La Biélorussie menace de couper le gaz russe à l'Europe

Minsk menace de femer les vannes gazières vers l'Ouest du continent européen. Le président biélorusse a estimé qu’il ne fallait "reculer devant rien pour défendre la souveraineté du pays". Mais Alexander Loukachenko n’a pas vraiment usé de la forme affirmative. Sa phrase tenue devant son conseil des ministres, telle que rapportée par l’agence de presse nationale Belta: "Que se passera-t-il si nous bloquons le transit du gaz naturel ?".
Le gazoduc Yamal-Europe
Cette riposte ne se matérialisera, d’après lui, que si les Européens viennent à imposer des sanctions supplémentaires "inacceptables". Mais le président Loukachenko, dont la légitimité est contestée depuis l'élection d'août 2020, ne précise pas ce qu’il percevrait comme "inacceptable".
Couper le gazoduc Yamal-Europe, dont une section de 575 kilomètres se situe sur le territoire biélorusse, affecterait les approvisionnements de quatre Etats de l'Union européeenne: Allemagne, Belgique, Pays-Bas et Pologne.
D’après les évaluations disponibles, environ 20% du gaz russe vers l’UE transite par la Biélorussie. Et Minsk s’estime en position de force, de ce point de vue, parce qu’il n’y aurait pas de solution immédiate de repli, en particulier via l’Ukraine.
"Bluff"
La cheffe de l’opposition en exil, Svetlana Tikhanovskaïa, déclare, à l'AFP, supposer qu’il s’agit d’un "bluff". Et puis, la conviction européenne la plus répandue reste que la Biélorussie a trop besoin des droits de transit du gazoduc pour s'en passer, surtout en cette période où les flux augmentent.
Et si tant est que la Russie admette un tel coup porté à ses contrats: un spécialiste à Londres du secteur gazier juge impossible que Moscou ne puisse pas être impliquée politiquement, au plus haut niveau, dans une telle crise de l’approvisionnement.
Dmitri Trenin, le directeur du centre d’analyse russo-américain Carnegie à Moscou, un ancien colonel de l’armée russe, juge, lui, que le président "Loukachenko outrepasse audacieusement son autorité en menaçant de couper les livraisons de gaz de la Russie à l'UE". Il ajoute: "Dommage que Moscou ne lui tape pas sur les doigts, cela encourage les mauvaises habitudes". Comme un rappel à l'ordre. Le Kremlin a réagi ce vendredi matin, affirmant que la Russie honorerait ses contrats.