Ils ont peur des droits de douane et se précipitent aux Etats-Unis: au tour du laboratoire AstraZeneca d'annoncer un investissement massif de 50 milliards de dollars

Des médicaments à côté d'un flacon de pilules. Le 23 juillet 2024, à New York City (États-Unis). (Photo d'illustration) - SPENCER PLATT / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / Getty Images via AFP
AstraZeneca a annoncé ce lundi 21 juillet qu'il prévoyait d'investir 50 milliards de dollars pour accroître ses capacités de production et de recherche aux États-Unis d'ici 2030, imitant d'autres entreprises pharmaceutiques qui ont annoncé des investissements dans le pays après que Donald Trump a menacé d'imposer d'importants droits de douane contre le secteur.
Dans un communiqué, AstraZeneca a précisé que cet investissement permettrait de financer un nouveau centre de production de médicaments dans l'État de Virginie et d'élargir des centres de recherche et de développement situés au Maryland, au Massachusetts, en Californie, dans l'Indiana et au Texas.
Le groupe anglo-suédois, dirigé par le Français Pascal Soriot, a déclaré que cette démarche s'inscrivait dans son objectif d'atteindre un chiffre d'affaires annuel de 80 milliards de dollars d'ici 2030, dont la moitié réalisée aux États-Unis. Le directeur général du groupe, Pascal Soriot, a effectué ces annonces depuis Washington.
Avant AstraZeneca, d'autres entreprises du secteur ont annoncé d'importants investissements aux États-Unis, comme le groupe suisse Roche, qui a fait savoir en avril qu'il entendait investir 50 milliards de dollars, ou encore Johnson & Johnson, Novartis et Sanofi.
Poids du marché américain
En 2024, AstraZeneca a réalisé plus de 40% de son chiffre d'affaires mondial aux États-Unis, le principal marché pharmaceutique mondial, que le groupe a érigé en priorité avant même le retour de Donald Trump à la présidence américaine en janvier dernier.
Donald Trump a opéré une refonte de la politique commerciale de Washington, décidant d'éventails de droits de douane contre des secteurs spécifiques et des dizaines de partenaires commerciaux des Etats-Unis.
Il a répété son intention de taxer fortement le secteur pharmaceutique, avec l'objectif de pousser à davantage de production dans son pays, qui accuse un net déficit commercial en la matière.
Début juillet, le président américain avait laissé planer la menace de taxes à "200%" sur certains médicaments, en laissant "un ou deux ans" aux industriels pour localiser leur production aux États-Unis.
Des risques importants pour l'Europe
L'industrie pharmaceutique est l'un des points de friction de la négociation en cours entre Bruxelles et Washington, alors que les médicaments représentent un tiers des exportations européennes vers l'Amérique et permettent à l'UE de dégager un excédent de près de 70 milliards d'euros.
Les États-Unis souhaitent rééquilibrer cette relation commerciale et pourraient remettre en cause le modèle économique du médicament européen.
"Vu des États-Unis, les pays européens, en imposant des prix bas aux nouveaux médicaments par des négociations nationales strictes, contribuent peu au financement de l’innovation qui repose sur le patient américain", observe l'économiste Olivier Redoulès dans une note publiée par l'institut d'études Rexecode, de tradition libérale.
Donald Trump tente donc de forcer une baisse des prix sur le marché américain, qui pourrait se traduire par des hausses en Europe.
"La stratégie française qui a permis d’obtenir un faible reste à charge, une grande disponibilité des médicaments et des économies budgétaires, se trouve désormais menacée par la probable hausse des prix des médicaments. Plus encore, la faiblesse des prix français pourrait davantage inciter les industriels à se localiser aux Etats-Unis pour servir le marché américain, afin d’éviter d’être trop pénalisés au moment de la négociation avec l’Administration américaine", poursuit Olivier Redoulès dans cette note. L'industrie pharmaceutique française est donc à un tournant.