Mitsubishi L200 : le Triton à contre-courant

Avec cette nouvelle version de son célèbre LS200, Mitsubishi tente une percée sur le marché français des Pick-Up untilitaires, en pleine recomposition. - Antoine Larigaudrie
Un pick-up, et un gros. De plus de 1,9 tonne, de 5,2m de long... Et diesel ! Le Mitsubishi L200 (connu sur sous le nom de Triton, notamment en Asie), un des pick-up les plus vendu au monde, fait peau neuve... Et part à la conquête du marché français, pour imposer ses qualités de robustesse et de puissance sur le segment des utilitaires. Une tâche à la fois très complexe, mais aussi indispensable comme vecteur de croissance.
Tâche complexe sur un marché en pleine transformation. A la suite d'une importante réforme fiscale, le segment des pick-up est appelé à complètement se modifier. Finies les exemptions de malus écologique et les récupérations de TVA, notamment pour les pick-up cinq places à double cabine... Les derniers à bénéficier de ce traitement de faveur sont uniquement les pick-up à simple cabine, ou club (2 places + 2 strapontins à l'arrière) à usage strictement professionnel.
Le big-bang du marché français
D'où une désaffection massive pour la première catégorie, qui se traduit par une forte baisse de ce marché. "Il s'est vendu un peu plus de 20.000 pick-up l'année dernière, et nous tablons sur une baisse autour de 20 ou 25% pour cette année, à cause des changements fiscaux" dit Patrick Gourvennec, Président de Mitsubishi Motors France. "Nous vendrons quelques double cabines encore cette année, mais leur prix va devenir prohibitif avec le retour des taxes et des malus, sur des véhicules qui commencent autour des 30.000 euros point de vue tarif. En revanche, il reste clairement une forte compétition sur le segment professionnel, avec une vraie demande pour ce genre de produits." ajoute-t-il.
Car pour certaines professions, le pick-up est un outil indispensable. "BTP, Construction, Agriculture, métiers de la montagne, de la mine, artisanat... Même s'il s'agit d'un petit marché, beaucoup de professions dans le pays ont besoin d'un engin à la fois puissant, d'une haute capacité de traction et de charge, tout-terrain, pratique, et surtout d'une robustesse à toute épreuve", dit Franck Pichot, directeur marketing chez Mitsubishi Motors France. "Ce marché du pick-up professionnel est très concurrentiel, et Mitsubishi à des points à y marquer, c'est une des missions que nous a assigné notre principal actionnaire Nissan" conclut-il.
Cahier des charges exigeant
Si le Mitsubishi L200 est l'un des pick-up les plus connus du monde (pour l'anecdote, c'est par exemple la voiture la plus vendue au Chili !), il reste du chemin à parcourir en France pour espérer aller chercher les leaders du marché, le Ford Ranger et le Toyota Hilux, qui représentent à eux deux la moitié des ventes annuelles. Mais le Triton a des qualités impressionnantes qui le rendent incontournable sur ce segment.
La nouvelle version dispose d'un moteur diesel plus petit que la génération précédente, à 2,2 litres de cylindrée (contre 2,4 auparavant), pour une puissance de 154 chevaux, qui peut paraître modeste. Mais la gestion de la transmission intégrale 4x4 (Easy Select), avec de multiples modes, agit comme un véritable second moteur. Elle confère à l'engin un couple impressionnant de 380 nM, largement suffisant pour 1,9 tonne de masse à vide, une capacité de traction de 750 kilos et une charge utile maximale de 1,2 tonne !

Les capacités de l'engin en tout-terrain sont d'ailleurs hors du commun, capable d'avancer avec une traction optimale sur des terrains fortement accidentés, sur des pentes caillouteuses, des chemins de montagne, et même traverser des ruisseaux. Si peu de professionnels ont affaire a des conditions aussi extrêmes, elles font partie intégrante du cahier des charges du L200, qui les remplit aisément.
Note carbone salée...
Le Triton arrive même à être un engin agréable à mener sur route. Son intérieur confortable ressemble beaucoup à celui de l'Outlander, un des best-sellers de la marque. Grâce à une palette d'aides à la conduite qu'on retrouve sur des véhicules plus urbains (détecteur d'angles morts, freinage préventif de sécurité, alertes de proximité...), l'engin se conduit très facilement en environnement routier et en ville, avec un vrai confort d'utilisation malgré les rustiques suspensions à lames.
Reste le chiffre qui fâche: à 223 grammes de CO2 au kilomètre, l'engin est d'entrée de jeu un des plus polluants du marché. Certes, le moteur diesel du LS200 est équipé aussi d'un circuit d'AdBlue, un additif spécial qui limite les émissions d'oxyde d'azote, indispensable au bon fonctionnement du groupe propulseur. Mais la note reste salée en matière d'émissions carbone. Et l'histoire à montré, même chez Mitsubishi, que certains produits n'avaient plus lieu d'être à cause des limitations imposées au constructeurs. La production des mythiques 4x4 Pajero et des sportives Lancer Evo a été stoppée pour ces raisons.
Vers l'électrification ?
"Pour le moment", dit Patrick Gourvennec, Président de Mitsubishi Motors France, "il n'est pas possible techniquement de faire fonctionner ce type d'engin avec autre chose qu'un gros moteur diesel, pour des questions de capacité de traction et de charge. Nos principaux concurrents en sont là aussi, c'est un mal nécessaire pour des produits qui répondent à des besoins précis. Mais le groupe réfléchit déjà a des solutions d'avenir moins polluantes, étant donné notre statut de pionnier en matière d'électrification" ajoute-t-il.
Mitsubishi est en effet un des précurseur en matière de voiture 100% électrique, avec la MIEV (construite avec Peugeot et Citroën, sous les noms de Ion et C-Zéro), et son 4x4 Outlander reste le véhicule hybride rechargeable le plus vendu au monde, avec la solution technique la plus éprouvée en la matière.
L'ensemble de ces technologies zéro émission et PHEV étant destinées à être étendues à l'ensemble de la gamme Mitsubishi dans les prochains mois, il est naturel que le constructeur se mette à travailler rapidement à un pick-up électrifié. L'initiative lui permettrait à la fois de prendre de l'avance sur le marché européen, en étant le premier à les proposer... Mais aussi à lorgner du côté du marché américain, où General Motors et Rivian préparent des produits de ce type pour les années à venir.