avec une "grande dispersion des efforts", "éclatés entre différents ministères et administrations".
En outre, ces dispositifs ont "une approche largement curative", observe-t-il, s'attelant à "réparer ce que les politiques publiques de l'éducation et de l'emploi ont du mal à atteindre: l'égalité des chances", et manquent "d'articulation et de coordination".
Pour France Stratégie, ce constat appelle à "interroger plus structurellement les racines de ces inégalités". Il plaide aussi pour "un meilleur suivi des dispositifs existants -avec sans doute une simplification et une concentration sur les plus pertinents-", avec des évaluations "au long cours", qui "font trop souvent défaut"