Il y a 20 ans, le Concorde faisait ses adieux

C’était il y a exactement 20 ans. Le 24 octobre 2003, British Airways faisait officiellement ses adieux au Concorde, quelques mois après Air France. Cet avion aura fait rêver les Français pendant un demi-siècle. Retour sur l’histoire du seul jet supersonique à s’être imposé comme une alternative aux classiques avions long-courrier de Boeing, puis d’Airbus.
En 1956, le Concorde n’existe encore que sur le papier. Les ingénieurs français et britanniques travailleront d’arrache-pied onze années durant avant qu’un premier prototype sortent des usines toulousaines de Sud Aviation. Nous sommes le 27 mai 1966. Certains Français réservent déjà leur place pour faire partie des premiers à voler à passer le mur du son. Deux ans plus tard, en 1969, le Concorde réalise ses premiers vols d’essais. Et il tient ses promesses: il peut voler à Mach 2, deux fois la vitesse du son, soit près de 2.200 km/h.
L'exploit de Noël 1989: New York-Paris en moins de 3 heures
Six ans plus tard, Air France a droit à son premier exemplaire. Le premier vol commercial desservira Rio via Dakar. Mais le véritable enjeu pour Air France est de convaincre les autorités américaines de desservir New York. La compagnie nationale devra batailler plus d’un an pour décrocher enfin l'autorisation d'atterrir à l’aéroport de JFK. La liaison est assurée en trois heures et demie. Au retour, quand les vents sont favorables, le voyage peut même être encore raccourci.
Le 24 décembre 1989, profitant du faible encombrement de l’espace aérien et de bonnes conditions météorologiques, le Concorde assurant la liaison New York JFK-Paris-CDG va même réussir un exploit jamais renouvelé par la suite: parcourir les 6140 km séparant les deux aéroports en 2 heures 59 minutes et 40 secondes. Un joli cadeau de Noël offert à la trentaine de passagers présents ce jour-là par le commandant de bord, son co-pilote et l’officier-mécanicien. La présence de trois navigants dans le cockpit est en effet la règle à bord du Concorde.
Air France, seule compagnie à servir un repas gastronomique à 18.000 mètres d’altitude
En cabine, le personnel est aux petits soins. Le service commençait dans un salon dédié au Concorde où les passagers patientaient, un verre à la main, avant d’embarquer. On les débarrassait de leurs manteaux, de leurs sacs. Soigneusement étiquetés, leurs effets étaient rangés dans les sept vestiaires de l’avion. Car à bord, il n’y a pas que le temps qui est compté, l’espace l’est tout autant. Air France s’enorgueillit alors d’être la seule compagnie au monde à servir un repas gastronomique à 18.000 mètres d’altitude. Elle marque ainsi sa différence avec British Airways, la seule autre compagnie à avoir misé sur Concorde.
Voici un exemple de déjeuner servi à bord des vols Air France: canapés, caviar frais, petit homard à la Parisienne, médaillon de veau franc-comtois accompagné d’un subric de carottes et de champignons sauvages sautés aux herbes, crème bavaroise à la vanille sur un biscuit à la framboise, fruits frais et café de Colombie. Le tout accompagné, pour les amateurs de champagne, d’un Veuve Clicquot La Grande Dame. Les assiettes sont en porcelaine de Limoges, les couverts sont fournis par la vénérable maison Christofle.
L'aller-retour Paris-New York dans la journée
Air France est aussi à l’époque la seule compagnie à permettre à un homme d’affaires parisien de se rendre à New York pour signer un contrat et d’être rentré chez lui le soir même. La compagnie propose à ses passagers les plus pressés de se rendre à Manhattan en hélicoptère.
La plupart des clients préfèrent néanmoins rentrer de nuit et dormir dans la Première du 747. Le vol du retour en Concorde fait rarement le plein. De même que le week-end. Air France remplit alors son supersonique de passagers qui ne franchiront aucun océan mais vivront une expérience unique: un vol supersonique au-dessus de la Manche.
Deviner la courbure de la terre depuis le hublot
Certes, on ne ressent pas vraiment la vitesse phénoménale de l’avion. Mais elle s'affiche sur des écrans visibles depuis chaque siège de l’avion. Il n'y en a pas d'autres à bord du Concorde. Aucun film ne peut être diffusé à bord. Mais le vol offre un beau spectacle depuis les hublots, où l’on peut deviner la courbure de la terre.
Un spectacle qu’Air France cessera donc d’offrir en 2003. Le terrible accident de Gonesse trois ans plus tôt, les attentats du 11 septembre, le prix du kérosène et quelques incidents techniques ont conduit la compagnie à anticiper la sortie du Concorde de sa flotte.
L’aventure aura duré un quart de siècle. Ils restent les souvenirs. Et tous ces Concorde désormais cloués au sol. Celui qu’on peut voir en atterrissant à Roissy et ceux qui se visitent en France, au Musée du Bourget et à l’Aeroscopia de Toulouse, mais aussi en Allemagne, à Sinsheim et aux Etats-Unis, au musée national de l’Air et de l’Espace, à Washington. Rare hommage américain à ce fleuron technologique de la France.
