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Finances publiques

Cabinets de conseil: des recours "problématiques" épinglés dès 2021 par la Cour des comptes

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Un rapport de la Cour des comptes alertait le gouvernement dès fin 2021 sur les "conditions problématiques" de recours aux cabinets de conseil, dont McKinsey et Citwell, pendant la crise sanitaire.

La Cour des comptes a alerté le gouvernement sur les "conditions problématiques" du recours aux cabinets de conseil pendant la pandémie fin 2021. C'est ce que révèle un rapport de 90 pages de l'institution de la rue de Cambon sur les dépenses liées à la crise sanitaire, rendu public ce lundi par le journal Le Monde.

D'après le quotidien, 13 millions d’euros ont été dépensés en 2020 et 2021 pour des prestations de conseil pour le compte de la direction générale de la santé (DGS). Selon les auteurs du rapport, ces missions dépassaient souvent le cadre de l’apport d’expertises absentes dans le secteur public, rapporte Le Monde.

La Cour des comptes juge "largement artificiel" le rattachement de la stratégie vaccinale à un accord-cadre passé par la direction interministérielle de la transformation publique (DITP). Un choix que la DGS a justifié par le caractère "exceptionnel" de la pandémie et la "réactivité" que permet l’accord-cadre de la DITP.

Au total, ce procédé a été utilisé pour sept commandes passées à McKinsey sur la campagne de vaccination entre novembre 2020 et février 2022, dont une a été signée après l'alerte de la Cour des comptes fin décembre 2021, souligne Le Monde, qui s'appuie sur un rapport de la commission d'enquête du Sénat paru en février.

L'accord-cadre de la DITP sur la transformation publique a également été utilisé par le ministère de la Transition écologique pour demander à McKinsey de travailler sur les scénarios de reprise des transports en commun, avant le premier déconfinement au printemps 2020, indique le journal.

La Cour des comptes cite également Citwell, qui s'est vu attribuer huit missions en 2020 pour un montant total de 2,3 millions d'euros. Le gouvernement a invoqué le motif de "l’urgence impérieuse" lié à la crise sanitaire pour missionner ce cabinet de conseil sans respecter la publicité et la mise en concurrence normalement obligatoires.

Cette possibilité est prévue par le code la commande publique à titre exceptionnel. Cela n'a pas empêché les magistrats de la rue de Cambon de recommander au ministère de la Santé d’"anticiper un temps suffisant de préparation des marchés avant le lancement des missions", rapporte Le Monde.

Par ailleurs, si certaines missions confiées à Citwell "correspondent au rôle que l'on peut assigner à un prestataire privé, il est moins normal que celui-ci soit conduit à assurer l'exécution courante des missions, en employant pour cela trois à quatre équivalents temps plein selon les périodes", regrette la Cour des comptes.

Enfin, l'institution de la rue Cambon trouve "anormal" que le gouvernement ait délégué au cabinet Roland Berger des missions relevant des attributions de l'administration, "alors même qu'il est doté d'un puissant corps d'inspection interne, dont les membres ont toutes les compétences requises."

L'institution recommande donc de "limiter strictement le recours aux cabinets aux seules missions techniques pour lesquelles les directions d'administration centrale du ministère de la Santé ne disposent pas des compétences requises en interne". Une recommandation prise en compte par le gouvernement, qui a dévoilé un nouveau cadre de recours aux prestations de conseil, applicable dès 2023.

Marius Bocquet