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Microsoft: HOP, l'UFC Que choisir et 20 organisations lancent une pétition contre l'obsolescence de 400 millions de PC sous Windows 10

Le logo de Microsoft.

Le logo de Microsoft. - MATTHIAS BALK / DPA / dpa Picture-Alliance via AFP

Derrière une pétition pour faire entendre à Microsoft la mobilisation de citoyens-consommateurs concernés, l'association Halte à l'obsolescence programmée et 21 organisations préparent un long combat: la mise en place d’une loi-cadre pour empêcher les géants de la tech de rendre obsolètes leurs appareils dans les 15 ans suivants leur lancement…

A la tête d’une coalition de 22 organisations nationales, dont l’UFC Que Choisir, La fresque du numérique ou encore Emmaüs Connect, l’association Halte à l’Obsolescence Programmée (HOP) vient de dévoiler une pétition destinée à dénoncer un "scandale environnemental" et une "aberration économique", que l’association et ses alliés qualifient de "taxe Windows".

Retour sur un combat long qui ne fait que commencer

Trois mois, et pas un mot. Le 12 juin dernier, l’association Halte à l’Obsolescence Programmée (HOP) adressait un courrier à Microsoft pour l’alerter des conséquences d’une décision prise par le géant américain. A savoir celle de ne plus assurer de "mises à jour logicielles gratuites, d’assistance technique ou de correctifs de sécurité" pour Windows 10 à partir du 14 octobre prochain, comme expliqué sur le site de l’éditeur. Depuis le 12 juin, rien. Le 25 août dernier, HOP rendait donc public son courrier, espérant attirer l’attention de la société de Redmond sur ce problème majeur, qui verra, à travers le monde, environ 400 millions de PC tout à fait fonctionnels devenir des machines obsolètes et dangereuses.

L’éditeur semble bouger en coulisse, mais continue d'encourager les utilisateurs à passer sous Windows 11. Mais voilà, pour que le dernier système d’exploitation fonctionne sur un PC, il est nécessaire que celui-ci embarque un module de sécurité spécifique (TPM 2.0), qui n’est pas présent sur certains ordinateurs, pourtant récents (moins de cinq ans). Selon HOP, 22% des ordinateurs en France tournent sous Windows 10 et sont incompatibles avec Windows 11. Ce qui signifie qu’il faut soit les changer, soit payer pour l’extension des mises à jour de sécurité de Windows 10. Ce qui représente un coût d'environ 52 euros hors taxe par poste la première année, puis 104 euros, puis 244 euros, détaille l'association. On comprend mieux pourquoi HOP qualifie cette pratique de "taxe Windows".

La pétition contre la "Taxe Windows" de l'association HOP et ses 21 alliés
La pétition contre la "Taxe Windows" de l'association HOP et ses 21 alliés © HOP

Dénoncer une situation "injuste" et "intolérable"

Laetitia Vasseur, déléguée générale de HOP, nous explique qu’à ses yeux cette façon de faire revient à forcer la main des utilisateurs. "On subordonne le fait d’avoir éventuellement des mises à jour de sécurité à un paiement. C’est intolérable", s’insurge-t-elle, alors qu’en parallèle Microsoft réalise des "milliards de bénéfices chaque année. Près de 87 milliards d’euros en 2025", complète-t-elle. Avant de conclure: "Ils ont les moyens de proposer cette mise à jour gratuitement". Les moyens d'éviter une obsolescence lourde de conséquences, tandis que la communication de HOP estime que le coût mondial pour les utilisateurs pourrait s’élever à 10,4 milliards d’euros.

D’autant qu’à ce coup de force économique, s’ajoute un désastre écologique en puissance. L’association estime en effet que le remplacement des ordinateurs Windows 10 par des machines compatibles avec Windows 11 pourrait générer par moins de "70 millions de tonnes de gaz à effet de serre", ou l’équivalent de "32.000 tours Eiffel en matières premières extraites"…

Une pétition pour quoi faire ?

Le décor étant planté dans le détail, pourquoi lancer une pétition à presque un mois de la date fatidique? Deux raisons à cela, nous explique Laetitia Vasseur. La première est que "Microsoft entende le message et propose des mises à jour de sécurité gratuites et continues pour tous les ordinateurs Windows 10 non compatibles avec Windows 11". La déléguée générale de HOP marque un temps et précise. "Le fait que Microsoft propose déjà une extension de support payante prouve que c’est techniquement réalisable. Il est juste aberrant de la rendre payante." Sans compter qu’en l’état actuel des choses "elle n’offre qu’un sursis et aucune sécurité réelle au consommateur".

Voilà pourquoi derrière cette pétition, il y a une deuxième raison, un deuxième enjeu. Celui de la responsabilisation des éditeurs, au travers d’une nouvelle loi.

"Nous demandons une loi pour encadrer ces pratiques, et avoir des mises à jour de sécurité obligatoires pendant 15 ans sur les équipements de type ordinateur, à partir du moment où l’appareil est vendu."

Aux yeux de la représentante de HOP, à qui on doit la création du délit d’obsolescence programmée en juillet 2015, il est essentiel d’éviter de "créer un précédent", dans lequel d’autres géants de la tech pourraient s’engouffrer ensuite.

Ces deux raisons tiennent à deux temps d’action. Le premier temps est celui de l’urgence à "mettre la pression sur Microsoft pour qu’il revienne sur sa décision", explique Laetitia Vasseur. Le second est un temps plus long. "Le temps du plaidoyer politique pour faire adopter une loi-cadre par le prochain gouvernement". L’instabilité gouvernementale actuelle perturbe le combat, le ralenti, mais ne démobilise pas Laetitia Vasseur et ses équipes. Elle nous indique d'ailleurs avoir déjà établi le contact avec le cabinet d’Agnès Pannier-Runacher, ministre de la Transition écologique, de l'Énergie, du Climat et de la Prévention des risques.

La pétition est donc une arme de choix pour "informer les utilisateurs, les tenir au courant de ce qui arrive" mais aussi un moyen de faire entendre leur voix à Microsoft. Des voix qui se joindront à celles provenant de mouvements identiques dans d’autres pays d’Europe et aux Etats-Unis. Enfin, la pétition est un fer de lance pour mener le travail de lobbying éclairé auprès du monde politique français afin qu’une loi soit passée rapidement. Plus la pétition rencontrera de succès et plus le travail de plaidoirie des équipes de HOP sera facilité pour défendre nos droits, notre pouvoir d’achat et notre planète.

La pétition est hébergée sur le site de l’association et peut être signée en quelques minutes. Vous la trouverez ici : "Non à la taxe Windows".

Pierre Fontaine