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Comment le secteur aérien américain gagne des milliards de dollars avec la politique anti-immigration de Donald Trump

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Des petites compagnies aériennes, parfois en difficulté, profitent de ce juteux business pour se refaire une santé malgré les questions éthiques.

"Tueurs", "toxicomanes", "membres de gangs"… Donald Trump n'a de cesse de fustiger les immigrants illégaux aux États-Unis. À peine élu à la Maison Blanche, une des premières mesures adoptées a été d'organiser leur expulsion massive à travers l'Immigration and Customs Enforcement (ICE).

Ces expulsions se font par la route mais aussi et surtout en avion. De quoi créer un très juteux business pour le secteur aérien américain, note le Financial Times. L'ICE dispose en effet d'un budget initial annuel de 721 millions de dollars pour le transport et l'éloignement des immigrés clandestins. Mais dans le cadre du nouveau "grand" budget de Trump, l'agence prévoit d'y consacrer pas moins de 3,6 milliards de dollars supplémentaires par an. Une vraie manne.

CSI Aviation, une société privée qui négocie des vols charters privés pour le gouvernement fédéral est la première à en profiter. Ainsi, selon le quotidien américain, cette entreprise est au cœur d'un système de plusieurs milliards de dollars en transportant des milliers d'immigrants sur des dizaines de vols quotidiens entre des centres de détention américains et des pays étrangers.

Expulser des migrants: 58% de l'activité de la compagnie GlobalX

Son contrat d'affrètement avec l'État fédéral est évalué à 3,6 milliards de dollars sur cinq ans. Si ce contrat a été interrompu par un litige avec une société concurrente, CSI Aviation opère sur un contrat "intérimaire" depuis février qui lui a déjà rapporté 319 millions de dollars.

L'entreprise fait elle-même appel à des compagnies aériennes spécialisées dans les vols charters comme GlobalX ou encore Avelo qui engrangent des millions de dollars grâce à ces contrats un peu particuliers. Mieux, ces contrats leur permettent même de sauver leur situation financière.

Toujours selon le Financial Times, plus de la moitié des vols en 2025 ont été sous-traités à GlobalX, soit 5.300 vols pour l'ICE, ce qui représentait 40% de son chiffre d'affaires et même 58% au deuxième trimestre. De quoi renouer avec les bénéfices après avoir enchaîné les pertes.

Dans une note interne obtenue par le Financial Times, Avelo juge de son côté que les vols ICE sont "trop précieux pour ne pas les exploiter". Alors que la compagnie n'a pas réalisé de bénéfices pendant près de quatre ans, son patron a expliqué que l'entreprise se tournait vers l'ICE pour "nous aider à stabiliser nos finances et nous permettre de poursuivre notre aventure".

Appels au boycott

Cela s'est traduit par le développement de ses activités d'expulsion tout en réduisant ses services commerciaux avec la fermeture d'une de ses bases en Californie. Cette année, Avelo a opéré au moins 568 vols d'immigration à bord de trois Boeing 737. Mais a pris le soin de repeindre ses avions en blanc pour effacer toute trace de l'image de marque de la compagnie.

Car ce business ne fait évidemment pas l'unanimité. Des associations dénoncent surtout les conditions de vol des migrants expulsés qui sont attachés à leur siège, parfois pendant 20 heures car ce sont les règles imposées par l'ICE. Elles appellent au boycott d'Avelo par les consommateurs.

"Ce n'est pas l'Amérique que je connais. Quelqu'un doit faire quelque chose", lance un de ces opposants.

Pour Avelo, il n'y a pas de problème. Dans une réponse faite au FT, elle déclare: "Quelle que soit l'administration, en tant que compagnie aérienne nationale américaine, lorsque notre pays appelle et demande de l'aide, notre pratique est de dire oui".

Olivier Chicheportiche Journaliste BFM Business