Coronavirus: ces mesures adoptées par nos voisins pour soutenir l’économie

Giuseppe Conte - TIZIANA FABI / AFP
Plan de "guerre économique", "bazooka"… En France comme chez nos voisins, les gouvernements en place n’ont pas hésité à puiser dans le champ lexical guerrier pour qualifier leurs plans d’urgence visant à soutenir l’économie dans un contexte marqué par l’épidémie de coronavirus. Il faut dire que l'ampleur des mesures annoncées par les principales puissances européennes est inédite en temps de paix.
Toutes usent globalement des mêmes ressorts pour tenter de limiter le choc, bien que les leviers actionnés le sont parfois à des degrés différents d’un pays à l’autre. Italie, Espagne, Royaume-Uni, Allemagne… Tour d’horizon des principales mesures de soutien aux entreprises et aux ménages prises par nos voisins.
> Prêts aux entreprises
En Allemagne, le gouvernement a décidé de la création d’un fonds de secours pour les grandes entreprises, doté de 600 milliards d’euros, dont 400 milliards d’euros de garanties pour les dettes des entreprises.
Le Royaume-Uni et l’Espagne ont également annoncé que l’Etat se portera garant des nouveaux prêts des entreprises respectivement à hauteur de 330 milliards de livres (365 milliards d’euros) et 100 milliards d’euros. En France, le gouvernement prévoit 300 milliards d'euros de garanties de l’Etat pour les prêts des entreprises.
> Subventions aux entreprises
Des aides directes sont prévues dans certains pays pour soutenir les entreprises. Outre-Manche, les restaurateurs et autres commerçants les plus touchés devraient avoir accès à des subventions pouvant aller jusqu’à 25.000 livres (27.500 euros).
En Allemagne, une aide individuelle comprise entre 9000 et 15.000 euros pour les entreprises de moins de dix salariés et les indépendants sera versée pour trois mois, à condition qu'ils prouvent que leur problème de trésorerie est lié à la crise du coronavirus. Au total, le gouvernement fédéral offrira jusqu’à 50 milliards d’euros de subventions aux petites entreprises.
Dans l’Hexagone, toutes les entreprises de moins d’un million d’euros de chiffre d’affaires qui ont été contraintes de fermer et dont les revenus ont chuté d’au moins 70% entre mars 2019 et mars 2020 pourront recevoir un forfait de 1500 euros et réclamer 2000 euros supplémentaires en cas d’extrême difficulté.
> Charges et impôts
L’ensemble des principales puissances européennes a pris des mesures visant à exonérer ou à reporter le paiement de certaines charges et impôts pour éviter les faillites. Par exemple, le Royaume-Uni prévoit la possibilité de différer jusqu’à trois mois le versement de la TVA.
Le gouvernement d’Edouard Philippe a quant à lui mis en place un vaste dispositif qui va permettre, entre autres, aux entreprises de reporter le paiement des cotisations prévu le 5 avril. Le remboursement des crédits d’impôts doit également être accéléré. Par ailleurs, le règlement des factures énergétiques et des loyers des plus petites entreprises peut être suspendu.
Même logique en Allemagne où le versement des impôts des entreprises les plus touchées pourra être étalé. A l’instar de l’Italie qui a suspendu le versement des cotisations sociales, des primes d’assurances, des factures énergétiques et de la TVA jusqu’au 30 avril prochain pour les secteurs en première ligne et qui devrait annoncer l’élargissement de ce dispositif dans un prochain décret début avril. En Espagne, les PME bénéficieront elles aussi d’une suspension de paiement des cotisations sociales et d'un report des échéances fiscales.
> Chômage partiel
C’est l’arme principale utilisée par la plupart des pays touchés par le coronavirus pour éviter les licenciements. Le gouvernement fédéral allemand, qui avait déjà utilisé ce dispositif à large échelle lors de la crise financière de 2008, a assoupli les conditions de son accès. Désormais, toute entreprise dont au moins 10% des salariés sont concernés par l’arrêt temporaire de la production pourront en bénéficier. Ce seuil était de 30% jusqu’à présent. En outre, les entreprises se verront rembourser l'intégralité des cotisations sociales et non plus la moitié. L'agence fédérale pour l’emploi prendra en charge l’indemnisation des salariés qui s’élève à 60% du salaire net pour les employés sans enfants, et à 67% pour ceux ayant des enfants.
