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"J'y ai beaucoup appris": ce que les agriculteurs pensent du jeu Farming Simulator

Un joueur de Farming Simulator 22 sur le stand de l'exposant Giants Software lors de la Gamescom 2023.

Un joueur de Farming Simulator 22 sur le stand de l'exposant Giants Software lors de la Gamescom 2023. - Giants Software

Le célèbre jeu de simulation agricole suscite, aussi, l'intérêt de "vrais" exploitants agricoles. Mais alors est-il si "réaliste" et "intuitif"? Trois créateurs de contenu ont répondu à Tech&Co.

Entre la "vraie vie" et le jeu vidéo, il n'y a qu'un pas. Là est tout l'objectif d'une franchise basée autour de la simulation agricole. Édité depuis 2008 par Giants Software, Farming Simulator continue de passionner les joueurs à chaque nouvelle édition et notamment ceux qui n'ont "pas forcément la chance de conduire des gros tracteurs", plaisante Bastien Couture, créateur de contenu dans le secteur agricole.

C'est sous l'alias de "Stervio" que le jeune homme de 23 ans partage, sur Youtube principalement, des vidéos. Un mélange habile de vlogs sur son quotidien dans la ferme familiale et d'épisodes sur Farming Simulator où le but est de gérer virtuellement une exploitation.

Du haut de ses 438.000 abonnés sur sa chaîne principale, il est le vidéaste le plus suivi de la sphère agricole française et cumule plus de 143 millions de vues sur la plateforme. C'est sur Farming Simulator que "tout à commencé".

"Cela fait bientôt six ans que je suis sur Youtube. Farming Simulator m'a appris les bases. C’est un bon jeu pour les gens qui sont passionnés, un bon apprentissage pour comprendre les mécanismes liés au monde de l’agriculture", détaille Stervio.

"Si tu tapes une barrière..."

Le constat est le même pour Dylan Beddes, aussi connu sous le nom de ZyRO sur Youtube. Diplômé du Lycée agricole de Chateauroux, le vidéaste de 24 ans avoue avoir partagé son apprentissage entre la "vraie vie et le jeu". "Quand je rentrais du lycée, je jouais le soir à Farming Simulator. J'y ai beaucoup appris."

"Quand tu es dans un tracteur pour de vrai, tu te dis 'bon je l’ai fait dans le jeu'. Le but, alors, c'est simplement de reproduire les tâches. Au final ça m’a beaucoup aidé. Ce que je n’arrivais pas à faire et ce que je ne faisais pas au lycée, j’essayais de le reproduire sur Farming Simulator", détaille ce fan de la franchise, à laquelle il joue depuis 2011.

Lors de son apprentissage, les "tâches faciles" étaient effectuées dans la "vraie vie", pendant les stages. Et les missions plus délicates, dans le jeu vidéo. "Farming Simulator donne une seconde chance. Alors qu'en vrai, l'erreur n'est pas permise. Si tu tapes une barrière dans le jeu, tu rigoles. Tandis que si cela arrive dans la ferme, les dégâts sont matériels, c'est plus embêtant", poursuit le vidéaste aux 81.000 abonnés.

"Le jeu ne fait pas tout"

"Farming Simulator est surtout utile pour apprendre les grandes lignes du monde agricole", renchérit Bastien Couture. Le module "Saisons" - qui permet de connaître le calendrier des semences et des récoltes, calqué sur la "vraie vie" - ou encore les différentes étapes pour nourrir un cheptel de vache... Tout est pensé pour se rapprocher, au plus près, du quotidien d'un agriculteur.

"Il y a, quand même, une grosse différence au niveau de la complexité que demande l'entretien quotidien d'une ferme", avoue Dylan Beddes qui "quand le temps (lui) permet" réalise des tâches dans la ferme d'un ami, rencontré dans la Sarthe.

"La vie est plus exigeante que le jeu. On ne peut pas tout apprendre avec Farming Simulator, mais une petite partie. Derrière, il faut des connaissances, des études, de l’expérience. Le jeu ne fait pas tout", expose-t-il.

Des connaissances, Bastien Couture en a, mais cela n'était "pas suffisant" selon lui. Dans sa petite exploitation familiale, pas loin de Cahors dans le Sud-Ouest, il doit reprendre le flambeau de la ferme avec sa sœur jumelle, alors que son père part à la retraite en fin d'année. "Je vais passer un Brevet Professionnel Responsable d'Entreprise Agricole (BPREA) pendant un an, avant de rejoindre officiellement ma sœur dans l'exploitation."

"Un bon tremplin"

Ce BPREA, qui prépare et forme à l'installation dans une ferme vous est directement attribué dans Farming Simulator. "C'est pour cela que selon les gens qui connaissent déjà la sphère agricole, Farming Simulator reste en superficiel", enseigne ce fils d'agriculteur, titulaire d'un Baccalauréat professionnel électronique.

Malgré l'enseignement superficiel de la licence sur les pratiques agricoles, Farming Simulator cumule plus de 30 millions de copies vendues depuis 2008 et dépasse les frontières de la ruralité. "Il y a plein de personnes qui auraient aimé travailler dans une ferme et Farming Simulator le permet", s'enthousiasme Alexandre Richard.

Sous l'alias "Alexandre de Prodealcenter", ce créateur de contenu, dont la chaîne Youtube dépasse les 70.000 abonnés, possède une exploitation agricole céréalière dans l'Indre. Et même s'il ne joue pas beaucoup à Farming Simulator - "par manque de temps - il est conscient que le jeu permet de "donner envie aux jeunes" de se lancer dans l'agriculture.

"Quand on voit la qualité d’images, du matériel, des cartes [...] C’est un truc de fou. On se croirait vraiment dans une exploitation agricole. Beaucoup de jeunes y jouent. Ils sont intéressés par le monde agricole et pourront peut-être y tenter une carrière. C’est un bon tremplin", conclut-il.

En février 2024, le dernier volet de la licence (Farming Simulator 22) a dépassé les six millions d’exemplaires, y compris les éditions Platinum et Premium. Depuis son lancement, en novembre 2021, plus de 5.600 modules ont été ajoutés à la version originale du jeu. Un record.

Willem Gay