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Réforme des retraites: ce que l'avis du Conseil constitutionnel peut changer

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Le Conseil constitutionnel rend ce vendredi son avis sur la réforme des retraites, dont l'examen soulève différents griefs par ses opposants.

La réforme des retraites est-elle ou non conforme à la Constitution? Les 9 sages du Conseil constitutionnel doivent trancher ce vendredi fin d'après-midi. De cette décision dépend l'avenir de cette réforme. Trois saisines ont été déposées par l'opposition, qui toutes soulèvent trois problèmes majeurs.

Trois griefs

Premièrement, le choix de passer par un projet de loi de finance rectificatif de la sécurité sociale. Or, ce type de véhicule est censé rectifier dans l'urgence un budget et non pas faire passer une réforme aussi structurelle que celle des retraites, qui a des conséquences budgétaires sur de nombreuses années. L'opposition dénonce ici "un détournement de procédure". Pour eux, ce véhicule n'a été utilisé que pour gagner du temps et contraindre le débat à 50 jours maximum.

Autre grief: la méthode utilisée par le gouvernement. L'exécutif a usé de très nombreux dispositifs: 47.1, vote bloqué, 49.3. Si tous ces dispositifs pris individuellement sont parfaitement constitutionnels, leur usage cumulé a, selon les opposants, nui à la clarté et à la sincérité des débats.

Autre problème enfin: certains articles, comme l'index sénior, ont très peu d'incidence budgétaire et pourraient donc être considérés comme des cavaliers législatifs. En clair, les Sages pourraient considérés qu'ils n'ont rien à faire dans ce texte de loi.

Trois options possibles

En fonction des griefs retenus, trois options sont possibles. Soit le Conseil constitutionnel considère que le véhicule législatif ou que la méthode utilisée par le gouvernement pose problème, et l'ensemble du texte est censuré. Dans ce cas, la réforme tombe. Cette hypothèse est toutefois jugée très peu probable par la plupart des juristes.

Soit les Sages considèrent que tout cela est parfaitement constitutionnel et l'ensemble de la réforme est validée. Une hypothèse elle aussi jugée peu probable. Laurent Fabius, le président du Conseil constitutionnel, avait lui-même alerté le gouvernement sur ce risque de cavaliers législatifs.

D'où la dernière option, la plus probable: le Conseil constitutionnel ne censure que partiellement. Quelques mesures seulement sont alors retoquées.

Vers un référendum?

Dans le même temps, le conseil constitutionnel doit également donner son feu vert ou non à un RIP, un référendum d'initiative partagée. Selon la plupart des juristes, cela a de bonnes chances de passer. Toutes les conditions semblent à priori réunies. 252 députés l’ont co-signé, pour 185 signatures requises. La procédure a été lancée dans les temps, avant que la réforme des retraites ne soit promulguée. Enfin, elle porte bien sur des réformes relatives à la politique économique, sociale ou environnementale de la nation.

Cela dit, même si ce référendum d'initiative populaire était validé, cela ne serait pas suspensif. La réforme des retraites pourrait tout de même être promulguée et entrer en vigueur, comme prévu, en septembre prochain. La procédure devrait, elle, franchir encore de nombreux obstacles.

Pour aboutir à un référendum, la proposition de loi, qui prévoit que l'âge de départ à la retraite ne peut pas dépasser 62 ans, devra ensuite recueillir 4.8 millions de signatures, c'est à dire 10% du corps électoral sous 9 mois maximum. Si ce seuil est atteint, les parlementaires auront ensuite 6 mois pour se saisir de cette proposition de loi. Si les parlementaires ne s'en saisissent pas, le Président de la République est alors tenu d'organiser un référendum.

Autant de scénarii que les syndicats ont scruté à la loupe pour préparer leur contre-attaque à l'issue de cette décision tant attendue.

Caroline Morisseau