BFM Business
Energie

Bientôt 1,50 euro le litre: pourquoi les prix du carburant pourraient tomber encore beaucoup plus bas

placeholder video
Huit pays membres de l'Opep+ ont annoncé samedi une forte hausse de production de pétrole pour le mois de juin, ce qui devrait se traduire par une baisse accrue du prix des carburants dans les prochaines semaines.

Ce n'était donc qu'un rebond passager. Mi-avril, les prix des litres de gazole et l'essence ont augmenté d'environ trois centimes en l'espace d'une semaine alors qu'ils avaient perdu pas moins de dix centimes depuis le début du mois. Un changement de variation qui faisait alors redouter une réorientation durable à la hausse alors que le gazole flirtait avec la barre symbolique du 1,50 euro le litre. Finalement, ce seuil pourrait bien être atteint dans les toutes prochaines semaines.

D'après les données du ministère de la Transition écologique, les litres de gazole mais aussi d'essence ont vu leur prix repartir à la baisse la semaine dernière. Le premier est de nouveau sous 1,55 euro tandis que le second s'approche de 1,65 euro. Sur une semaine, ce recul est très limité puisqu'il oscille entre 0,3 et 0,4 centime par litre de carburant. Mais il pourrait bien s'accentuer dans le courant du mois de mai à la faveur d'une récente décision de pays membres de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole et leurs alliés (Opep+).

Les prix des barils d'or noir repassent sous les 60 dollars

Samedi, huit pays membres de l'Opep+ ont ainsi annoncé une forte hausse de production de pétrole pour le mois de juin, accélérant le rythme de réouverture des vannes. L'Arabie saoudite, aux côtés de la Russie et de six autres membres du cartel, vont sortir de terre 411.000 barils par jour, comme en mai, selon un communiqué, alors que le plan de réintroduction initial prévoyait une augmentation de seulement 137.000 barils.

Les membres de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep), menée par Ryad, et leurs alliés conduits par Moscou, ont noué en 2016 un accord appelé Opep+ pour mieux peser sur le marché. Ces 22 pays, pour la plupart très dépendants de la manne pétrolière, jouaient jusqu'à récemment sur la raréfaction de l'offre pour doper les prix, gardant en réserve des millions de barils. 

Avec un effort plus marqué de la part de huit membres, qui ont consenti à des réductions supplémentaires : outre l'Arabie saoudite et la Russie, sont concernés l'Irak, les Émirats arabes unis, le Koweït, le Kazakhstan, l'Algérie et Oman. Après avoir repoussé à plusieurs reprises la réintroduction de ces volumes, ils ont enclenché début avril le processus et appuient désormais sur l'accélérateur.

Et cette accélération produit déjà des effets sur les cours du pétrole. Alors que le prix du Baril de Brent était encore autour de 65 dollars il y a quelques jours, après déjà une baisse hebdomadaire notable, il est passé sous la barre des 60 dollars lundi matin tandis que celui de WTI américain est tombé à 56 dollars. De quoi envisager une répercussion significative sur les prix à la pompe dans les stations-essence françaises d'ici deux à trois semaines.

La baisse des prix du carburant dans les prochaines semaines sera moindre que celle du baril car le pétrole ne représente que 30% environ de celui de l'essence en station. Le reste étant constitué de taxes (60%) et des coût du raffinage (10%). On considère qu'en moyenne une baisse de 1 dollar du prix du pétrole correspond à une baisse de 1 centime à la pompe.

Mais avec la décrue déjà engagée des cours du Brent, la barre de 1,50 euro le litre de carburant en moyenne devrait être franchie dans les prochaines semaines. C'est d'ailleurs déjà le cas dans de nombreuses stations sur le territoire.

Le retour à 1 euro le litre à la pompe?

Et après? Peut-on envisager un pétrole qui poursuivrait sa baisser avec un litre de carburant qui descendrait largement sous 1,50 euro pour flirter avec un euro?

Les experts ne se hasardent pas à des pronostics sur les prix, des chocs exogènes pouvant toujours survenir. Néanmoins tous reconnaissent que les signaux sont orientés dans le sens d'une baisse qui devrait se poursuivre.

Dans un contexte de ralentissement de la croissance mondiale (on consomme moins de pétrole), de guerre commerciale de Donald Trump qui fait flancher le dollar et plus largement d’électrification progressive du parc automobile et de l'abandon progressif des centrales thermiques, la consommation d'hydrocarbure devrait continuer à baisser.

Dans ce contexte, la hausse de la production annoncée par l'Opep+ est de nature à accentuer le décalage entre l'offre et la demande de pétrole. Dès lors envisager un retour à des prix planchers du carburant comme par exemple en 2016 (1 euro le litre de gazole et 1,20 euro celui d'essence) n'est plus une hypothèse totalement fantaisiste.

Timothée Talbi avec AFP