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The Last of Us Part I: pourquoi il faut encore y jouer neuf ans après sa sortie

The Last of Us Part I

The Last of Us Part I - Naughty Dog - Sony

The Last of Us Part I est désormais disponible sur PS5. Jeu emblématique de la PS3, revenu en version remastérisée sur PS4, le chef-d’œuvre de Naughty Dog parvient à faire le plein d'innovations pour rester marquant près d'une décennie plus tard.

"C’est notre lettre d’amour aux fans et à la franchise." C’est en ces mots que Shaun Escayg, directeur créatif de Naughty Dog, résume les raisons qui ont poussé le studio à redonner vie à The Last of Us, neuf ans après sa sortie sur PlayStation 3. Titre emblématique dans l’histoire du jeu vidéo, The Last of Us a changé à tout jamais la façon de raconter une histoire, montrant qu’un jeu pouvait être aussi bien écrit et conçu qu’un film.

“Quand nous avons conçu The Last of Us, nous voulions une histoire avec des personnages forts, une narration marquante digne d’un film et pas seulement un jeu qui repose sur son gameplay”, explique à Tech&Co le directeur du jeu Matthew Gallant, ravi de voir l’idée initiale faire toujours son effet près d’une décennie plus tard. “Je crois que c’est en ça que nous avons marqué les esprits et influencé quelque part l’industrie du jeu vidéo. Ça a été un tournant pour Naughty Dog, mais ça a aussi eu une résonance auprès d’autres studios qui ont suivi et voulu faire des jeux différemment.”

The Last of Us Part I, le remake de la version originale sortie en 2013
The Last of Us Part I, le remake de la version originale sortie en 2013 © Naughty Dog - Sony

Un chef-d’œuvre qui a marqué l’histoire du jeu vidéo

The Last of Us reste un chef-d’œuvre à avoir joué une fois dans sa vie. Il renaît à l’identique, mais complètement changé aussi avec l'arrivée du remake rebaptisé The Last of Us Part I. Si les anciens joueurs auront besoin d’un temps d’adaptation pour se faire aux nouveaux décors et notamment à la nouvelle Ellie, on se laisse totalement séduire par des séquences plus prenantes et des personnages encore plus réalistes.

Depuis la sortie de The Last of Us (TLOU) sur PS3 en 2013, puis en version améliorée pour PS4 en 2014 (The Last of Us Remastered), plus de 20 millions de joueurs ont été bouleversés par les aventures de Joel, un homme marqué par la vie, et Ellie, orpheline de 14 ans. Tous deux font face à un monde post-apocalyptique où la population a été décimée par un champignon qui contamine les habitants. Traversant des États-Unis dévastés, ils tentent d’échapper à des mutants, mais aussi à des humains hostiles luttant pour leur survie.

“Le jeu original était sans doute l’un des meilleurs jeux jamais conçus. Il y a un sentiment de responsabilité encore plus grand face à ce poids pour préserver l’essence du titre”, rappelle Shaun Escayg. Il faut dire que TLOU tient une place particulière pour ce dernier. C’est le tout premier jeu que le directeur créatif de Naughty Dog a conçu. Et neuf ans plus tard, il est encore à la manœuvre pour redonner vie à l’œuvre sans toucher à la nature même du jeu.

“Nous voulions conserver tout ce que nous aimions dans le jeu initial et concentrer notre énergie sur les multiples améliorations possibles, tout en restant fidèles à l’esprit qui plaît tant aux fans”, souligne-t-il.

En faire un remake à la hauteur de son aura

L’idée de refaire une seconde fois TLOU est venue aux équipes après avoir bouclé la suite du jeu, The Last of Us Part II, qui se déroule cette fois quatre ans plus tard. "On s’est dit que ce serait génial que les joueurs puissent jouer le premier et le second jeu en continu, sans lacune technologique ni changement visuel”, ajoute Shaun Escayg. Et là, il y avait du travail de refonte à faire pour qu'un jeu d'une autre technologie colle aux avancées graphiques d’un titre sorti en 2020 sur PS4 et PS5. “Nous n’avons rien changé des éléments de base et de l’expérience. Nous avons utilisé tout ce que nous avions appris en une décennie de développement, de progrès technologiques, pour faire un jeu à la hauteur de son aura et de nos ambitions”, ajoute-t-il.

