Twitter: l’affaire Benalla, amplifiée par un "gonflage numérique"

Twitter a offert à l'affaire Benalla une formidable caisse de résonance. - CHARLY TRIBALLEAU / AFP
L’affaire Benalla, premier scandale du mandat d’Emmanuel Macron, pourrait devenir un cas d’école du "gonflage numérique" sur Twitter. A l’aide du logiciel Visibrain, l’association de lutte contre la désinformation EU Disinfo Lab s'est plongée dans la déferlante de tweets associés au sujet. Résultat : entre le 19 juillet et le 3 août, plus de 4,5 millions de tweets en français ont été échangés sur ce sujet par plus de 247 701 auteurs différents. 1% d'entre eux, soit 3378 personnes en excluant les médias, sont à l'origine de 47% de ces tweets*. Si l'étude ne minimise en rien l’ampleur de l’affaire Benalla, elle souligne simplement un phénomène d’hyperactivisme sur Twitter.
D'après l'étude complète, accessible à ce lien, ces comptes actifs à hauteur de plus de 200 tweets par semaine, ont eu un effet démultiplicateur sur le réseau social. "4 millions de tweets, c'est du jamais-vu en France", note Alexandre Alaphilippe, directeur exécutif du EU Disinfo Lab, auprès de BFM Tech. "Pour #Balancetonporc, lancé à la suite du scandale Harvey Weinstein, nous étions autour de 780 000 tweets. Pourtant, environ 250 000 comptes se sont exprimés sur le sujet dans les deux cas".
Le problème ? Sur l'ensemble des informations partagées par ce 1% de comptes les plus actifs, près de la moitié a trait à de la désinformation, dont l''association donne plusieurs exemples de sujets.

Les 3378 comptes les plus généreux en tweets comprennent, pour 27% d'entre eux, des correspondances avec la "communauté russophile". Cette correspondance a pu être établie à partir de la propension de ces comptes à retweeter des contenus assimilés à de la propagande russe. "Lors de l’élection présidentielle française, nous avons mené sur plus de trois mois une analyse de la propagation de contenus liés à Russia Today et Sputnik", complète Alexandre Alaphilippe. "Il s’agit d’une communauté cohérente de gens qui se suivent entre eux, se retweetent entre eux et partagent des intérêts communs. Beaucoup n'interagissent pas sous leur vrai nom, sans préciser leur localisation et sont difficiles à tracer. A ce stade, nous ne sommes pas capables de préciser d'où ils viennent et de quelle façon ils ont été créés".
Outre les "russophiles" et affiliés, certaines communautés se sont montrées particulièrement promptes à s'exprimer sur l'affaire Benalla. Au sein des 1% de comptes hyperactifs, 29% appartenaient à la communauté souverainiste, LR et proche du mouvement contre le mariage pour tous; 29 % par des comptes rassemblant le Rassemblement national, des souverainistes et quelques personnes du mouvement contre le mariage pour tous (bleu) et 42 % de la communauté de la France insoumise (rouge), avec quelques porosités avec les autres communautés.
Et sur les autres réseaux? "Il ne faut pas oublier que Twitter est un réseau social public, et que l'on ignore encore ce qu'il se passe sur d’autres réseaux en matière de gonflage numérique", rappelle Alexandre Laphilippe. "Ce qui est beaucoup plus problématique.
*De premiers chiffres ont été communiqués le 1er août, sur une temporalité différente. Ils faisaient état de l'activité de 2 600 comptes, soit 1% des comptes actifs sur l’affaire Benalla, ayant produit 44% des messages sur cette polémique, soit 1,7 million de tweets sur un volume colossal de 4 millions.