Élections américaines: ce que contiennent les programmes économiques de Trump et Biden

Le sprint final est lancé. A l’issue d’une campagne particulièrement violente, les citoyens américains se rendront aux urnes ce mardi pour élire leur futur président. Les deux favoris que sont Donald Trump et Joe Biden devront à cette occasion être départagés sur la base de programmes diamétralement opposés. En matière d’économie notamment, l’opposition entre les deux candidats "est frontale sur le plan de la fiscalité, des dépenses publiques et de la régulation", explique Eric Dor, directeur des études économiques à l’IESEG School of Management.
D’un côté, le candidat républicain dont la philosophie globale repose sur un recours maximum au marché avec une intervention minimale de l’Etat s’est contenté d’un programme avec "de vagues intentions ou objectifs, sans préciser les moyens utilisés et leur coût", souligne Eric Dor. Le président sortant peut néanmoins s’appuyer sur un bilan économique flatteur avec une croissance soutenue et un chômage au plus bas. Du moins, pour ce qui est de la période 2016-2019, soit avant le début de pandémie de coronavirus.
En face de lui, le candidat démocrate défend le rôle interventionniste de l’Etat tout en laissant une place importante aux marchés. Contrairement à son adversaire, son programme économique est "détaillé et souvent chiffré", détaille encore Eric Dor.
> Impôts des particuliers
En matière fiscale, Donald Trump promet de baisser les impôts sur les revenus de la classe moyenne, sans préciser l’ampleur de cette baisse. Il prévoit surtout de rendre permanentes les diminutions temporaires d’impôts octroyées aux hauts-revenus dans le cadre de la réforme fiscale de 2017. Enfin, le taux d’impôt sur les plus-values réalisées sur des actifs financiers devrait lui aussi être revu à la baisse en cas de seconde mandature.
A l’inverse, Joe Biden opte pour une augmentation de la fiscalité des plus fortunés avec une hausse du taux d’impôt sur la tranche supérieure qui, après avoir été abaissé à 37%, reviendrait à 39,6% pour les revenus supérieurs à un million de dollars. Les plus-values et dividendes aujourd’hui taxés au taux réduit de 20% le seront finalement au taux ordinaire. Le taux marginal appliqué serait dès lors de 39,6% sur les plus-values et dividendes pour les bénéficiaires à hauts revenus. Certaines niches fiscales devraient en outre être supprimées.
Le programme économique de l’ancien vice-président de Barack Obama contient également une série de mesures en faveur des classes moyennes et des plus démunis. Parmi elles, l’augmentation des crédits d’impôt pour enfants à charge, des crédits d’impôt pour l’assurance soins, des crédits d’impôt pour chaque famille à bas revenus ou de la classe moyenne qui font garder leurs enfants pour pouvoir travailler ainsi que pour les familles qui supportent un coût de prise en charge de personnes âgées.
Des crédits d’impôt permanents sont aussi prévus jusqu’à 15.000 dollars par an pour les familles qui achètent leur premier logement. Joe Biden s’est enfin engagé à ne pas augmenter les impôts sur les revenus jusqu’à 400.000 dollars par an et à fixer le salaire minimum fédéral à 15 dollars par heure.
> Impôts sur les sociétés
Pour renforcer la compétitivité des Etats-Unis, Donald Trump promet un crédit d’impôt sur les bénéfices des entreprises qui produisent dans le pays et sur les bénéfices de celles qui relocalisent des pays émergents vers les Etats-Unis. Dans la même logique, les employeurs devraient bénéficier d’une baisse imprécisée des cotisations sociales sur les salaires et d’une pérennisation des diminutions temporaires d’impôts octroyées aux entreprises dans le cadre de la réforme fiscale de 2017. Toutes ces aides fiscales doivent servir l’objectif de création de 10 millions d’emplois en 10 mois ainsi qu’un million de nouvelles petites entreprises.
Joe Biden propose au contraire de porter le taux d’impôt sur les bénéfices à 28%, contre 21% actuellement, avec un taux plancher de 15% qu’elles que soient les déductions utilisées par les entreprises. Les entreprises qui délocalisent leur production vers d’autres pays pour l’importer ensuite se verront quant à elles imposer une pénalité d’impôts supplémentaires.
> Dépenses publiques
En cas de réélection de Donald Trump, une partie de l’investissement public sera destiné au lancement d’une force militaire spatiale et à l’établissement d’une présence humaine permanente dans l’espace. Le président sortant promet aussi d’accorder davantage de moyens à la police.
Un investissement fédéral direct de 1000 milliards de dollars sera dédié à différents types d’infrastructures (autoroutes, rail, ports, ponts, énergie, haut débit, etc.). Un investissement dans le nettoyage des océans en partenariat avec d’autres pays est également inscrit au programme du candidat républicain.
Dans le camp démocrate, Joe Biden s’engage à investir massivement pour rénover les routes et les ponts. Mais l’investissement public sera surtout orienté vers la transition écologique avec 2000 milliards de dollars programmés pour lutter contre le réchauffement climatique, auxquels s’ajouteront des aides directes pour la recherche pour une énergie nucléaire sûre et pour la capture du carbone.
En matière d’éducation et d’enseignement, Joe Biden veut rendre l’enseignement supérieur universitaire public gratuit. Des subventions publiques doivent parallèlement rendre l’école maternelle et les structures dédiées à la petite enfance budgétairement accessibles à tous. D’autres subventions sont prévues en matière de logement. Enfin, le candidat démocrate promet un investissement public dans la recherche technologique afin de moderniser l’industrie.
> Commerce international
A l’international, Donald Trump ne devrait pas changer fondamentalement sa politique si ce n’est pour les entreprises qui rechignent à relocaliser leur production aux Etats-Unis puisque celles-ci devront supporter des impôts de pénalité. Les sociétés américaines qui sous-traitent en Chine seront par ailleurs inéligibles aux marqués publics.
Du côté de Joe Biden, le "made in USA" sera aussi mis en avant. Les entreprises qui obtiendront le contrat d’un marché public devront ainsi s’approvisionner auprès d’entreprises qui produisent aux Etats-Unis, tandis que des mesures seront prises pour lutter contre le dumping chinois.
Face à la Chine justement, Joe Biden veut changer de stratégie en agissant de manière concertée avec les pays alliés, dont l’Union européenne. Il souhaite enfin réexaminer l’utilité des droits de douane instaurés par Donald Trump ces quatre dernières années.