La Bolivie serait au bord du défaut de paiement selon son président, ce qui serait une première depuis 1984

Les partisans de l'ancien président bolivien Evo Morales participant à une marche d'El Alto à La Paz, le 16 mai 2025 (photo d'illustration). - AIZAR RALDES / AFP
La Bolivie, en manque de devises étrangères et qui traverse une profonde crise économique entraînant de violents mouvements sociaux, risque le défaut de paiement si elle n'obtient pas de nouveaux financements, a averti le président Luis Arce lors d'un entretien avec l'AFP.
"Nous essayons de ne pas nous retrouver en défaut de paiement. Nous avons l'intention de payer notre dette, mais si nous n'avons pas les ressources nécessaires?", s'interroge le président de gauche interviewé mercredi dans un bureau du palais présidentiel à La Paz.
La crise s'est aggravée dernièrement avec le blocage de routes par les partisans de l'ancien président Evo Morales (2006-2019) qui réclament la démission du président Arce. Ils le tiennent pour responsable du marasme et l'accusent d'avoir écarté leur leader de la présidentielle du 17 août prochain. Luis Arce, qui ne sera pas candidat à sa réélection, pointe la responsabilité des parlementaires de l'opposition de droite et des soutiens à Evo Morales, qui, unis, empêchent selon lui le gouvernement d'accéder à de nouveaux financements internationaux.
37,2% des revenus nationaux
À ce jour, 1,8 milliard de dollars de demandes de financement international restent en suspens, en attente d'examen par les législateurs. D'ici à décembre, le pays doit disposer de jusqu'à 2,6 milliards de dollars pour couvrir ses besoins en importations de carburants et honorer ses obligations en matière de dette extérieure.
"Nous faisons la pire affaire possible en tant que pays. Car lorsqu'on a une dette extérieure, on rembourse le capital et les intérêts" et cette sortie de dollars "est normalement compensée par l'arrivée de nouveaux décaissements" issus de nouveaux emprunts, ce qui n'est pas le cas actuellement, a souligné Luis Arce.
La dette du pays andin représente 37,2% de ses revenus nationaux bruts, selon la Banque mondiale. Ses principaux créanciers sont la Banque interaméricaine de développement (BID), la Banque de développement d'Amérique latine et des Caraïbes (CAF), la Banque mondiale et la Chine.
La dernière fois que la Bolivie n'a pas honoré le paiement de sa dette remonte à 1984, sous le gouvernement du président de gauche Hernán Siles Zuazo (1982-1985). La Bolivie est aussi accablée par une inflation de 18% sur un an, le taux le plus élevé en 17 ans, ainsi qu'une pénurie de carburants et de dollars.
Le pays andin a presque épuisé ses réserves de change pour soutenir sa politique de subventions aux combustibles, qu'elle importe au prix du marché international mais revend à perte.
Des blocages de routes
Le président Arce a pris ses fonctions en 2020, soutenu alors par Evo Morales. Il a triomphé dans les urnes avec 55% des voix. Mais la crise économique a ébranlé son image et aujourd'hui il est l'un des dirigeants les plus impopulaires d'Amérique du Sud. Seulement 9% des Boliviens approuvent sa gestion, selon le sondage Latinobarómetro de 2024. Le chef d'État rend son ancien allié Evo Morales responsable de la crise. Le leader cocalero a annoncé en 2023 son intention de revenir au pouvoir. Par la suite, il a dirigé des marches et soutenu des blocages de routes qui ont aggravé la crise.
La droite est désormais en tête des sondages d'intentions de vote pour la présidentielle d'août, portée par les candidatures de l'homme d'affaires Samuel Doria Medina et de l'ancien président Jorge Quiroga. "Si nous ouvrons la voie à la droite pour qu'elle remporte les prochaines élections d'août, c'est le peuple bolivien qui va souffrir, ce ne sera pas Evo Morales", a assuré Luis Arce.