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Cible de toutes les attaques de Trump, le Mexique réussit à échapper au pire grâce à sa présidente Claudia Sheinbaum qui a su dompter le président américain

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La présidente mexicaine Claudia Sheinbaum vient de célébrer sa première année à la tête du pays. Si son bilan national reste contrasté, elle a un franc succès sur la scène internationale. Une partie de ce succès tient à sa capacité à tenir tête à Donald Trump.

C'était une mission presque impossible, compte tenu de l'imprévisibilité du président américain et de sa tendance à considérer le continent américain comme son terrain de chasse. Pourtant, Claudia Sheinbaum réussit depuis un an à dompter Donald Trump et ses humeurs parfois changeantes.

Dernier épisode marquant: la publication par Donald Trump d’une vidéo générée par intelligence artificielle, contenant des stéréotypes racistes visant la communauté mexicaine. Sheinbaum a réagi immédiatement par un message mesuré mais percutant, rappelant que "les États-Unis ne seraient pas ce qu’ils sont sans les travailleurs mexicains", soulignant leur contribution décisive à la reprise économique étasunienne. La polémique s’est aussitôt éteinte.

Une stratégie pragmatique sur le commerce

Cette méthode de fermeté a également porté ses fruits sur le front économique. Alors que 80% des exportations mexicaines sont destinées aux États-Unis, Sheinbaum a jusqu’ici réussi à éviter l’imposition de droits de douane américains. À chaque tentative de Trump, la présidente a choisi le dialogue direct, avec des coups de fil à la Maison Blanche, mettant en avant les conséquences négatives pour l’économie américaine elle-même. Résultat: Mexico est relativement épargné avec près de la moitié des produits exemptés de droits de douane du fait de l'accord de libre-change USMCA (les produits fabriqués dans l'aire Etats-Unis, Mexique, Canada. Les autres sont taxés à hauteur de 25% (contre 30% pour le Canada).

Annalisa Cappellini : Sheinbaum tient tête à Trump - 02/10
Annalisa Cappellini : Sheinbaum tient tête à Trump - 02/10
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"Coopération" sans "subordination"

Sur le dossier hautement sensible du narcotrafic, Sheinbaum a adopté la même ligne : coopérer mais sans se soumettre. Le Mexique a déployé 10.000 soldats à la frontière, extradé une cinquantaine de chefs criminels et multiplié les saisies de fentanyl, comme l'exigeait Donald Trump pour qui la lutte contre le narcotrafic est une obsession. Mais en parallèle, la présidente méxicaine a pointé la responsabilité américaine dans l’afflux d’armes vers le Mexique. Une position équilibrée qui lui a permis d’obtenir un accord inédit, dans lequel Washington renonce à toute opération militaire unilatérale sur le sol mexicain.

Une dirigeante à contre-pied de Trump

Prudence et discrétion caractérisent la présidente mexicaine, scientifique de formation et souvent comparée à Angela Merkel pour son style rigoureux. Défenseure de la cause féminine, elle cultive un style en contraste complet avec Donald Trump. Pourtant, ce dernier n’a cessé de lui témoigner du respect, allant jusqu’à la qualifier à plusieurs reprises de "femme merveilleuse".

Contrairement à d’autres dirigeants du continent tels que Justin Trudeau ou Lula, Sheinbaum évite la confrontation frontale. Elle privilégie au contraire un cap clair : défendre les intérêts économiques du Mexique tout en maintenant une relation équilibrée avec Washington.

Sur le plan intérieur, la présidente doit cependant composer avec des difficultés structurelles, à commencer par un déficit budgétaire conséquent: 5,9% du PIB en 2024. Malgré ces fragilités, son assise politique demeure solide. Un an après son élection, 80% des Mexicains continuent d’approuver son action, un niveau de popularité rare pour un leader en exercice.

Annalisa Cappellini