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INFO TECH&CO. "La France, une nation visionnaire": le patron de Nvidia se confie à Tech&Co

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De passage à Paris pour une conférence et des événements, le patron de Nvidia, Jensen Huang se confie à Tech&Co en exclusivité.

C'est la star de Vivatech, et pour cause: le patron de Nvidia, Jensen Huang, est l'un des dirigeants les plus puissants de la planète depuis que son entreprise a fait le pari de l'intelligence artificielle. A la tête des puces les plus utilisées dans les centres de données, il a multiplié les annonces durant le salon parisien dédié aux nouvelles technologies.

Parmi elles, un partenariat avec la startup française Mistral AI, pour la création d'un "cloud" souverain européen, notamment pour mieux protéger les données du vieux continent.

Rare dans les médias, et tout autant en France, Jensen Huang a accordé à Tech&Co une interview exclusive.

· Un pionnier de l'IA dès le début des années 2010

Si on connaît Nvidia pour ses cartes graphiques dans le domaine grand public, on se souvient assez peu que l'entreprise a été l'une des premières à prendre au sérieux la question de l'intelligence artificielle. Moqué sur scène, le patron, qui n'était pas encore à la tête de l'une des premières capitalisation boursière, a tenu tête:

"Je me suis rendu compte à l'époque que les algorithmes de deep learning étaient très intéressants et le porter à grande échelle nous permettraient d'aller chercher des capacités importantes," explique Jensen Huang. "Nous nous sommes demandé comment l'IA pouvait changer la fonction logiciel et l'informatique, et pas à pas, nous nous sommes rendu compte qu'il fallait réinventer l'ordinateur, une première en 60 ans."

· L'IA, un bouleversement pour tout le monde

"Tous les secteurs sont bouleversés, touchés, chaque couche de la pile informatique a été réinventée et transformée, un nouveau secteur émerge," explique le dirigeant, qui voit l'IA comme une nouvelle "révolution industrielle".

Jensen Huang explique avoir comme projet "d'automatiser l'intelligence" car elle serait utile "pour toutes les activités," notamment l'éducation, la santé et la défense. "Nvidia en a les capacités," affirme-t-il, rappelant que "l'intelligence c'est avant tout comprendre l'information."

Pour lui, il n'y a "aucune raison" pour que les technologies n'en soient pas capables.

· Un partenariat avec Mistral AI qui pourrait faire date

Célébré par Emmanuel Macron, le partenariat entre Mistral AI et Nvidia est une "idée excellente", selon Jensen Huang.

Car grâce aux puces de son entreprise, Mistral AI sera en mesure de proposer une suite de logiciels et de fonctionnalités directement disponibles sur le cloud: "Mistral peut être un fleuron européen, ils en sont capables."

Pour autant, si la France est une nation "très avancée" grâce à sa culture de la tech, elle doit aussi composer avec les entreprises américaines, explique-t-il.

· L'IA robotique, l'étape d'après

Avec l'IA "agentique" qui commence petit à petit à faire son trou dans les industries de tous les secteurs, Nvidia pense que l'étape suivante sera celle de l'IA robotique: "La prochaine génération d'IA va être porteuse d'innovations."

Pour son dirigeant, c'est même une évidence que les robots peupleront un jour les habitations du monde entier: "Nous devrions tous avoir un robot R2D2 dans notre maison si on le souhaite. Je pense que les robots seront dans les foyers et les usines du monde entier d'ici la fin de la décennie."

· L'informatique quantique, le prochain défi de Nvidia

Encore loin d'être quelque chose de concret, l'informatique quantique, qui est considérée par beaucoup comme la prochaine révolution de l'informatique, est néanmoins dans tous les esprits, et notamment ceux des responsables de Nvidia.

De l'aveu de Jensen Huang, c'est toutefois un sujet "épineux": "Il y a eu de récentes avancées en matière d'informatique enrichies par des puces quantiques, ce qui va permettre de développer l'informatique quantique et ses applications sur le temps long."

Si la technologie quantique est vieille de plusieurs dizaines d'années, il a fallu autant de temps pour concevoir quelque chose de réaliste à l'échelle industrielle. Mais Jensen Huang est persuadé que ces nouvelles technologies arriveront un jour entre les mains du grand public: "Mais on ne va pas réinventer la roue," prévient-il.

· Nvidia face au bannissement chinois

Marché particulièrement important et qui arrive à devenir aussi performant que les Etats-Unis dans l'IA, la Chine ne peut plus compter sur Nvidia après la décision de Donald Trump de ne plus permettre à l'entreprise d'y distribuer ses puces, y compris les moins puissantes.

"C'est le deuxième marché du monde pour l'informatique, et nous avons l'interdiction de vendre nos puces en Chine, ce qui nous a fait perdre environ 30 milliards de dollars," explique Jensen Huang, alors même que la super puissance asiatique y forme 50% de des chercheurs IA du monde.

S'il veut que la technologie américaine "gagne", le patron de Nvidia plaide néanmoins pour une fin des interdictions, citant des difficultés à venir sur la 6G: "La 6G sera basée sur l'IA, et si nous ne diffusons pas la technologie américaine, la 6G sera fondée sur autre chose."

· L'IA et la consommation d'énergie

Sur la question de la consommation d'énergie par l'intelligence artificielle générative, Jensen Huang plaide pour "penser de deux manières": "L'objectif n'est pas d'entraîner l'IA, qui est très énergivore, mais de l'utiliser. Tout est optimisé par l'IA, l'efficacité énergétique de l'IA est excellente. Mais il faut penser sur le temps long."

Pour Jensen Huang, les pays qui décideront de rejoindre la "révolution" IA permettront de l'optimiser davantage en matière de consommation énergétique: "L'IA peut nous aider à découvrir de nouvelles manières dont on va économiser de l'énergie dans tous les domaines."

Il cite également la France en exemple grâce à son parc énergétique composé du nucléaire en majeure partie: "Elle a été visionnaire en reconnaissant l'énergie nucléaire, en investissant, et c'est une source d'énergie importante."

Sylvain Trinel