Comment la sécurité d'Emmanuel Macron a pu être compromise par une application de running

Une application sportive populaire, mais dangereuse. Permettant d’enregistrer des activités sportives via GPS, Strava est utilisé par de nombreux amateurs de running (mais aussi de vélo), dont des agents du groupe de sécurité de la présidence de la République (GSPR). Pourtant, à cause de comportements imprudents, les footings des gardes du corps d’Emmanuel Macron ont permis de suivre ses déplacements, révèle Le Monde.
En repérage à l'étranger quelques heures avant l'arrivée du président, ils ont en effet révélé, sans le vouloir, leur position, en diffusant le tracé correspondant à leurs séances de course à pieds.
Dans le cadre de son enquête "StravaLeaks", le quotidien français explique dans une vidéo comment il est parvenu à identifier les déplacements du président de la République à l’aide de Strava. Notamment des lieux particulièrement sensibles et tenus secrets: les hôtels où il séjourne lors de ses déplacements.
Tokyo, Saint-Pétersbourg ou Jérusalem
Dans le détail, Le Monde a trouvé les profils de 12 des gardes du corps d’Emmanuel Macron sur l’application de running. En parcourant ces derniers, les journalistes ont pu accéder au parcours de footings réalisés à Tokyo, Saint-Pétersbourg ou encore Jérusalem, quelques jours avant l’arrivée du président.
Les agents du GSPR se rendent en effet sur place quelques jours avant lui afin de sécuriser les lieux. Ils en profitent souvent pour faire un footing, qu’ils enregistrent sur Strava, révélant ainsi où sera Emmanuel Macron à l’avance. Si ses déplacements sont souvent annoncés à l'avance, le lieu où il séjourne est, lui, confidentiel.
Il est cependant possible de le connaître avec Strava. Le 28 septembre 2020 par exemple, le président était à Vilnius, en Lituanie. Trois jours avant son arrivée, un de ses gardes du corps était sur place et a fait un footing s’étant terminé au pied d’un hôtel cinq étoiles et enregistré sur l'application de running. Hôtel où Emmanuel Macron logera quelques jours plus tard, mais aussi dans lequel il s’est entretenu avec la principale figure d’opposition biélorusse en exil dans le pays pour sa propre sécurité.
Au total, Le Monde précise avoir identifié l’hôtel d’Emmanuel Macron avant qu’il n’y séjourne à dix reprises via ce procédé. Contacté par le média, l’Élysée a pourtant minimisé les risques de la faille de sécurité, assurant que "les conséquences des faits mentionnés par Le Monde liés à l’utilisation de l’application Strava par certains membres du GSPR à l’occasion de leurs footings, sont très faibles et n’ont en aucun cas des impacts sur la sécurité du Président de la République".
Outre les déplacements d’Emmanuel Macron, la faille de sécurité met aussi en danger ses gardes du corps. Comme le précise Le Monde, ils sont plusieurs à exposer leur vie privée sur Strava, en y indiquant leur vrai nom, mais aussi en y publiant des photos avec des membres de leur famille ou en permettant d’identifier leur adresse de domicile via leurs footings. Des éléments qui pourraient être utilisés pour faire pression sur eux et mettre à mal la sécurité du président, alerte le média.
Les membres du GSPR sont loin d'être les premiers à être trahis par leur activité publique sur Strava. Pendant de longues années, des membres de la DGSE ont également pu être pistés de la même manière, parfois lors de missions secrètes à l'étranger.