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"Nous avons besoin de plus de concurrence": le patron d'United Airlines veut en finir avec le duopole Airbus/Boeing

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Entre la production au ralenti chez Boeing, la pénurie de pièces, les problèmes de moteur chez Airbus, le PDG du géant américain plaide pour l'émergence d'un troisième acteur de poids dans l'industrie.

Le trafic aérien mondial devrait battre cette année un nouveau record. Et cette prévision fait grincer les dents des grandes compagnies aériennes.

La raison en est simple: l'industrie aéronautique peine à suivre la demande en avions neufs, forçant les transporteurs à revoir leurs plans dès cet été ou à louer des avions pour répondre à la demande.

La situation est tendue. Chez Boeing, la production est fortement perturbée à cause des problèmes de qualité du 737 Max, son avion moyen courrier vedette. Le constructeur américain doit gérer de nombreuses enquêtes du régulateur américain, résultat ses livraisons de Max, qui constituent l'essentiel de ses commandes, sont en chute libre. Quant au Max 10, il est toujours en attente de certification.

19% d'avions neufs manquent à l'appel

Chez Airbus, si la production se redresse, les compagnies doivent gérer des problèmes de moteur Pratt & Whitney de certains A320neo. Jusqu'à 650 appareils pourraient être immobilisés au sol au premier semestre 2024 pour des inspections expliquait RTX Corp. maison mère de Pratt & Whitney l'année dernière.

Sans oublier les problèmes récurrents de main d'œuvre, de pièces détachées et de pénuries de matière première qui pèsent sur l'industrie.

Selon Martha Neubauer, associée principale chez AeroDynamic Advisory, citée par Reuters, les transporteurs recevront 19% d'avions en moins que prévu il y a un an, un chiffre qui monte à 32% pour les compagnies américaines.

Pour Scott Kirby, le très puissant patron d'United Airlines, le temps des lamentations est terminé. Le PDG plaide pour l'émergence d'un troisième constructeur de poids face au duopole historique constitué par Airbus et Boeing.

"Deux fabricants, trois producteurs de moteurs: nous avons besoin de plus de concurrence dans le secteur aérospatial" et la compagnie "commence à y réfléchir" a-t-il déclaré sur le podcast Air Show, cité par The Air Current.

La question qui se pose immédiatement est: quel pourrait être ce troisième acteur? Il y a évidemment le chinois Comac qui monte actuellement en puissance avec son C919, le premier avion de ligne de conception et de fabrication chinoise qui vise à concurrencer le 737 Max de Boeing et la famille des A320 d'Airbus.

Le chinois Comac monte en puissance

L'appareil, qui n'est pas encore certifié par la FAA et l'EASA (les agences américaines et européennes de régulation aérienne) trouve néanmoins preneur chez les puissantes compagnies aériennes chinoises à coup de centaines d'exemplaires.

"Avec Airbus et Boeing qui peinent à augmenter leur production pour répondre à la demande, Comac se positionne comme une alternative viable", souligne un spécialiste. D'autant plus que Comac n'entend pas se contenter du court-moyen courrier. Il travaille depuis plusieurs années au développement du C939 qui s'attaquera à l'A350 ou au 777X, soit un appareil long-courrier.

Pour autant, Scott Kirby est prudent, estimant "peu probable" que Comac compense à court terme les difficultés d'Airbus et Boeing. Il faut dire que le 'made in China' est encore stigmatisé dans l'industrie aéronautique.

Son regard se tourne plutôt vers le Brésil, "cela pourrait être" le fabricant Embraer, dit-il. Le numéro trois mondial ne joue pas encore dans la même cour qu'Airbus et Boeing puisqu'il ne fabrique que des avions régionaux embarquant moins de 100 passagers.

Mais il se murmure depuis un certain temps déjà que l'industriel étudie le développement d'un avion moyen-courrier à fuselage étroit qui viendrait concurrencer le 737 ou les A320.

Selon le Wall Street Journal, il serait à la recherche d'éventuels partenaires notamment financiers. Pourquoi pas des compagnies aériennes internationales? Pour autant, étant donné la durée des cycles de développement dans l'industrie aéronautique, l'entrée en lice d'Embraer n'est pas pour demain.

Olivier Chicheportiche Journaliste BFM Business