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Nucléaire: la Finlande veut enterrer ses déchets pendant 100.000 ans

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Le projet Onkalo avait reçu un feu vert des autorités en 2015. En France, le site d'enfouissement de Bure est toujours soumis à des autorisations.

C'est une île, accolée au continent, à proximité du golfe de Botnie, en mer Baltique. Dans un pays qui tire 33% de son énergie du nucléaire, et qui s'est déjà montré novateur dans le domaine en lançant l'année passée, avec 13 ans de retard, un EPR. L'île d'Olkiluoto va devenir de nouveau le laboratoire du nucléaire finlandais: elle va mettre en service en 2025 un site d'enfouissement des déchets nucléaires, censé résister 100.000 ans.

Il sera situé à 400 mètres de profondeur sous les forêts de l'île. Les combustibles, utilisés et issus notamment de l'EPR, seront installés dans des cartouches de cuivre, dans un tombeau étanche constitué d'argile. Ce, après avoir passé plusieurs années dans des piscines de refroidissement destinées à en faire retomber la température. Le tombeau sera scellé par un loquet en béton, selon un principe de stockage dit "multi-barrières".

L'emplacement est réputé comme idéal du fait de l'absence de fractures dans la roche, qui auraient permis l'entrée en contact de l'eau et de l'argile. Une argile dont les opérateurs estiment qu'elle serait étanche de toute façon. Le site ressemblera à terme à une immense réserve de stockage, parcourues de galeries, sur un espace de deux kilomètres de large.

La Finlande a une décennie d'avance

La méthode, élaborée par la société suédoise de gestion des déchets SKB et par l'opérateur privé Posiva -financé par les grandes firmes TVO et Fortum- est inédite à cette échelle. Surtout, la Finlande a dix années d'avance sur la Suède, également engagée dans ce type de programme -le Canada et la Suisse sont aussi en pointe.

Objectif Terre : La Finlande va enterrer ses déchets nucléaires - 10/01
Objectif Terre : La Finlande va enterrer ses déchets nucléaires - 10/01
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Le site avait été sélectionné dès les années 80 pour ses qualités géologiques; les opérateurs nucléaires, en outre, ont été rendus responsables dès l'implantation des réacteurs, de la future gestion des déchets. À l'inverse, les États-Unis ont par exemple la responsabilité cette gestion au niveau fédéral - idem pour la France avec l'Andra (Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs).

La France avance aussi

En France, ce type de projet existe: à Bure (Meuse), un site similaire est en cours de construction, mené par Cigeo. Il se heurte à d'importantes protestations sur place, par des propriétaires -dont certains doivent être expropriés- et par des associations et militants écologistes qui pointent les risques de ce type de site, et de l'industrie nucléaire au sens large.

Le Conseil constitutionnel a validé le projet, après avoir été saisi, estimant qu'il "ne méconnaissait pas" le droit des générations futures. Il a aussi été qualifié de projet d'utilité publique par le Conseil d'État fin 2023 -ce qui permet d'accélérer les procédures et d'exproprier, notamment.

Le site de Bure doit encore faire l'objet d'une autorisation délivrée par l'Autorité de sûreté nucléaire, qui permettra de démarrer une phase d'essais. Elle n'est pas attendue avant 2027. Si elle est délivrée, le site devrait permettre de stocker 83.000 m³ pour un coût estimé en 2016 à 25 milliards d'euros. Des capacités et un coût bien supérieur au projet finlandais, qui a coûté un milliard de dollars.

Valentin Grille