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L Edito de Raphael Legendre

EDITO. HLM: l'indispensable remue-méninges

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L'EDITO DE RAPHAËL LEGENDRE. L’Assemblée nationale examine aujourd’hui une proposition de loi décriée par les organismes HLM du député Ensemble pour la République et ancien ministre du Logement, Guillaume Kasbarian, qui vise à mettre un terme au logement social à vie.

Le taux de rotation des logements sociaux est tombé ces dernières années à 7% contre 10% entre 2005 et 2015. De moins en moins de logements sont attribués chaque année et pour contrer cette dynamique délétère, l'ancien ministre du Logement, Guillaume Kasbarian, porte à l'Assemblée nationale une proposition de loi pour resserrer les critères pour sortir les locataires du parc social.

Pour faire court, on baisse les conditions de revenus, et si vous héritez, vous partez. Cela peut paraître un peu brutal à première vue - le monde du logement social est vent debout contre le texte - c’est pourtant totalement justifié.

Saviez-vous qu’en trente ans, la part des jeunes (moins de 40 ans), c'est-à-dire ceux qui ont les moyens les plus modestes et devraient être les plus aidés, a été divisée par deux dans le parc social. Ils ne représentent plus que 25% des locataires. Les plus de 40 sont les trois-quarts.

Trois millions de personnes en attente d'un logement social

Cette évolution veut dire une chose: une fois qu’on a trouvé un logement HLM, on y reste. Et on y reste parce que les conditions de ressources pour occuper le logement social en France sont délirantes. Les trois quarts des Français sont éligibles.

Pour une famille de quatre à Paris, il faut être à quasiment 10 000 euros / mois pour qu’on vous demande de libérer l’appartement. Et encore, vous avez deux ans pour le faire.

Résultat: près de trois millions de personnes sont aujourd'hui en attente d’un logement social en France et seulement 13% des dossiers aboutissent dans les zones tendues comme l’Ile-de-France.

Le but d’une politique sociale, c’est d’en sortir, pas d’être un privilège à vie. Tout le monde s’accorde pour dire que les locataires HLM n’ont pas vocation à occuper indéfiniment leur logement. Ca ne devrait être qu’un moment du parcours résidentiel.

Il faut accélérer la rotation du parc social, qui n’a cessé de s’affaiblir et devient même totalement marginale dans les métropoles. C’est tout l’objet de la proposition de loi de Guillaume Kasbarian. Sauf que dans certaines métropoles, les loyers sont devenus très élevés, y compris pour les classes moyennes ...

C'est vrai qu’à Paris par exemple, le niveau de vie de certains occupants ne leur permet pas d’aller dans le parc libre qui a beaucoup augmenté. C’est d’ailleurs pour cela que l’on a créé le logement intermédiaire.

Mais il ne faut pas se mentir. Pour d’autres qui auraient les moyens de sortir, le montant des loyers HLM représente une telle aubaine qu’ils n’ont pas intérêt à sortir.

Alors oui, on a mis en place un dispositif dit de "sur-loyer" pour combattre ce phénomène. Mais dans les faits, ni les organismes HLM ni les élus ne l’appliquent de manière suffisamment dissuasive. Car ces locataires sont ceux qui payent et aussi une clientèle qui vote.

Donc, les locataires restent, quitte à payer un peu plus.

Ce texte a-t-il une chance de passer? Probablement pas, car les élus ne voudront pas assumer le fait de "déloger" certains de leurs administrés. Ce serait pourtant une forme de justice sociale.

Raphaël Legendre