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5G : Les entreprises et l’industrie en première ligne

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Si 5G rime une nouvelle fois avec hausse des débits, les gains attendus seront bien du côté de l’industrie et du B2B. Encore faut-il imaginer les services et les usages.

La France n’entend pas rater le train de la 5G. Gouvernement et régulateur mettent actuellement en place le puzzle qui doit permettre à tout l’écosystème d’être prêt pour 2020, année du lancement commercial du successeur de la 4G.

Pour autant, il s’agit de ne pas se tromper de cible. Si le grand public est évidemment concerné (avec au rendez-vous une hausse des débits afin de rendre plus confortables des applications comme la réalité virtuelle), ce sont bien les entreprises qui devraient prioritairement profiter des gains apportés par cette nouvelle norme.

La 5G ce n'est que de la 4G plus rapide. La 5G offre des débits montants et descendants supérieurs à 10 gigabit par seconde théoriques mais surtout par plus de capacités et une latence très basse en deçà de la milliseconde contre 25 à 40 ms en 4G. Soit un atout majeur pour faire communiquer les millions d'objets connectés actuellement déployés. Mais pas seulement.

« On mise en effet sur les applications industrielles B2B, c’est une optique délibérément prise par la Commission européenne, on vise les verticaux contrairement à l’Asie et aux Etats-Unis qui sont dans un logique d’amélioration de la couverture ou de soutien au fixe », nous explique Carole Manero, directrice d'études pour l’Idate, think thank français.

La question cruciale de la formation

De quoi accompagner l’essor de nombreux secteurs : voitures autonomes et connectées, logistique, médecine à distance, gestion de flottes, transport, vidéo-surveillance, sécurité, relevés en temps réel, de gestion des applications critiques, ce qu'on appelle la reliability …

D’ailleurs, l’Arcep, le régulateur des télécoms ne s’y trompe pas. Dans sa feuille de route pour la 5G concoctée avec le gouvernement, l’Autorité appelle ainsi les entreprises à imaginer nouveaux services et usages d’ici 2020.

« La stratégie nationale vise à soutenir le développement de ces nouveaux usages dans les secteurs identifiés comme prioritaires. Une attention particulière sera portée à l’émergence de pilotes, dans lesquels seront testés les nouveaux usages potentiels de la 5G : contrôle du trafic routier, optimisation énergétique. Ces expérimentations ont vocation à associer l'ensemble des acteurs concernés : autorités locales, opérateurs, équipementiers, acteurs verticaux, utilisateurs tests, startups innovantes. Afin de faciliter la constitution de consortiums pour la réalisation des pilotes, le gouvernement entend s’appuyer sur le Conseil national de l’industrie ».

Industriels, opérateurs et équipementiers commencent ainsi à multiplier les expérimentations à travers des licences provisoires (les définitives devraient être attribuées à la fin de l’année prochaine), notamment autour de l’automobile.

« Il y a déjà pas mal de projets présentés, les acteurs de l’industrie se mobilisent mais c’est vrai que le secteur automobile est à la pointe, à travers des projets cofinancés par l’Union européenne. D’autres secteurs sont moins avancés mais regardent la 5G de près : le bâtiment par exemple où il y a énormément de choses inventer comme le pilotage à distance d’engins. De quoi doper l’avantage concurrentiel d’acteurs du secteur », poursuit la spécialiste.

La 5G peut donc offrir des éléments de différenciation pour les entreprises de tout, c'est donc un accélérateur pour la transformation numérique des entreprises. « Cela peut profondément modifier leur fonctionnement à condition que la formation des salariés suive, et c’est un défi », souligne Carole Manero.

Ce qui implique un élargissement de l’écosystème historiquement limité aux opérateurs et équipementiers avec l'entrée de l'industrie, de start-ups spécialisées, les acteurs métiers. La 5G c’est donc un levier de différenciation et de transformation des entreprises mais aussi une opportunité de business.

12,3 trillions de dollars (soit 12 300 milliards) et 22 millions de nouveaux emplois créés, tel serait l’apport de la 5G à l'économie mondiale en 2035 selon une étude d’IHS Markit. La France devrait accaparer 85 milliards de revenus et près de 400.000 emplois de cette manne même si ces prévisions sont à prendre avec des pincettes.

Enfin, cette 5G pourrait constituer un ballon d’oxygène pour les opérateurs télécoms français confrontés à l’équation prix planchers + investissements en hausse.

Pour autant, rien n’est acquis. « Il faudra évidemment monétiser autre chose que la hausse des débits. On peut imaginer la mise en place de forfaits qui jouent avec le curseur de la latence, de la qualité de service afin de dégager de nouvelles cibles prêtes à lâcher quelques euros supplémentaires. Mais si le prix des licences atteint le même sommet qu’en Italie, l’équation restera compliquée pour les opérateurs », conclut la spécialiste.

Olivier CHICHEPORTICHE