"Life is Strange", "Banishers"... Don't Nod, le fleuron français du jeu vidéo en grande difficulté financière

La nouvelle n'a fait guère de surpris: le studio de jeux vidéo français Don't Nod a annoncé ce mercredi 16 octobre "un projet de réorganisation" qui pourrait concerner jusqu'à 69 employés, sur un effectif total de 360, via un potentiel plan de départs volontaires.
Don't Nod, fondé en 2008 à Paris par des passionnés de la narration, dont l'écrivain Alain Damasio, à l'origine de La Horde du Contrevent, a su se faire une solide place sur consoles comme sur PC avec les années.
Leur premier projet voit le jour en juin 2013 aux côtés de l'éditeur japonais Capcom. Il s'agit de Remember Me, qui se présente comme un jeu d'action-aventure où l'on incarne une jeune femme évoluant dans un Paris futuriste. Mais la sortie du titre, en pleine convention de l'E3, l'un des plus grands salons du jeu vidéo d'alors, l'empêche de connaître le succès, et donc de connaître une suite.
Le carton Life is Strange
Les difficultés commencent alors dès l'année suivante, en 2014, lorsque Don't Nod est placé en redressement judiciaire.
Mais ces nuages très sombres n'empêchent pas le studio de se relever quelques mois plus tard lorsqu'il dévoile, cette fois-ci avec Square Enix, Life is Strange. Ce jeu narratif et épisodique, qui nous plonge dans la peau d'une jeune adolescente qui a le pouvoir de remonter le temps, connaît un énorme succès. La communauté va s'emparer de la licence, qui vient justement de connaître un nouvel opus, sorti en accès anticipé le 14 octobre.
Don't Nod, studio d'abord parisien, va néanmoins voir plus grand et s'étendre considérablement. Deux grandes équipes vont toutefois se distinguer: celle dédiée aux jeux narratifs comme Life is Strange, et celle qui s'occupera des grosses productions du studio. C'est aussi en 2020 que Don't Nod Montréal ouvre ses portes avec comme ambition de proposer un jeu narratif qui sortira en 2025, Lost Records: Bloom & Rage.
Pendant que Square Enix continue de développer la franchise Life is Strange avec un spin-off confié au studio Deck Nine Games, Don't Nod va de son côté se mettre en ordre de marche pour proposer Vampyr, un jeu d'action de grande envergure pour l'éditeur Focus Entertainment (devenu PulluP Entertainment).
Si Vampyr connaît un certain succès critique, la force de Don't Nod reste néanmoins la manière dont le studio raconte les histoires. Il n'est donc guère étonnant de voir débarquer en l'espace de trois ans Life is Strange 2, Twin Mirror, ou encore Tell Me Why, un jeu dans lequel on incarne un frère et une soeur, avec comme thématique le changement d'identité.
Des succès critiques... pas commerciaux
En parallèle, Don't Nod veut aussi développer des petits jeux et propose notamment Jusant, où l'objectif est de gravir une montagne. Un titre contemplatif qui va s'attirer les faveurs de la presse sans connaître le succès commercial. Quelques mois plus tard, en février 2024, c'est Banishers: Ghost of New Eden, suite spirituelle de Vampyr pour Pullup Entertainment, qui voit le jour, mais qui subi là aussi le désintérêt des joueurs malgré ses qualités.
Deux échecs à la suite qui provoquent une crise interne. Au début de l'année 2024, les représentants syndicaux alertent sur des conditions de travail dégradées.
L'annonce du rachat ne surprend personne: le 24 septembre, le studio annonçait se recentrer sur des projets plus porteurs, et mettait "temporairement en pause" deux jeux en développement. Objectif: rassurer les investisseurs alors que son chiffre d'affaires a fondu de 30% sur un an, pour s'établir à 1,871 million d'euros.
Ce 16 octobre 2024, Don't Nod a annoncé des "résultats fortement négatifs" et s'apprête donc à réaliser un plan de restructuration: "les premières mesures en soutien de la performance, annoncées au printemps dernier, n'apparaissent pas suffisantes pour préserver la compétitivité de la société. Nous avons donc présenté ce jour aux instances représentatives du personnel un projet de réorganisation qui pourrait amener Don't Nod sur une nouvelle trajectoire de développement," explique Oskar Guilbert, PDG de Don't Nod, qui parle ainsi d'une période "complexe".