Déficit de l'Etat: l'indemnisation des arrêts de travail des fonctionnaires passée au crible

Avec un déficit public estimé à 5,6% du PIB en 2024, l'Etat cherche à faire des économies. Missionnée par Gabriel Attal lui-même en février dernier, l'Inspection générale des finances (IGF) et l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) ont délivré un rapport concernant les arrêts de travail des fonctionnaires que BFM Business a pu consulter. L'objectif: "l'identification d'économies et de gain de productivité chiffrés et réalisables".
"Les absences pour raison de santé dans la fonction publique sont restées stables sur la période 2014-2019 à un niveau moyen similaire au secteur privé - environ 8 jours d'absence par agent ou salarié", peut-on lire.
À partir de 2020, l'absentéisme pour raison de santé a connu une recrudescence, note l'IFG-Igas. C'est en 2022 que le décrochage entre secteurs public et privé est le plus marqué avec en moyenne 14,5 jours d'absence dans l'année par agent contre 11,7 pour le salarié.
Ainsi, le coût de ces absences - autrement dit le montant des jours rémunérés non travaillés - est estimé à 15 milliards d'euros en 2022 par la mission, soit 350 000 équivalents temps plein (ETP). Un "retour à des niveaux proches de ceux d'avant crise" serait un moyen de générer des économies de 6 milliards d'euros ou 140 000 ETP.
Des contrôles plus fréquents
Pour endiguer le problème, la mission mise sur plusieurs leviers de prévention, de contrôle et d'incitation. En plus du renforcement des relevés du taux d'absence dans la fonction publique, l'augmentation de la fréquence des analyses de données est suggérée. Un cadre réglementaire spécifique est par ailleurs présenté pour encadrer des "contrôles de la présence au domicile des fonctionnaires en arrêt de travail et prévoir les sanctions associées".
"Les contrôles administratifs et médicaux des arrêts de travail des agents publics sont insuffisamment mobilisés en raison des difficultés auxquelles les employeurs publics sont confrontés pour les mettre en œuvre", est-il précisé.
Une meilleure prévention dans le cadre du nouveau régime de protection sociale complémentaire des agents publics est préconisée ainsi qu'un plan spécifique à destination des employeurs publics pour "lutter contre l'absentéisme" et mieux le réguler.
Enfin, pour les autorisations spéciales d'absence, le rapprochement aux règles existantes dans le secteur privé est mis en avant - en particulier celles concernant les absences pour enfant malade. Ces absences diverses comptent pour 5 millions de jours par an et pour une rémunération de 1,1 milliard d'euros.
Jours de carence et taux de remplacement
Deux types de mesures permettraient de dégager des économies considérables selon la mission. D'une part, l'introduction de jours de carence supplémentaires serait un gain d'économies budgétaires pour l'Etat: à deux jours de carence, le gain potentiel serait de 67 millions d'euros (174 millions d'euros pour la fonction publique dans son ensemble) et de 112 millions d'euros (289 millions d'euros pour la fonction publique) à trois jours de carence. Pour preuve, la mission explique que la réintroduction du jour de carence unique en 2018 aurait rapporté 134 millions d'euros en 2023.
D'autre part, la mission IGF-Igas a planché sur une baisse du taux de remplacement à 90%, un seuil déjà imposé dans le privé par la loi. Le rapport rappelle toutefois que "70% des salariés du secteur privé bénéficient d'un maintien du salaire par l'employeur".
"Un taux de remplacement inférieur à 90% conduirait à un régime moins favorable pour les agents publics.", est-il expliqué.
Pour les fonctionnaires, l'indemnisation est à ce jour égale à ce que perçoivent aujourd'hui les agents en arrêt maladie de courte durée. Cette mise en place d'un taux de remplacement à 90% de la rémunération en arrêt maladie serait équivalent à 900 millions d'euros en faveur l'État ("environ 300 millions d'euros d'économies budgétaires par versant de la fonction publique").
Par conséquent, la mise en place d'un taux de remplacement partiel du salaire "à 90% ou 80% par exemple, plutôt que le plein traitement", constituerait une autre incitation financière pour lutter contre l'absentéisme.