Les mesures en faveur du pouvoir d'achat font plonger le déficit de la Sécu

Plus de 5 milliards d'euros. C'est le montant que devrait atteindre en 2019 le déficit de Sécurité sociale, selon un document cité par Les Echos. Un dérapage que le pays n'avait plus connu depuis 2010, dernière année du creusement du déficit du régime général et du fonds de solidarité vieillesse.
Cette année-là, en pleine crise des subprimes, il avait atteint 25 milliards d'euros. Mais depuis neuf ans, les différents gouvernement avaient fait en sorte d'en réduire l'ampleur. En 2018, il était tombé à 1,2 milliard d'euros. Et les comptes étaient même attendu à l'équilibre pour 2019 avec un léger excédent de 100 millions d'euros selon le budget de la Sécu adopté en décembre dernier.

Comment est-on alors passé de +100 millions à -5 milliards d'euros? Tout simplement parce qu'entre temps, il y a eu les annonces par Emmanuel Macron et Edouard Philippe des mesures en faveur du pouvoir d'achat destinées à apaiser la colère des gilets jaunes. Au total, la facture de l'ensemble de ses mesures s'est élevée à 17 milliards d'euros.
Si l'Etat a pris à sa charge la majorité de ces dépenses, ce qui a grevé son propre déficit (qui devrait atteindre 3,1% du PIB en 2019), la Sécu en a elle aussi pâti. Deux mesures sont notamment en cause du creusement de ce déficit: l'abaissement de de 1,7 point de la CSG pour les retraités gagnant moins de 2.000 euros dont le coût est estimé à 1,5 milliard d'euros et l'avancement de septembre à janvier de l'exonération sociale des heures supplémentaires (1,2 milliard d'euros).
Passe d'arme au gouvernement
Tout cela fait des recettes en moins pour la Sécu qui se retrouve à devoir dépenser plus que ce qu'elle ne gagne. La Commission des comptes de la Sécurité sociale avait déjà tiré la sonnette d'alarme en juin en estimant qu'il n'y aurait pas d'excédent pour 2019 mais un déficit. La faute à une autre mesure "pouvoir d'achat", la prime de fin d'année exonérée de cotisations sociales. Du fait de cette mesure, la progression de la masse salariale soumise à prélèvements sociaux a été moins importante que prévue (+2,9% au lieu de +3,1%).
Bref si ces mesures ont redonné du pouvoir d'achat aux Français et ont remis du carburant dans le moteur de la croissance, elles ont été très coûteuses pour l'Etat et la Sécu qui n'ont pas réduit leurs dépenses d'autant. D'autant que selon le même document cité par Les Echos, le déficit devrait être du même ordre (un peu moins de 5 milliards d'euros) pour 2020.
Une situation problématique qui donne lieu à une passe d'arme au gouvernement entre Agnès Buzyn et Gérald Darmanin. La ministre de la Santé en appelle à la solidarité le ministre des Comptes publics. Autrement dit que l'Etat aide la Sécu à combler son déficit. Ce que rechigne à faire Gérald Darmanin. Un débat d'ailleurs plus politique (à la veille de la réforme des retraites) qu'économique. Car que l'Etat compense ou non, ça ne changera au final rien au déficit public.
