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Élection américaine 2024: les machines à voter de nouveau au coeur des théories complotistes sur la "fraude électorale"

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Sur les réseaux sociaux, de nombreux théoriciens du complot cherchent à montrer que les machines à voter détournent les votes en faveur de Kamala Harris et récoltent des millions de vues.

Le jour du scrutin est enfin arrivé. Les bureaux sont ouverts depuis quelques heures et des milliers d'Américains se dirigent d'ores et déjà vers les urnes. Et les premiers problèmes techniques se font déjà ressentir.

Sur les réseaux sociaux, de nombreux internautes mentionnent des incidents avec les machines à voter, ces outils permettant aux électeurs de certains Etats américains d'utiliser un ordinateur pour confirmer électroniquement leur bulletin de vote.

Des incidents techniques qui relancent les théories

Dans le comté de Hamilton (New-York), une journaliste fait état de "problème technique avec les tablettes."

"Les bureaux de vote sont ouverts, mais le problème technique entraîne un retard dans le vote des gens. L'ensemble du comté est affecté", ajoute-t-elle, tout en précisant que 80 personnes attendent.

Un média local précise que les heures de vote dans le comté de Cambria (Pennsylvanie) vont être prolongées "suite à des pannes de machines à voter, selon une décision de justice".

Des incidents techniques qui relancent les théories du complot autour des machines à vote du fabricant Dominion Voting Systems. En effet, selon de nombreux internautes, ces outils serviraient en réalité à orchestrer une fraude électorale de grande ampleur.

Rien d'étonnant puisqu'à chaque scrutin aux Etats-Unis, des théories accusent les machines de modifier les votes électroniques pour favoriser le camp démocrate et donc, de tricher. En 2020, c'est Donald Trump qui a lui-même colporté ces rumeurs après sa défaite contre l'actuel président Joe Biden, accusant l'entreprise d'avoir permis une fraude contre lui.

Des machines qui modifient les votes

Et cette année, des rumeurs similaires circulent sur les réseaux sociaux. Une machine qui changerait le nom de Trump pour "Triump" et qui, de ce fait, invaliderait le bulletin, une autre qui changerait tous les votes pour le nom de Kamala Harris... La liste des théories sur les réseaux sociaux est longue.

De nombreux utilisateurs incitent ainsi les votants à "bien vérifier" leurs bulletins, après avoir voté via ces machines ces derniers jours. "Je ne crois pas une seconde que près de la moitié du pays vote pour Kamala Harris, peut-être 25 à 30 %, maximum", lance l'un d'entre eux sur X, ex Twitter.

"Le reste est fabriqué par des machines Dominion Smartmatic, des votes inversés et des bulletins de vote par correspondance où il n'y a aucune chaîne de traçabilité, signatures ou dates", poursuit-il dans un message visionné plus de 700.000 fois.

Un Américain prétend de son côté qu'au moins deux électeurs de Tarrant Country (Texas) auraient voté pour Donald Trump via une machine, et auraient vu leurs bulletins modifiés en faveur de Kamala Harris. "Ce ne sont pas seulement les machines Dominion qui sont corrompues. TOUTES les machines à voter sont intrinsèquement mauvaises", avance-t-il, dans un message visionné plus de 8 millions de fois.

Un autre utilisateur entend de son côté "alerter" les votants en expliquant, vidéo à l'appui d'une interview de Patrick Byrne, homme d'affaires et théoricien du complot célèbre, "comment les machines Domion ont truqué les élections au Michigan".

Certains théoriciens sont même allés jusqu'à ressortir une fausse interview d'Eric Commer, ancien directeur de la stratégie produit et de la sécurité de Dominion, alléguant qu'il avait truqué les élections en 2020 pour "s'assurer que Trump n'allait pas gagner les élections". L'ancien employé de Dominion a depuis intenté de nombreuses actions en justice pour diffamation.

Mais cette fois-ci, certains complotistes se montrent un peu plus malins. En effet, en 2023, la chaîne Fox News a dû verser près de 800 millions de dollars de dédommagement à l'entreprise Dominion après avoir menti au sujet de prétendues manipulations des machines à voter lors de l'élection de 2020.

Pour éviter de payer une telle somme, et surtout d'être attaqué en diffamation, certains, comme Elon Musk, assurent donc leurs arrières. Le milliardaire a ainsi relayé, le 30 octobre dernier, une vidéo évoquant des problèmes techniques des machines à voter du fabricant Dominion. En légende, un simple commentaire: "que se passe-t-il Dominion?", sous-entendant qu'il pourrait s'agir d'une fraude.

De nombreuses précautions

Ces fausses informations sont généralement relayées par des complotistes, des militants d'extrême droite et même... des personnalités politiques américaines. Ainsi, l’élue républicaine Marjorie Taylor Green a écrit sur son compte X qu'il s'agit "exactement des mêmes genres de fraude que nous avons vu en 2020" et que cela "ne peut être toléré". Un message visionné plus de 3,5 millions de fois.

Ces propos, comme de nombreuses autres théories du complot concernant ces machines de vote, ont depuis été démentis. "Il n’existe aucune preuve crédible que les machines à voter Dominion intervertissent les votes dans le comté de Whitfield", rappelle NewsGuard, spécialisé dans le suivi de la désinformation en ligne.

Pour faire face à ces nombreuses fake news, la majorité des entreprises mettant à disposition les machines à voter ont pourtant mis en place une batterie d'outils pour garantir la fiabilité de leurs dispositifs. Au programme: des tests pour valider la fiabilité des machines, aucune connexion nécessaire pour utiliser les tablettes, et installation de vidéo-surveillance. Une volonté de rassurer les sceptiques, donc... qui semble faire mouche.

Salomé Ferraris