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Avant même le vote du Budget, Air France répercute déjà la hausse de la taxe de solidarité pour les voyages en 2025

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La montant de la taxe (qui s'applique également aux vols de Transavia) triple pour les vols domestiques et européens en classe Eco et pourra atteindre 120 euros pour les longs-courriers en Business et Première.

Si vous comptez réserver un voyage avec Air France (mais aussi Transavia ou KLM) pour l'année prochaine, et que vous vous attardez sur le détail du prix, vous aurez la (mauvaise) surprise de voir que la taxe de solidarité appliquée sur les billets a déjà augmenté.

Le gouvernement souhaite tripler le produit de la taxe de solidarité sur les billets d’avion (TSBA), qui est aujourd’hui de 460 millions d’euros, afin de trouver de nouvelles recettes dans le cadre du Budget 2025. Cette hausse entrerait en vigueur le 1er janvier prochain.

Pour autant, le principe de cette taxe n'a pas encore été adopté par le Parlement. Mais cela n'empêche pas Air France d'appliquer d'ores et déjà l'augmentation sur les billets vendus dès aujourd'hui pour des vols après le 1er janvier 2025.

8 euros en plus sur un Paris-Nice

BFM Business l'a vérifié en simulant l'achat d'un billet pour un vol Paris-Nice: sur le récapitulatif détaillé de la tarification (image ci-dessous), on peut bien lire: "surplus lié à la taxe de solidarité: 8,37 euros".

Détail des taxes payées pour un vol Air France Paris-Nice
Détail des taxes payées pour un vol Air France Paris-Nice © BFM Business

Interrogée, la compagnie aérienne confirme et explique que "cette augmentation (de la taxe, NDLR) entrerait en vigueur pour un transport à compter du 1er janvier 2025, et s’appliquerait également aux billets déjà émis pour des voyages à compter de cette date". Air France a donc choisi de prendre les devants pour des raisons de trésorerie.

"Compte tenu du caractère considérable de cette augmentation, devoir payer à l’État français une taxe non collectée aurait un impact financier significatif pour le groupe Air France-KLM", explique un porte-parole.

"Aussi, le Groupe Air France KLM a décidé de répercuter dès à présent cette hausse sur les billets vendus pour des voyages à partir du 1er janvier 2025, et ce sans attendre l’adoption définitive du projet de loi de finances", poursuit-il.

Régularisation en cas de rejet par le Parlement

La compagnie détaille également les augmentations en fonction des destinations et des classes.

  • Pour les vols domestiques (y compris DOM), les vols intra-UE et au sein de l’Espace économique européen, le barème passera de 2,63 à 9,50 euros pour les cabines Economy et Premium et de 20,27 à 30 euros pour la cabine Business.
  • Pour les autres vols de moins de 5.500 km, le barème passera de 7,51 à 15 euros pour les cabines Economy et Premium et de 63,07 à 80 euros pour les cabines Business et La Première.
  • Pour l’ensemble des vols au-delà de 5.500 km, le barème passera de 7,51 à 40 euros pour les cabines Economy et Premium et de 63,07 à 120 euros pour les cabines Business et La Première.

Si d'aventure l'augmentation de la taxe de solidarité n'était pas adoptée, ou si son barème était modifié, "les compagnies du groupe procèderont à une régularisation pour que le montant collecté soit égal au montant effectivement dû au titre de la taxe de solidarité", assure Air France.

La décision anticipée de la compagnie provoque en tout cas la colère des syndicats professionnels du voyage.

Les syndicats du voyage en colère

"Nous nous étonnons de cette mise en œuvre sans aucune information préalable auprès de ceux que vous qualifiez de “partenaires”! Il est également choquant de voir le groupe Air France-KLM appliquer une taxe non encore votée quand dans le même temps vous vous insurgez contre son instauration", indique un courrier adressé au directeur général d'Air France, signé par Valérie Boned, présidente des Entreprises du voyage (EDV) et de René-Marc Chikli, président du Syndicat des entreprises du tour opérating (Seto), et transmis à L'Echo Touristique.

"Nous nous étonnons que vous anticipiez ainsi une possible augmentation de taxe sur la seule base d’un projet d’amendement et nous vous mettons en demeure d’interrompre immédiatement l’application de cette surcharge en l’absence de vote d’une hausse du tarif de solidarité de la taxe sur le transport aérien de passagers (TTAP) quelle que soit la nature des clientèles (loisirs comme affaires)", poursuivent-ils. 

Les compagnies vent debout contre la taxe

Il y a quelques jours, le patron d'Air France-KLM a qualifié cette hausse de "choc" pour son groupe et de "nouveau coup dur pour l'ensemble du secteur".

"Si ce projet de taxation était mis en oeuvre, il aurait un impact significatif sur la compétitivité de nos compagnies, Air France, KLM et Transavia", a prévenu Benjamin Smith.

Pour Bertrand Godinot, directeur d’Easyjet pour la France, "les classes moyennes, les PME ou les étudiants n’auront bientôt plus accès à des vols courts et moyens-courriers abordables, or prendre l’avion ne doit pas être réservé à une élite".

La compagnie low cost a d'ailleurs commandé un sondage montrant que 57% des personnes interrogées rejettent cette mesure. Pour 71%, elle a pour but premier de permettre au gouvernement de renflouer rapidement les caisses de l’État. 27% seulement estiment que cette mesure a une intention environnementale.

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C'est tout le secteur qui est vent debout contre cette probable hausse des taxes. La Fnam (Fédération nationale de l'aérien et de ses métiers) et l’Union des Aéroports Français (UAF) ont fait bloc pour dénoncer les "effets dévastateurs" de cette mesure.

Pour le Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales (Gifas), ces mesures "se feront au détriment du pavillon français et de ses territoires", elles "vont réduire notre attractivité touristique et mettront un arrêt brutal à la réindustrialisation de la filière".

Olivier Chicheportiche, avec Jean-Baptiste Huet