L’hiver n'est pas encore là mais l’électricité française se vend déjà plus cher qu’ailleurs

L'électricité française pour cet hiver s'échange à des prix bien plus élevés que chez nos voisins. Les incertitudes quant à la disponibilité du parc nucléaire d’EDF, mais aussi des stocks hydrauliques, sont en cause.
Des contrats presque deux fois plus chers qu’outre-Rhin
Les contrats français d’électricité à terme pour le dernier trimestre 2023 s’échangent actuellement à 280 euros le mégawattheure (MWh) quand ils ne dépassent pas les 150 euros le MWh en Allemagne, aux Pays-Bas ou encore en Belgique.
Pour l'Italie, les contrats se négocient à 176 euros le MWh sur la bourse européenne de l’énergie tandis qu’en Autriche, les derniers prix tournent autour de 166 euros pour la même période. Ces contrats, achetés par les fournisseurs d'énergie, serviront à approvisionner ménages et entreprises.
Pour le premier trimestre 2024, les contrats d'électricité pour la France grimpent à 367 euros le MWh, également nettement plus haut que chez ses voisins. Si la situation peut s’améliorer puisque les prix évoluent quotidiennement, pour Nicolas Goldberg, associé énergie à Colombus Consulting, l'écart de prix entre les contrats français et ceux des autres pays est "justifié".
Certes plus chers qu’ailleurs, les contrats à terme français pour cet hiver sont pour autant loin des sommes astronomiques qu’ils ont atteint en 2022 quand les inquiétudes sur de possibles pénuries d’électricité pesaient sur le pays. L'été dernier, les prix des contrats à terme pour l'hiver ont atteint un pic à 1840 euros le MWh.
Pourquoi l'électricité française s'achète-t-elle plus cher?
"Le marché anticipe que la France va devoir importer" cet hiver, explique Nicolas Goldberg. Si, en général, l’Hexagone importe de l’électricité lors des mois les plus froids de l’année, elle est, en revanche, largement exportatrice en été. Pour l’hiver à venir cependant, le marché prévoit que le pays sera "très importateur", dit-il.
En s'approvisionnant davantage chez ses voisins, le marché parie "que les interconnexions vont être saturées", détaille Nicolas Goldberg. Les pays membres de l’UE s’échangent de l’électricité via un marché constitué de réseaux électriques qui sont interconnectés.
Le site Toute l'Europe définit plus précisément l'interconnexion comme une "ligne de transport qui traverse ou enjambe une frontière entre des Etats membres et qui relie les réseaux de transport nationaux des Etats membres de l’Union européenne". Concrètement, ce sont des câbles qui connectent entre eux les différents pays européens et qui permettent d’échanger de l’énergie.
La France très importatrice, des interconnexions saturées… Mais pourquoi le marché anticipe-t-il ces difficultés? Selon Nicolas Goldberg, "des inquiétudes pèsent sur la disponibilité du parc nucléaire français" et, à cela, s’ajoutent des incertitudes sur les stocks hydrauliques -une source d’énergie activable très rapidement - menacés par la sécheresse.
21 réacteurs à l'arrêt
EDF, en charge des 56 réacteurs du parc nucléaire français, ne produit plus autant d’électricité nucléaire qu’avant et les difficultés semblent s’accumuler plutôt que de se résorber.
Le gouvernement a récemment demandé au géant de l’énergie de redresser sa production électrique après une année 2022 noire qui l'a vue tomber à son niveau le plus bas depuis 30 ans à 279 térawattheures.
Ce vendredi, 21 réacteurs nucléaires étaient à l'arrêt, en maintenance entre autres à cause de problèmes de corrosion et du vieillissement des infrastructures.