Baisse des paris, dérives, gouvernance… Pourquoi le PMU va devoir se restructurer et faire des économies

Comment éviter que le PMU, les paris mutuels urbains, pilier des courses hippiques, ne se fasse définitivement distancer? Ancré sur le territoire depuis près d'un siècle, le PMU traverse actuellement l'une des pires crises de son histoire. Le gouvernement a donc décidé de prendre les rênes en annonçant mercredi un plan de relance qui risque d'être perçu par la filière comme un remède de cheval...
Il s'agit en effet de lancer une réforme de la filière hippique qui comprend "un plan d'économies structurelles" et une rénovation de la gouvernance du PMU pour "faire évoluer son statut". C'est Eric Woerth, député de l'Oise, qui a en charge la rédaction d'un "Pacte PMU 2030".
Né en 1930, le PMU est un Groupement d'intérêt économique (GIE) détenu par France Galop et la SETF (Société d'encouragement à l'élevage du trotteur français) qui se partagent à parts égales le bénéfice net (8% des mises) pour financer la filière hippique et ses 40.000 emplois. Les joueurs empochent 75% des mises sous forme de gains tandis que l'Etat en reçoit 9%. Le ministère de l'Agriculture et Bercy exercent une tutelle sur le PMU.
Le PMU supplanté par les paris en ligne
Les paris hippiques n'attirent plus autant et la discipline est aujourd'hui reléguée par les paris sportifs en ligne bien plus prisés par les jeunes et ce, malgré les efforts de la filière pour attirer un public moins âgé (développement du online, modernisation des points de vente, campagnes de communication...).
Et les chiffres sont sans appel. Selon le bilan 2024 de l'Autorité nationale des jeux (ANJ), le PMU a enregistré 6,6 milliards d'euros de mises l'an dernier (3,5 millions de joueurs), pour 1,7 milliard de produit brut des jeux (différence entre les mises des joueurs et leurs gains), en baisse de 2% sur un an. C'est même 4% de moins par rapport aux objectifs initiaux. Pire, cette tendance se confirme, selon France Galop, les mises étant en baisse de 4% depuis le début de l'année.
Surtout, avec 12% de part de marché en 2024, le PMU a été supplanté pour la première fois par le pari sportif en ligne. Une tendance baissière confirmée par les conclusions d'un rapport de l’Inspection Générale des Finances de juin 2025 demandé par le gouvernement. Ce document évoque "le risque que la tendance à la baisse des enjeux du pari hippique se poursuive durablement".
"L'enjeu, c'est de retrouver une dynamique de croissance. On nous avait vendus une stratégie de retour à la croissance mais les objectifs ne sont pas atteints", déplore une source au sein d'une société de courses à l'AFP.
Des dérives et des luttes intestines
Le PMU est également traversé par des dissensions internes, jamais vues depuis sa création. En avril dernier, les comptes 2024 ont été rejetés, une première, entraînant une crise ouverte entre les acteurs du secteur qui évoquent "une situation délétère". Le groupe s'est par ailleurs retrouvé en mars au cœur d'une enquête journalistique qui décrit des dérives, avec un système pour maximiser les rendements, ce qui avait valu à son dirigeant une convocation au ministère de l'Education nationale.
Plus récemment encore, Emmanuelle Malecaze-Doublet, qui dirige le PMU depuis juillet 2022, suite à la révocation de son prédécesseur Cyril Linette pour faute, a annoncé son départ pour la fin de l'été. Au sein du PMU aucun successeur n'a été annoncé pour le moment par les maisons mères qui pourraient nommer un dirigeant par intérim avant de trouver la perle rare, selon une source. Une instabilité qui n'aide pas.
Que veut faire le gouvernement?
France Galop, l'une des maisons mère du PMU, a bien lancé un plan d'économies en mai dernier visant à diminuer "progressivement ses charges d'organisation des courses de 20 millions d'euros à horizon 2029", et réduire de 20,3 millions les "encouragements" (allocations versées à la filière) à partir de 2026, après une réduction de 10,5 millions cette année. Des mesures jugées insuffisantes par le gouvernement qui veut donc une réforme en profondeur. Dans un communiqué, le ministère de l'Agriculture appelle à "une inflexion forte de la stratégie du PMU et de la gouvernance de la filière".
Il s'agit "d’engager, dans les plus brefs délais, un plan de transformation ambitieux et coordonné permettant de garantir la pérennité de la filière hippique et la continuité des missions de service public confiées par le législateur".
Comment ? En engageant "un plan volontariste d’investissements afin de stabiliser le déclin des revenus et de créer les conditions d’un rebond à moyen terme. Cette stratégie implique d’engager un plan d’économies structurelles dans la filière. En particulier, les sociétés-mères doivent poursuivre les efforts d’économies et de réduction pérenne des charges en favorisant davantage la mutualisation de leurs services, et dégager, en parallèle, de nouvelles recettes hors-paris".
Les taxes pourraient revenir au galop
Cette ambition risque de faire grincer des dents puisqu'elle "implique de rénover la gouvernance du PMU et notamment de faire évoluer son statut vers celui d’un GIE commercial, afin d’aligner l’ensemble des parties prenantes autour d’une stratégie de développement", peut-on lire. Ce changement de statut avait pourtant été écarté dans un premier temps. Ce statut de GIE commercial, selon certains médias, permettrait notamment de ne plus reverser la totalité de son bénéfice net aux sociétés mères et de constituer des réserves. Le PMU aurait "davantage d'autonomie stratégique" et "cela renforce l'entreprise et sa profitabilité", souligne Bercy à l'AFP.
Autre mesure qui pourrait revenir comme un cheval au galop, le projet de taxation. La filière avait en effet échappé cette année après une large mobilisation à une hausse des taxes sur les paris hippiques en point de vente (de 6,9 à 7,5%) et en ligne (de 6,9 à 15%) qualifiée de "mortifère". Fin 2024, le ministre du Budget, Laurent Saint-Martin, avait déclaré : "Je souhaite que les propriétaires, tous ceux qui font la vie hippique de notre pays, puissent être protégés d'une fiscalité qui viendrait les empêcher de travailler". Mais compte tenu des difficultés chroniques du PMU et de la situation budgétaire de la France, un revirement sur cette question est loin d'être impossible.