"Les stades sont là, mais où sont les hôpitaux?": alors que le Maroc construit le plus grand stade du monde, un mouvement de jeunes Marocains secoue le pays qui a 12% de chômage

"Les stades sont là, mais où sont les hôpitaux?". Ce slogan, devenu l'emblème du mouvement "Gen Z 212" traduit le sentiment d’injustice de cette génération Z marocaine. Le 212 étant l'indicatif téléphonique international du Maroc. Ces jeunes reprochent à leur pays de privilégier des actions symboliques au lieu d'investir sur le futur.
Au centre du débat, il y la construction et la rénovation de stades en vue de la Coupe du Monde de football, prévue en 2030: l'équivalent de près d’un milliard et demi d’euros seront investis dans des infrastructures sportives, dont la construction du futur plus grand stade du monde à Casablanca qui aura une capacité de 115.000 places.
Des projets majestueux qui contrastent cruement avec la réalité quotidienne des Marocains.
Un fait d'actualité en particulier a été l'étincelle de cet embrasement: la mort de huit femmes en quelques jours, décédées à l’hôpital d’Agadir pendant leur accouchement suite à des conditions sanitaires défaillantes, conséquence directe du manque de financement des structures hospitalières. Un contraste qui choque et qui soulève des questions essentielles sur l'utilisation de l'argent public. Pour les manifestants du mouvement "Gen Z 212", il est inconcevable de trouver des ressources pour la Coupe du Monde de football et pas pour les infrastructures sanitaires.
Une jeunesse sacrifiée qui paye le prix fort du chômage
Au-delà de la question sanitaire, le mouvement dénonce désormais plus largement des problèmes structurels profonds. Les jeunes perçoivent une injustice générationnelle: le Maroc n’investit pas suffisamment dans son avenir, incarné par sa jeunesse. Le déficit de financement des écoles, les classes surpeuplées, l’insuffisance du corps enseignant et une université déconnectée des besoins du marché du travail contribuent à un taux de chômage alarmant. Celui-ci atteint 12% dans l’ensemble de la population, mais grimpe jusqu’à 35% chez les moins de 35 ans. La situation ne change pas même pour les jeunes les plus éduqués: le chômage reste à 19% chez les jeunes diplômés.
Un cocktail explosif pour la stabilité économique et sociale
Le véritable danger réside dans le risque d’une explosion sociale, avec des conséquences potentiellement graves sur la stabilité économique du pays. Selon un rapport de l’agence S&P, les pays émergents, dont la population est souvent très jeune et hyperconnectée, lorsqu'ils sont confrontés à une conjoncture économique défavorable, avec une croissance qui ralentit et un monde du travail en mutation, se trouvent face au cocktail parfait pour une colère sociale très forte, qui se traduit en instabilité politique et économique.
Le défi pour les autorités marocaines est donc double : apaiser la colère sociale tout en apportant des réponses structurelles crédibles et durables pour offrir un avenir stable et prospère à la jeunesse.