Le personnage d'Ellie dans The Last of Us Remastered (2014)
Le personnage d'Ellie dans The Last of Us Remastered (2014) © Naughty Dog - Sony
Le personnage d'Ellie dans The Last of Us Part I (2022)
Le personnage d'Ellie dans The Last of Us Part I (2022) © Naughty Dog - Sony

Alors les équipes de Naughty Dog ont tout repris de zéro. À la différence du remaster de 2014 où il suffisait d’améliorer les textures, la profondeur et la technologie du jeu PS3 pour l’adapter à la PS4 et le rendre plus beau, dans ce remake de 2022, chaque image, chaque scène, chaque cinématique ont été refaites intégralement tout comme l’environnement 3D du jeu. Il en résulte un autre jeu visuellement, mais avec des scènes et des dialogues déjà connus des joueurs. Le rendu final se rapproche ainsi bien mieux de The Last of Us Part II notamment avec le personnage d’Ellie qui paraît une version plus adulte de l’adolescente initiale quand la première adolescente avait fait un peu parler d’elle en ressemblant énormément à l’actrice Ellen Page (devenue Elliot Page depuis) sans sans accord.

“C’est un peu comme si un artiste avait repris sa toile pour remplir les espaces et retravaillé le tout pour l’ancrer dans le réel. Nous avons utilisé les mêmes modèles de personnages, nous n’avons pas refait de motion capture, ce sont les mêmes voix”, explique Matthew Gallant, directeur du jeu. “Mais le résultat est totalement différent. Les personnages ont plus d’émotions sur le visage grâce à une reproduction plus fidèle de leurs sentiments, leurs réactions.” Et Shaun Escayg d’ajouter : “J’ai fait le jeu des centaines de fois depuis le tout premier et j’ai été surpris par certaines cinématiques qui apportent plus de profondeur à l'histoire. Cela apporte davantage d’immersion et d’émotion. On ressent encore plus la colère, la peur… Même moi, je me suis laissé submerger par certaines scènes.”

La manette DualSense apporte de nouvelles sensations

Et pour renforcer cette impression, Naughty Dog a pu profiter d’une innovation maison: la DualSense. La manette de la PS5 fait profiter le jeu de technologies que ce dernier ne comptait évidemment pas initialement pour améliorer les séquences de combat en proposant bien plus de réglages et de choix d’armes grâce aux gâchettes adaptatives (vous pouvez choisir la tension de l’arc), de ressenti des surfaces et situations avec le retour haptique et le haut-parleur embarqué qui recréent la sensation d’un revêtement, du vent, des explosions, d’une blessure soudaine, etc.

La manette DualSense.
La manette DualSense. © Sony

Et cela permet aussi aux personnes malentendantes et malvoyantes de profiter de vibrations lors des cinématiques pour ressentir encore mieux la scène et jouer la carte de la continuité entre les séquences de jeu et scènes. “C’était important pour l’émotion de pouvoir se poursuivre à travers les parties jouées et rester dans la même expérience. Les nouvelles technologies de création nous le permettent, notamment le motion matching qui permet de faire évoluer de la même manière un personnage de la cinématique et du jeu avec la même fluidité manette en main,” renchérit Matthew Gallant.

L’accessibilité, la marque de fabrique de Naughty Dog

L’accessibilité, c’est l’autre ajout de taille au jeu. Dans la première version et même le remaster, l’idée de rendre le jeu accessible au plus grand nombre n’était pas dans les esprits. C’est désormais un sujet important pour Naughty Dog. Toutes les productions du studio de Santa Monica comportent désormais un lot incalculable de réglages pour adapter les contrôles, la luminosité, les couleurs, la taille d’affichage des menus et des sous-titres, l’audiodescription, le son, et bien d’autres encore afin de permettre à tous les joueurs, quel que soit leur handicap de pouvoir s’initier à The Last of Us.

Les réglages des options d'accessibilité dans The Last of Us Part I.
Les réglages des options d'accessibilité dans The Last of Us Part I. © Naughty Dog - Sony
The Last of Us Part I ajoute des paramètres d'accessibilité qui n'existaient pas dans le jeu original.
The Last of Us Part I ajoute des paramètres d'accessibilité qui n'existaient pas dans le jeu original. © Naughty Dog - Sony

Car, si le jeu reste le même que celui de 2013, avec la seule extension Left Behind de 2014 intégrée, ce ne sont pas les joueurs initiaux que le studio veut séduire. Mais bien en attirer de tout nouveaux, trop jeunes à l’époque pour avoir plongé dans l’univers. L’adaptation à venir du jeu en série pour HBO était aussi un argument pour faire une version plus moderne et conforme aux exigences graphiques actuelles des joueurs, plutôt que de les tourner vers la version PS4, disponible aussi pour les abonnés au PlayStation Plus Premium, mais en streaming. Il fallait aussi justifier les 80 euros à débourser pour un nouveau “vieux jeu”, certes totalement refait.

L'expérience reste toujours aussi prenante. Mais elle est encore plus belle près d’une décennie plus tard. Un exploit aussi impressionnant, à la hauteur définitivement de l'aura d'un jeu qui se laisse toujours autant apprécier.

Melinda Davan-Soulas