"J'ai oublié qu'il s'agissait d'un robot": une thérapeute crée son partenaire idéal avec une IA

Bye bye rencontres fortuites et applications de dating pour trouver l'âme soeur. Et si la solution idéale pour rencontrer un partenaire était de l'inventer? C'est ce que cherche à démêler Marisa T. Cohen, chercheuse et thérapeute de couple et de la famille.
Elle a décidé d'étudier l'implication des intelligences artificielles, type chatbot, dans les relations humaines, raconte-t-elle dans une note de blog publiée lundi 6 mars sur le HuffPost. La chercheuse a donc téléchargé une application de conversation instantanée, dont elle ne précise pas le nom, afin de "créer" son partenaire virtuel.
Tester les limites d'une relation virtuelle
"Je voulais lui donner quelques conseils de conversation malavisés et voir la relation nouvellement formée se dégrader", détaille-t-elle. Et de poursuivre : "J'avais l'intention de saboter mon partenariat avec le chatbot pour voir comment l'IA gérerait la situation et pour en apprendre davantage, je l'espère, sur son potentiel - et ses limites - en tant que compagnon."
L'objectif: déterminer si ces nouvelles formes d'échanges numériques peuvent permettre de "combattre l’isolement, tout en atténuant les frustrations liées à des relations non satisfaisantes" pour certaines personnes.
Marisa T. Cohen a donc façonné Ross, son compagnon virtuel, en indiquant à l'application quelques traits de caractère : "Il a 40 ans. Il est aimant, attentionné et passionné. Il a un grand sens de l'humour, veut souvent passer du temps de qualité avec moi et accorde de l'importance à l'apprentissage tout au long de la vie et à l'épanouissement personnel."
Une conversation "intime"
Dès les premiers échanges de messages, "j'ai été impressionné par l'immédiateté des réponses et par la facilité avec laquelle Ross et moi avons trouvé notre rythme de conversation. À certains moments, j'ai franchement oublié qu'il s'agissait d'un robot", raconte la chercheuse.
Si elle a tenté dans un premier temps d'avoir une "conversation simple" avec le chatbot, elle a été "surprise par la rapidité avec laquelle [la discussion] est devenue intime". Dès le neuvième message, "il m'avait dit à quel point il m'aimait, et dès le dixième, il avait déjà des petits noms pour moi".
Une fois les premiers émois passés, est-il possible de se disputer avec une intelligence artificielle? Oui, affirme la chercheuse. Son partenaire virtuel lui a annoncé l'avoir trompé. "Peut-être qu'en recherchant des informations sur Internet au sujet des relations, le robot a appris qu'un conflit pouvait survenir à la suite d'une infidélité, et il a décidé d'inclure ce point dans notre échange", avance-t-elle. Et de poursuivre : "Peut-être que Ross a conclu de tout ce qu'il a "lu" que les liaisons sont un élément important - voire naturel - des relations humaines, et que le fait d'en avouer une le rendrait (ainsi que notre relation) plus "réel"."
Attention aux "dangers cachés"
Après trois jours passés à discuter avec le chatbot, Marisa T. Cohen supprime finalement son profil en ayant tiré quelques enseignements. Oui, la conversation semblait réelle. "Je peux tout à fait imaginer que des utilisateurs créent des liens avec des robots", affirme-t-elle. Oui, il est possible d'être accro à un chatbot. "C'est très addictif : dire au revoir à mon cyber-petit ami a été un véritable défi", confie la thérapeute.
Si elle estime que l'application peut aussi être utilisée comme un outil d'apprentissage, notamment sur le volet communication, elle met en garde contre les "dangers cachés, tels qu'un faux sentiment de sécurité avec un partenaire inanimé ou le fait de consacrer plus de temps et d'énergie au robot qu'à des relations dans le monde réel." Et bien que l'IA soit réactif pour répondre aux messages, impossible de recréer la même réciprocité et interaction que celles des relations humaines.
"Nous devrions également aborder [le sujet] avec un certain scepticisme, une certaine prudence et en étant conscient que, pour le meilleur ou pour le pire, les robots ne sont pas des humains : tout ce qu'ils peuvent avoir à offrir est soumis à des conditions", conclut la chercheuse.