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Un an après, bis repetita: Servier veut céder Biogaran à un fonds d'investissement

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BC Partners avait déjà tenté sa chance, avant que son offre ne soit jugée trop faible. Servier pourrait obtenir 800 millions d'euros, la somme exigée l'année dernière.

Moins d'un an après avoir dû stoper la vente de sa filiale génériques Biogaran, Servier veut remettre le couvert. Le groupe pharmaceutique est entré en discussions exclusives avec un fonds européen d'origine britannique, BC Partners - déjà impliqué en 2024.

"Les conditions de la transaction demeurent confidentielles", ont indiqué ce mercredi les deux entreprises dans un communiqué commun. Mais, selon une source proche du dossier, le montant de l'offre de BC Partners est compris "entre 800 millions et un milliard d'euros" pour le rachat de la plus grosse marque de génériques en France.

Un montant identique circulait l'an dernier, quand BC Partners avait déposé une offre aux côtés de la banque publique d'investissement Bpifrance pour racheter Biogaran, face à deux candidats indiens Torrent Pharmaceuticals et Aurobindo Pharma. A un détail près : ce montant n'était pas offert par BC - qui souhaitait miser 600 millions avec la BPI - mais par le groupe indien Aurobindo.

Or la perspective d'une mise en vente de Biogaran, qui détient plus de 30% des parts de marchés sur le segment des génériques vendus en officine en France, s'était vite heurtée aux inquiétudes de la classe politique. Face à un potentiel risque de délocalisation, les appels à préserver la souveraineté sanitaire s'étaient mutlipliés sur fond de pénuries récurrentes de génériques en Europe et en France.

L'ancien ministre de l'Economie Roland Lescure s'était opposé à une opération avec Aurobindo. Et l'offre de BC Partners - Bpifrance s'était rapidement rapidement avérée insuffisante.

"Nous avons énormément pesé dans ce dossier, expliquait alorsune source proche de Bercy. Nous étions opposés à cette opération et avons imposé des conditions strictes pour le maintien de l’emploi et l’approvisionnement de médicaments en France."

Servier avait jeté l'éponge

Servier, deuxième laboratoire pharmaceutique français, avait alors décidé en septembre de "mettre fin aux discussions avec les acteurs concernés" et suspendu le projet de cession, considérant que l'opération envisagée ne répondait pas à ses attentes en termes de "création de valeur". Pas de quoi décourager BC Partners qui revient à la charge moins d'un an plus tard, mais cette fois seul.

Le fonds, qui a un bureau à Paris depuis 1986 et un patron français, avait accepté lors de sa première tentative un certain nombre de conditions posées par le gouvernement, comme le maintien en France du siège social et d'une grande majorité de la production de médicaments. Ces modalités restent intactes, selon une source proche du dossier.

"Le gouvernement sera attentif au maintien de la sécurité d'approvisionnement du marché français et de l'empreinte industrielle en France pour les médicaments commercialisés par Biogaran, dans une optique de préservation de notre souveraineté sanitaire", a réagi le ministère de l'Industrie.
Les Experts : Bercy doit-il bloquer la vente de Biogaran ? - 19/04
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"Potentiel de croissance"

"BC Partners entend continuer de renforcer la position de Biogaran en tant que fournisseur clé de produits pharmaceutiques sur le marché français et accélérer son potentiel de croissance sur de nouveaux segments", selon le communiqué.

Le fonds pan-européen voit dans le développement des génériques, des biosimilaires (copies moins chères des médicaments biologiques, produits à partir de cellules ou d'organismes vivants) et de la vente des médicaments sans ordonnance des axes de croissance pour Biogaran et "des nouveaux leviers majeurs de réduction des coûts pour le système de santé français".

BC Partners fait valoir aussi son expertise dans le secteur des génériques avec des investissements dans le fabricant grec Pharmathen et le Néerlandais Synthon.

"Ce projet serait en parfaite adéquation avec les orientations stratégiques de Biogaran et de Servier", a déclaré son président Olivier Laureau.

Le fruit de cette opération devrait, selon lui, permettre à Servier "d'accélérer sa focalisation, notamment dans les traitements innovants en oncologie et en neurologie et de poursuivre sa création de valeur en France".

Créée par Servier il y a plus de 25 ans, Biogaran compte environ 240 salariés mais pèse surtout via ses 39 sous-traitants en France fabriquant la moitié de son portefeuille de médicaments, qui "couvre aujourd'hui l'ensemble des domaines thérapeutiques, des pathologies du quotidien à celles les plus lourdes (des antibiotiques aux antidiabétiques et anticancéreux)" et représentent 8.600 emplois.

Selon le rapport annuel 2023 de Servier, Biogaran représente moins d'un quart de son chiffre d'affaires, de 5,9 milliards d'euros sur le dernier exercice.

VG avec AFP