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Benjamin Brière détenu en Iran: sa sœur Blandine le dit "désespéré" après plus de deux ans de prison

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Invitée sur le plateau de BFM Lyon, la jeune femme est revenue ce mardi sur les conditions de détention du trentenaire, condamné en appel à huit ans de prison pour espionnage et propagande contre le régime.

Sa vie a basculé il y a 861 jours. Ce 26 mai 2020, Benjamin Brière est interpellé par les forces de police iraniennes et placé en détention provisoire en attendant son procès. Il n'a depuis pas quitté sa geôle, malgré ses multiples dénégations, malgré 35 jours de grève de la faim et malgré les appels à l'aide de sa sœur, Blandine, qui mène le combat depuis le Rhône, où elle vit.

Celui qui avait entamé un tour du pays en touriste, au volant de son van, est accusé d'avoir pris des photos de zones interdites dans un parc naturel avec son drone, et d'avoir affiché son opposition au port du voile obligatoire sur les réseaux sociaux. Fin janvier, il a écopé d'une peine de huit mois de prison, confirmée en appel au mois de juin.

Benjamin Brière
Benjamin Brière © AFP PHOTO / Saeid Dehghan's Twitter account

Des coups de téléphone toutes les trois semaines

"Il ne cache plus le désarroi dans lequel il est. Il n'en peut plus en fait, il est complètement désespéré. On voit que tout est bloqué et que rien n'avance", se désole Blandine Brière, invitée ce mardi de la matinale de BFM Lyon.

La jeune femme échange avec Benjamin, 37 ans aujourd'hui, soit par l'intermédiaire de courriers transmis par le consul, soit via des appels téléphoniques environ toutes les trois semaines.

Si ces derniers sont "enregistrés", et que le trentenaire n'est donc "pas libre de dire tout ce qu'il veut", Blandine ne croit pas qu'il soit victime de sévices physiques. En revanche, "la tension psychologique" est constante, il vit dans des "dortoirs surpeuplés" où personne ne parle sa langue, dans une "insalubrité totale", et subit "des fouilles un peu trop insistantes".

Aussi bien pour Benjamin que pour ses proches, le plus complexe à gérer reste de n'avoir "aucune date à laquelle s'accrocher". "On n'a rien qui nous donne de l'espoir", fustige Blandine Brière.

"On n'a rien de tangible"

Dans cette affaire, les négociations entre le Quai d'Orsay et son équivalent iranien n'ont pas connu d'évolutions positives récentes, cela même si Catherine Colonna, ministre des Affaires étrangères, avait qualifié d'"inacceptable" la condamnation en appel infligée à Benjamin Brière.

"Ils font ce qu'ils peuvent diplomatiquement parlant", dit la jeune femme d'un air désabusé.

De l'avis de Blandine Brière, il est évident que son frère est "un otage" du régime iranien, condamné après "une parodie de procès". "On est sur une monnaie d'échange, sur un levier", insiste-t-elle.

Une dizaine d'Européens emprisonnés

Comme Benjamin Brière, une dizaine d'autres ressortissants Européens sont actuellement derrière les barreaux sur le sol iranien, dont trois Français.

Fariba Adelkhah, titulaire de la double nationalité, a été condamnée en mai 2020 à cinq ans de prison pour atteintes à la sécurité nationale. Elle est aux arrêts domiciliaires depuis octobre de cette année-là.

Deux autres Français ont eux été incarcérés en mai dernier, accusés par Téhéran d'être "entrés dans le pays dans le but de déclencher le chaos et déstabiliser la société" - des interpellations jugées "sans fondement" par Paris.

Avec plusieurs familles de détenus, Blandine Brière a pris la plume dernièrement pour adresser une lettre ouverte à Joseph Borrell, le vice-président de la Commission européenne, également Haut représentant de l'UE pour les Affaires étrangères et la politique de sécurité.

Dans cette missive, les auteurs pointent notamment l'inaction de l'Union, contrairement aux États-Unis, "qui faisaient de la libération de leurs otages une priorité", quitte à procéder à des échanges.

Un climat de tension

Malgré tout, Blandine Brière ne perd pas espoir et ne prévoit pas de se conformer à l'idée que son frère restera enfermé pendant huit ans. "Cette condamnation, ces charges, sont une vitrine", dit-elle, estimant "que ça se joue à un autre niveau, à un niveau qui nous dépasse, à un niveau diplomatique, à un niveau politique".

Le climat actuel en Iran ne devrait pas permettre un déblocage rapide de la situation de Benjamin Brière. Le pays est en proie à des vagues de contestation massives depuis la mort de Mahsa Amini, une jeune femme de 22 ans, morte en détention dans les locaux de la police des mœurs après une interpellation pour un voile mal porté.

Si ces événements sont sans lien avec les faits reprochés à son frère, Blandine Brière en est persuadée: "Benjamin sera le premier à se battre pour le droit des femmes et surtout des femmes iraniennes".

Florian Bouhot Journaliste BFM Régions