L'Espagne a-t-elle trouvé la solution contre les délocalisations?

Rendez l’argent. C'est en somme le message envoyé aux patrons qui souhaiteraient quitter l'Espagne.
Le projet de loi du gouvernement sur "l'industrie et l'autonomie stratégique" a été approuvé en conseil des ministres. Selon le texte, destiné à protéger le tissu industriel, les entreprises ayant l’intention de partir devront l’annoncer au gouvernement au moins neuf mois à l’avance.
A partir de ce moment-là, "une table de négociation sera organisée pour réunir, aux côtés de l’entreprise, le ministère de l’Industrie, les syndicats et la région concernée", explique le ministre de l’industrie.
Une fois que toutes les voies de dialogue auront été épuisées, les entreprises qui ont perçu plus de 3 millions d’euros d'aides publiques et qui prévoient de "réduire leur production de plus de 65% ou leurs effectifs de 500 personnes ou plus" devront rembourser l'Etat.
Une mesure symbolique?
L’objectif c’est de faire revenir les patrons sur leurs décisions, de les faire réfléchir à deux fois. Mais l’efficacité du dispositif interroge quand on sait que quand une entreprise annonce son départ, c’est en général que les comptes ont été fait et qu’elle sait que ses résultats sont en jeu, voire sa viabilité.
Certains spécialistes, qui jugent la mesure symbolique, estiment tout de même qu’il existe bien des cas où un dialogue avec les autorités pourrait apporter des options alternatives.
Ces mesures étaient réclamées notamment par l’extrême gauche. Le parti Sumar, allié des socialistes au sein du gouvernement qui voulait des sanctions fortes en cas de départ. Le texte a fait l’objet d’âpres négociations. Le montant des aides à rendre, acté à 3 millions cette semaine était de 6 millions en juillet dernier dans l’avant-projet.
"Nous allons freiner les délocalisations, et protéger l'emploi et le futur de notre pays", s'est réjoui la gauche radicale.
Faut-il encore que le projet soit approuvé par les députés. Le gouvernement ne dispose pas de majorité au congrès sans le soutien de plusieurs formations régionales comme les indépendantistes catalans réputés proches du monde de l'entreprise.
Pas d'inqiuétude
Le risque avec ces mesures c’est quand même de décourager les investissements. Oui mais visiblement, cela n’inquiète pas le gouvernement de Pedro Sanchez. L’économie espagnole se porte bien, elle vient d'être désignée par The Economist comme la plus en forme de l'OCDE.
Plus de 3 % de croissance cette année - contre 0,8% pour l'Union européenne - et un déficit en recul de 0,6 point. Des chiffres qui valent au pays la confiance des investisseurs. Stellantis et le géant chinois CATL viennent d’ailleurs d’annoncer un projet de plus de 4 milliards d’euros pour l'installation d'une usine de batteries pour véhicules électriques.
Les résultats sont si bons que le premier ministre continue d’afficher sa tranquillité alors même que le budget 2025 est dans l’impasse. Si le blocage persiste, le cadre budgétaire de 2023 sera prolongé pour la deuxième année consécutive.
Mais pas de panique affirme le ministre de l’Économie. "Il faudra faire un peu d'ingénierie budgétaire pour réassigner les postes de dépenses, mais cela n'entraînera pas de difficulté majeure", dit-il.