Faut-il instaurer un congé pour IVG en entreprise?

C'est une journée historique. Ce lundi, le droit à l’IVG devrait être inscrit dans la Constitution par l’Assemblée nationale et le Sénat réunit en Congrès, 50 ans après la loi Veil.
Rappelons que plus de 230.000 femmes recourent à l'IVG chaque année en France selon la Drees, et pourtant l’avortement reste un sujet tabou en entreprise.
C’est même la double peine pour les femmes salariées qui recourent à l’IVG. Car en plus de l’intervention médicale, elles peuvent perdre de l’argent.
En effet, si de courts arrêts maladies sont souvent prescrits dans le cadre d’une interruption volontaire de grossesse, ces jours ne sont pas forcément pris pour les femmes salariées. Et pour cause, un délai de carence d’en moyenne 3 jours est appliqué.
Pendant ces trois jours, la Sécurité sociale ne verse donc pas d’indemnités. Dès lors le recours aux congés payés ou aux RTT est plus fréquent. Une solution plus favorable financièrement mais qui a des conséquences sur son stock de jours pour de "vraies" vacances. Nombreuses sont également les femmes qui choisissent le samedi pour recourir à un IVG, se reposent le dimanche et reprennent le travail le lundi.
Néanmoins, la législation a bien évolué pour les fausses couches. Depuis janvier des arrêts maladies spécifiques, sans délai de carence sont délivrés. L’élargir aux IVG pourrait donc être une piste.
Un congé perçu comme stigmatisant
"Instaurer un congé IVG ça serait envoyer un message politique fort, c'est toujours un sujet subversif et ce d'autant plus dans le milieu de l'entreprise, et pour que ça cesse ça doit passer par le droit. Un congé dédié ça légitimerait les femmes dans l'exercice de ce droit fondamental au sein de l'entreprise" indique l’avocate pénaliste Louise Boulet.
Certaines entreprises françaises ont d’ailleurs sauté le pas. C’est le cas du spécialiste de l’informatique LDLC.
Mais signe que prendre un tel congé est perçu comme stigmatisant, aucune femme de l’entreprise ne l’a encore sollicité.
L'an passé, dans une tribune publiée par Le Journal du Dimanche, une trentaine de personnalités réclamaient également l'instauration d'un congé spécifique sans perte de salaire.
Pour les signataires, "un congé dédié légitimerait et affirmerait ce droit fondamental qui s'exerce, aujourd'hui encore, clandestinement vis-à-vis de la sphère professionnelle".
"Nous voulons que nos filles et petites-filles puissent avorter sans honte ni perte de salaire", peut-on lire dans ce texte signé notamment par Elise Goldfarb et Julia Layani, créatrices du podcast Coming out, l'humoriste Rosa Bursztein, ou les cinéastes Radu Mihaileanu et Benjamin Kühn.