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Vers un "chèque transport" de 50 euros en France, que font nos voisins européens?

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Ce chèque d’un montant de 50 euros viserait les ménages les plus modestes et les trajets du quotidien.

Face à l'envolée des prix, le gouvernement est sur le point de dégainer une nouvelle mesure de protection du pouvoir d'achat, cette fois pour les transports en commun. D'autant plus qu'avec la flambée des prix de l'énergie, de plus en plus de régions (qui fixent les tarifs des lignes TER/Transilien de la SNCF) envisagent sérieusement d'augmenter les prix des billets et des abonnements en 2023.

Selon nos confrères du Parisien, un chèque transport d’un montant de 50 euros pourrait être mis en place l'an prochain. Il viserait les ménages les plus modestes et seulement les trajets du quotidien.

Une mesure réclamée depuis de longs mois par des associations d'usagers mais qui pourra apparaître timide face aux initiatives déployées par certains de nos voisins européens.

Espagne: la gratuité provisoire

En Espagne, la mesure est entrée en vigueur fin août pour une période de quatre mois, le dispositif prévoit la gratuité pour les abonnements sur les lignes publiques régionales et de banlieue gérées par la Renfe, équivalent espagnol de la SNCF.

La mesure, qui pourrait être prolongée si nécessaire au-delà du 31 décembre, concerne les réseaux de proximité dans les zones périurbaines des grandes villes comme Madrid, Barcelone, Valence ou Séville, mais aussi les trains de moyenne distance.

Pour bénéficier de ce passe, les usagers doivent déposer une caution de 10 ou 20 euros, qu'ils pourront ensuite récupérer à condition d'effectuer un minimum de 16 trajets d'ici à fin décembre. Selon la compagnie ferroviaire espagnole, 75 millions de trajets seront concernés par la gratuité.

L'adoption de ce passe dépasse les attentes. Début septembre, 500.000 demandes avaient été effectuées.

Selon le gouvernement, cette mesure permet jusqu'à 370 euros d'économie par personne à Madrid, et 330 à Barcelone, dans un pays où l'inflation dépasse les 10%.

Allemagne: de l'illimité à 9 euros par mois

Pendant trois mois, entre juin et fin août, les Allemands ont pu voyager pour 9 euros par mois de manière illimitée sur les réseaux locaux et régionaux: train, tram, métro, ferry à l'exception des trains grandes lignes.

Là encore, le succès a été sans précédent. Environ 52 millions de ces tickets ont été écoulés entre juin et août, auxquels s'ajoutent plus de 10 millions d'abonnements existants dont les tarifs ont été ajustés.

Il a fait économiser 1,8 million de tonnes d'émissions de CO2 selon des données officielles. 10% des utilisateurs ont indiqué avoir renoncé à au moins un trajet par semaine effectué d'ordinaire en voiture.

Selon les statistiques officielles, la fréquentation des trains sur des trajets entre 30 et 300 kilomètres a augmenté de 42% par rapport à juin 2019.

Le gouvernement planche aujourd'hui sur un nouveau dispositif pour prendre le relai de cette mesure qui a coûté plus de 2,5 milliards d'euros.

Le groupe parlementaire du SPD propose un ticket de 49 euros valable dans tout le pays pour les transports locaux, en partageant la facture à parts égales entre le gouvernement fédéral et ceux des régions. D'autres proposent la création d'un billet annuel à 365 euros par an, soit un petit euro par jour.

Autriche: le Klimaticket

Lancée en 2020, le Klimaticket autrichien est vendu 1095 euros pour un an (soit environ 3 euros par jour), et permet d’accéder à tous les trains (nationaux), bus, trams et métros (à Vienne) du pays, à volonté. Que les opérateurs soient publics ou privés.

Le succès semble est au rendez-vous puisque depuis novembre dernier, 130.000 cartes ont été vendues mais le chiffre date déjà de mai dernier (le pays compte 8 millions d'habitants).

Luxembourg: gratuité totale

Le duché du Luxembourg est allé encore plus loin. Depuis février 2020, il a rendu les transports publics gratuits, pour tous, résidents comme étrangers et sur l'ensemble de son territoire (sauf en première classe).

Une mesure à 41 millions d'euros par an (financée par l'impôt) facilitée par la petite taille géographique du pays. Elle permet une centaine d'euros d'économie par an et par habitants en moyenne.

Le revers de la médaille

Outre le coût de ces mesures sur les budgets des pays, leur succès met les réseaux ferroviaires à rude épreuve. En Allemagne, les trains se sont retrouvés bondés pendant les congés ou les week-ends provoquant la grogne des usagers.

Le coût de ces mesures peut également avoir des conséquences négatives sur les investissements dans les réseaux notamment secondaires, de dessertes fines car il faut bien compenser les opérateurs de transports.

Certains spécialistes estiment ainsi que ce type de mesure peut conduire à terme à une "paupérisation" des transports publics. Mais il est encore trop tôt pour tirer de tels bilans pour leurs partisans.

Olivier Chicheportiche Journaliste BFM Business