BFM Business
Economie

Beurre, café, sucre, cacao… Leurs prix explosent, peuvent-ils relancer l'inflation?

placeholder video
Les cours de nombreuses matières premières agricoles battent des records depuis quelques mois. Pour autant les experts du marché ne craignent pas une propagation de ces hausses dans les prix à la consommation. Explications.

Un taux d'inflation au plus bas depuis trois ans et demi, des prix qui refluent dans les grandes surfaces depuis cinq mois. La crise inflationniste sort de l'actualité et est prête à rejoindre les livres d'Histoire.

Pourtant depuis quelques mois, les tarifs des matières premières et notamment agricoles donnent de nouveaux signes de fièvre.

Café, sucre, beurre, tournesol ou jus d'orange

À commencer par le beurre dont le prix spot bat des records ces derniers mois. Culminant à près de 8200 euros la tonne à fin septembre (92% de plus en un an), le cours du beurre n'avait jamais été aussi élevé.

Toujours en 2024, c'est le jus d'orange qui n'en finit pas de flamber. La livre de concentré de jus d'orange congelé a franchi la barre des 5,50 dollars à New York, soit une hausse de 175% par rapport à janvier 2023.

On peut poursuivre sur les matières premières du petit déjeuner avec un cours du sucre au plus haut depuis six mois à 23,3 cents la livre ou encore celui du café -principalement le robusta- qui a pris 147% depuis un an.

Après l'inflation de 2022, conséquence de la crise énergétique et de la guerre en Ukraine, assiste-t-on à une nouvelle poussée cette fois liée au dérèglement climatique?

L'ensemble des matières premières en baisse

Car des sècheresses au Brésil à l'origine de la pénurie de jus d'orange aux mauvaises récoltes au Ghana pour le cacao en passant les chaleurs extrêmes qui dépriment les plants de café robusta du Vietnam... Les conditions climatiques perturbent les récoltes et entraînent des pénuries.

"Ponctuellement sur certaines matières premières, il peut y avoir d'énormes pénuries, on l'a vu sur le sucre, sur le café ou sur le cacao récemment, rappelle Alain Pitous, spécialiste des matières premières chez ESG. Mais on constate aussi que lorsqu'un endroit est sous tension parce qu'il y a de la sècheresse ou une grosse inondation, d'autres endroits profitent d'un été clément."

L'expert rappelle en outre que l'ensemble des matières premières reste orienté à la baisse en 2024, de l'ordre de 10%.

Hormis pour quelques produits, les pénuries restent donc le plus souvent localisées et ne sont pas de nature à produire une hausse globale de prix. On le constate par exemple en France sur le blé ou le beurre, deux productions en souffrance dans l'Hexagone. Ce qui n'est pas le cas au niveau mondial où les cours restent à des niveaux plutôt bas.

Pour autant même localisées et ponctuelles, ces hausses de prix de matières premières pourraient-elles faire grimper les prix de certains produits de consommation dans nos rayons? Là encore, c'est peu probable, en l'état actuel du marché.

Le café reste moins cher que l'emballage de la dosette

Concernant le beurre par exemple, c'est plus des situations de pénurie comme en 2017 qui menacent que de réelles flambées. Le produit étant un marqueur tarifaire pour la plupart des consommateurs, les grandes surfaces ont tendance à jouer sur leur marge pour maintenir le prix du beurre à un tarif doux. Lors de la précédente crise du beurre, les boulangers allaient se fournir en grande distribution pour payer moins cher, d'où les ruptures en rayon constatées.

Mais plus globalement, les prix des matières premières n'ont pas une incidence très importante sur celui des produits de consommation.

"Dans une baguette à 1,10 euro, le blé, c'est 7-8 centimes, dans un yaourt, la part du lait, c'est 10%, indique Philippe Chalmin, économiste et fondateur de CyclOpe. La part agricole dans le produit que l'on achète est extrêmement faible. D'ailleurs je dis souvent que dans la dosette Nespresso, le café est moins cher que l'emballage et que la marque."

La crise inflationniste de 2022 avait d'ailleurs été provoquée par la hausse des prix de l'énergie et en particulier du gaz et du pétrole qui s'étaient répercutés sur l'ensemble de la filière agroalimentaire. Une situation très différente aujourd'hui.

Frédéric Bianchi
https://twitter.com/FredericBianchi Frédéric Bianchi Journaliste BFM Éco