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Finances publiques

Budget: le gouvernement veut réduire les exonérations de cotisations pour l'apprentissage

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Le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), que BFM Business a pu consulter, propose de rationnaliser les exonérations pour les contrats d’apprentissage, via deux mesures principales.

L’heure du « quoiqu’il en coûte » du contrat d’apprentissage a sonné. Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS), que notre rédaction a pu consulter, propose dans son article 10 deux mesures afin de faire des économies sur un apprentissage jugé trop coûteux. D’abord en "abaissant par décret le seuil d’exonération de cotisations sociales de 79% à 50 % du SMIC". Depuis 2019, la rémunération des apprentis est soumise à cotisation au-delà de 79% du SMIC.

Aujourd’hui, seulement 5% de la masse salariale des apprentis excède le seuil de 0,79 Smic d’après un rapport de l’Inspection générale des finances (IGF) et de l’inspection générale des affaires sociales (IGAS) publié en mars 2024. Tandis qu’un quart de la masse totale excède le seuil de 0,50 Smic. Selon ce rapport, l'abaissement du plafond d’exonération à 50 %, du SMIC générerait une économie estimée à 278 millions d’euros.

Un assujettissement à la CSG et à la CRDS

Par ailleurs, le PLFSS propose "d’assujettir à la contribution sociale généralisée (CSG) et à la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS) les rémunérations des apprentis au-delà de 50 % du SMIC, qui sont aujourd’hui complètement exemptées de contribution. Selon le rapport de l’Igas et de l’IGF, le montant total de CSG exonéré sur les rémunérations des apprentis est estimé à 1,2 milliard d’euros, et l’exonération de CRDS représente 64,6 millions d’euros.

"L’exonération de CSG -CRDS des salaires d’apprentis fait figure d’exception parmi les revenus du travail", précise le rapport, "à titre de comparaison, les contrats de professionnalisation n’en sont pas exonérés".

Une perte de revenu net de 19 euros par mois en moyenne

Ce mesures ont un impact direct sur le revenu de l'apprenti. Pour l'IGF et l'Igas, "l’abaissement du plafond d’exonération à 0,5 SMIC se traduit par une perte de revenu net pour les apprentis, en moyenne de 19 euros par mois", ce chiffre variant en fonction de l’année de contrat et de l’âge.

Les propositions du PLFSS interviennent alors que le financement de l’apprentissage suscite des controverses, notamment depuis l’explosion de nombre de bénéficiaires. En 2023, le nombre d’apprentis s’établit à plus d’un million. Entre 2018 et 2023, le nombre d’entrées en apprentissages a été multiplié par 2,7, passant de 321 000 à 852 000 apprentis d’après le rapport de l’IGF et de l’Igas.

Les Experts : L'apprentissage dans le viseur - 09/10
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Cet essor est dû à la réforme de 2018 qui a libéralisé le cadre de la formation en assouplissant notamment les limites d’âges de l’apprentissages (de 26 à 29 ans révolus), et en le revalorisant financièrement.

L'apprentissage présenterait "des effets d'aubaine"

Ce succès du dispositif coûte cher à l’Etat, et les chiffres divergent. Le rapport de l’Igas et de l’Igf chiffre les dispositifs de soutien à l’apprentissage à 14 milliards d’euros en 2022. Mais pour l’économiste Bruno Cocquet, dans une note publiée en juin 2023 titrée "Apprentissage: un bilan des années folles", le coût budgétaire serait de l’ordre de 16 milliards d'euros en 2021 et 20 milliars d'euros en 2022.

Le PFLSS justifie ces mesures en plusieurs points. D’abord, les dépenses de formation ayant "doublé entre 2018 et 2022", ce dispositif est devenu "particulièrement attractif fiscalement". Par ailleurs, le régime social applicable à l’apprentissage "présente des effets d’aubaine", notamment pour les élèves de l’enseignement supérieur. Enfin, pour le gouvernement, l’absence totale de prélèvements sociaux CSG-CRDS ne se justifie pas dans la mesure où certaines rémunérations sont relativement élevées, et que ces prélèvements sont en principe "universels" puisqu’ils portent sur la totalité des rémunérations.

Louise de Maisonneuve