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Des audiences en chute libre: Facebook accusé d'avoir censuré des médias palestiniens

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Depuis l'attaque du Hamas du 7 octobre 2023 qui a fait plus de 1200 morts en Israël, Meta a pris des mesures qui ont eu un impact sur les médias palestiniens.

Les "mesures temporaires" prises par Meta, propriétaire de Facebook et d'Instagram, ont mis un coup d'arrêt aux développements de médias palestiniens, révèle une enquête de la BBC. Le groupe audiovisuel public anglais fait en effet état d'un "engagement" (qui définit la portée des publications) en sensible baisse sur une vingtaine de pages Facebook.

Le média Palestine TV a ainsi vu son nombre de vues plonger de 60 % peu après le 7 octobre 2023, date de l'attaque terroriste du Hamas contre Israël, et ce, malgré ses 5,8 millions d'abonnés. L'agence Wafa et Al-Watan News ont vu, de leur côté, leur propre engagement baisser de 77 %.

Du contenu arabe et israélien largement mis en avant

À l'inverse, les médias israéliens et arabophones (non palestiniens) ont gagné en popularité, notamment Yediot Ahronot, Al-Jazeera et Sky News Arabia, qui ont vu leur engagement presque doubler, alors même que leurs pages ont elles aussi publié des contenus liés à l'attaque ou à la guerre au Moyen-Orient.

Pour son enquête, la BBC a compilé les données d'engagement des pages Facebook avant et après l'attaque du Hamas.

"Les interactions ont été complètement restreintes et nos publications ont cessé d'atteindre les gens," a expliqué Tariq Ziad, journaliste chez Palestine TV, à la BBC.

Contacté par le média britannique, Meta a précisé n'avoir "jamais caché" avoir pris des mesures "temporaires" après l'attaque d'octobre 2023. Mais il s'agissait, selon le groupe, d'un moyen de "lutter contre la haine en ligne".

Auprès de Tech&Co, Meta nie en revanche une volonté de "censurer" les médias palestiniens: "Nous reconnaissons que nous faisons des erreurs, mais toute affirmation selon laquelle nous supprimons délibérément un point de vue particulier est fausse," a précisé l'entreprise.

Le groupe explique en outre la difficulté d'agir de manière "équilibrée", "particulièrement lors de conflits intenses, très polarisés et qui évoluent rapidement." Les règles d'utilisation exceptionnelles mises en place après le 7 octobre auraient cependant été supprimées depuis, assure Meta.

Une modération "agressive" contre le peuple palestinien

Mais la BBC a pu s'entretenir avec cinq anciens et actuels employés de Meta, qui ont dévoilé l'impact des mesures prises par la société dirigée par Mark Zuckerberg contre les utilisateurs palestiniens.

Grâce à des documents internes, on découvre que l'algorithme d'Instagram a durci sa politique de modération contre eux. "Dans la semaine qui a suivi l'attaque du Hamas, l'algorithme a été modifié, ce qui l'a rendu plus agressif envers le peuple palestinien" explique l'un d'entre eux.

En interne, cette modification a été déplorée, certains salariés y voyant "un nouveau biais dans le système". Mais cela n'aurait rien changé.

Comme l'explique la BBC, la guerre entre Israël et le Hamas mène également à la censure d'informations "trop explicites" et donc trop violentes aux yeux de la modération de Meta: "Si l'armée (israélienne) commet un massacre et que nous le filmons, la vidéo ne se propagera pas," déplore un photojournaliste présent dans le nord de Gaza, Omar el Qataa.

Sylvain Trinel