Fermeture des écoles: l'employeur peut-il modifier les dates de congés payés des salariés?

La fermeture des écoles pour les prochaines semaines s'avère être un véritable casse-tête pour de nombreux parents - Steve 101 - Flickr - CC
"Cela va vraiment poser un problème pour beaucoup d'entreprises certaines sont très fragiles." Interrogé sur le plateau de Good Morning Business, ce jeudi matin, le président de la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME) François Asselin s'inquiétait des répercussions des décisions présidentielles prises la veille: les écoles seront fermées pendant un mois, notamment en avançant les vacances de printemps pour tous les écoliers français.
Un nouveau casse-tête pour les parents salariés qui avaient déjà posé leurs congés aux anciennes dates de vacances et qui doivent trouver des solutions de garde. Un casse-tête aussi pour les entreprises, en pleine relance, qui craignent que leurs salariés ne choisissent un arrêt de travail pour garde d'enfants, avant d'enchaîner sur leurs congés payés. De quoi maintenir ces salariés loin de l'entreprise pour un mois, voire un mois et demi.
"Il faut instaurer du dialogue donc on va essayer de s'organiser" souligne François Asselin. Les partenaires sociaux vont d'ailleurs s'entretenir avec la ministre du Travail Elisabeth Borne, ce jeudi après-midi pour trouver une solution. Et cela pourrait bien passer par une adaptation des règles de congés payés.
Un "cas de circonstances exceptionnelles?
Premier scénario: le salarié accepte de modifier les dates de ses congés pour les adapter à la fermeture des écoles. En théorie, le salarié doit prévenir un mois à l'avance pour modifier ses dates de congés. En pratique, peu d'entreprises se plaindront de cette démarche qui leur simplifiera la vie si cela peut éviter au salarié de prendre un arrêt de travail. Reste à savoir si les frais engagés pour les locations, par exemple, seront remboursés.
Deuxième scénario: l'entreprise impose au salarié de prendre ses congés en avril. Le code du Travail n'autorise pas l'employeur à imposer des congés payés au salarié mais autorise d'en modifier les dates. En l'absence de dispositions conventionnelles (accord de branche, accord d'entreprise…), la règle est donc le respect d'un mois avant le début des congés pour modifier les dates.
Il existe néanmoins des "cas de circonstances exceptionnelles", une notion qui n'est pas clairement définie dans la loi mais qui peut, par exemple, renvoyer à la survie de l'entreprise. La crise sanitaire du Covid-19 est-elle une circonstance exceptionnelle? Seul un juge donnerait une réponse claire, mais cela dépendrait probablement de la situation concrète des entreprises. "Selon moi et même si il n’y a pas encore de jurisprudence, le Covid est de nature à constituer des circonstances exceptionnelles qui justifient de raccourcir les délais de prévenance", estime Vanessa Sebban-Bohbot., avocate associée au cabinet GKA & Associés.
Vers une nouvelle ordonnance
Pour parer à ce flou, le gouvernement avait décidé d'adapter les règles du code du Travail l'année dernière. Une ordonnance du 25 mars 2020 autorisait ainsi l'employeur à imposer facilement jusqu'à 6 jours de congés payés d'ici le 31 décembre 2020. Une nouvelle ordonnance a prolongé cette possibilité jusqu'au 30 juin 2021.
Concrètement, et seulement si un accord de branche ou d'entreprise a été signé, l'employeur n'a plus besoin de prévenir un mois à l'avance pour imposer ces six jours de congés (cela vaut pour des congés déjà demandés ou des congés pas encore placés) mais seulement 24 heures en amont.
De la même façon, l'entreprise peut imposer ou modifier jusqu'à 10 jours de RTT, de repos prévus par convention de forfait ou de droits sur le compte épargne temps. S'il n'est pas nécessaire de signer un accord collectif pour cela, les difficultés de l'entreprise doivent le justifier.
En l'occurrence, l'ordonnance ne précise pas si le prolongement du délai entraîne le renouvellement de ces congés et RTT imposables. Après sa rencontre avec les partenaires sociaux ce jeudi, le ministère du Travail devrait prendre de nouvelles mesures pour éclaircir la situation.