Au Royaume-Uni, le dispositif mis en place est inédit. L’Etat prendra également en charge l’indemnisation qui représentera 80% des salaires avant impôt dans la limite d’un revenu de 2500 livres (2780 euros) par mois. En Italie, la Cassa Integrazione Garantita versera 80% du salaire brut à l’ensemble des salariés concernés pendant au moins neuf semaines. Selon l'Union des travailleurs italiens, un salarié gagnant 1316 euros nets percevra 940 euros. Ce dispositif devrait être prolongé de six mois et les salariés en CDD devraient voir leur indemnisation revue à la hausse. En contrepartie, les licenciements sont interdits pendant 60 jours, sauf pour motif disciplinaire.
Chez nos voisins ibériques, les salariés au chômage partiel percevront 70% de leur salaire brut pris en charge par l’Etat dans la limite de 1098 euros pour les employés sans enfant, 1254 euros si le bénéficiaire a un enfant et 1411 euros s'il en a deux ou plus. Là-encore, les licenciements seront interdits. Les cotisations sociales seront prises en charge à 100% pour les petites entreprises et à 75% pour les autres. La France a elle aussi élargi et renforcé son dispositif d’activité partielle. L’Etat paiera l’intégralité de l’indemnisation qui s’élève à 84% des salaires nets (70% du salaire brut), dans la limite de 4,5 SMIC.
> Aides aux familles
Les différents gouvernements européens ont adopté des mesures pour venir en aide aux salariés. La France a notamment annoncé que les parents contraints de s’arrêter de travailler pour s’occuper de leurs enfants pourront percevoir au moins 90% de leur salaire net. Le délai de carence est supprimé temporairement comme au Royaume-Uni où l’allocation maladie pourra être versée dès le premier jour d’arrêt, au lieu du quatrième.
L’Italie prévoit de son côté un "congé parental extraordinaire" de 15 jours payé à 50% du salaire pour les parents d’enfants de moins de 12 ans ainsi que des coupons d’une valeur de 600 euros pour couvrir les frais de garde d’enfants. En Espagne, les employés obligés de restreindre leurs horaires de travail pour s’occuper de leurs enfants devraient recevoir une prestation de la sécurité sociale pour compenser la perte de salaire.
> Aides aux ménages modestes
Pour aider les ménages, le gouvernement espagnol a annoncé le déblocage de 600 millions d’euros destinés au financement d’aides aux personnes âgées et aux plus vulnérables. Les coupures d’eau, d’électricité et de télécommunications sont également interdites pendant un mois tandis qu’un moratoire sera mis en place sur les mensualités de remboursement des prêts immobiliers pour les ménages, travailleurs et indépendants en situation de "vulnérabilité économique" et victimes d’une baisse de leurs revenus. Enfin, l’allocation chômage sera versée même si la condition de durée n’est pas remplie.
En Allemagne, le paiement des loyers pourra être reporté jusqu’au 30 juin pour les plus démunis et l’Etat apportera son soutien en cas de défaut de paiement. Comme en France ou au Royaume-Uni, les expulsions seront interdites. Le gouvernement britannique prévoit d’ailleurs une aide d’un milliard de livres pour aider les quatre millions de ménages les plus modestes à payer leur loyer via une augmentation de l’allocation logement.
L’Italie suspend elle aussi le remboursement de certains prêts immobiliers et bancaires et prend plusieurs mesures en faveur des plus modestes comme le versement d’une indemnité de 600 euros pour les saisonniers, ouvriers agricoles et indépendants, un bonus de 100 euros pour tous les salariés gagnant moins de 40.000 euros brut par an et la création d’un "fonds de revenu de dernière instance" pour les plus faibles revenus.
Le Royaume-Uni revalorisera pour sa part les allocations chômage à hauteur de 1000 livres par an. Enfin, le gouvernement français a déjà annoncé la reconduction de la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat non conditionnée à un accord d’intéressement pour les salariés qui travaillent. Parmi les autres mesures, plusieurs aides sociales seront automatiquement versées sans réexamen de la situation des bénéficiaires. De la même manière, les chômeurs en fin de droit verront le versement de leurs allocations prolongées durant toute la durée de la crise qui, elle, sera neutralisée dans le calcul des droits.