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Finances publiques

"Ligne rouge", "pathologie": les syndicats mettent en garde le gouvernement sur l'effort budgétaire de 40 milliards d'euros

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À la veille d'une conférence sur les finances publiques, FO et la CGT appellent le gouvernement à taxer davantage les plus hauts revenus et à réduire les aides aux entreprises pour trouver les 40 milliards d'euros d'économies qu'il cherche.

Un effort qualifié de "considérable" par Éric Lombard lui-même. Le ministre de l'Économie a annoncé dimanche que la France devra trouver 40 milliards d'euros, "essentiellement" par des "économies", pour tenir son objectif de déficit public de 4,6% du PIB en 2026.

Faire davantage contribuer les retraités, réduire les dépenses des agences de l'État... Selon nos informations, plusieurs pistes sont actuellement sur la table. Des pistes qui devraient être évoquées mardi à l'occasion d'une conférence sur les finances publiques et qui inquiètent déjà certains syndicats, conviés à l'événement.

"Le gouvernement a une pathologie"

À commencer par FO et son secrétaire général Frédéric Souillot qui a fixé ses "lignes rouges" ce lundi sur BFMTV. "Les lignes rouges pour nous c'est de taper encore une fois sur les plus faibles et les plus précaires, que ce soit sur la santé, la non-indexation des minima sociaux...", a-t-il dit.

Lui préconise plutôt de réduire les "aides publiques aux entreprises" et "les allègements de cotisations". "Depuis 2017, c’est la même politique qui est menée. Donc depuis 2017 on nous explique tous les ans à chaque budget qu’il faut trouver des économies. La facture du 'quoi qu’il en coûte' au bout d’un moment elle arrive, et elle va tomber sur la tête des travailleurs et on ne sera pas d’accord", a poursuivi le dirigeant syndical.

Même son de cloche du côté de Sophie Binet: "Le problème, c'est que le gouvernement a une pathologie, c'est qu'il ne s'intéresse jamais aux riches et que c'est toujours aux mêmes de faire des efforts", a déploré sur France inter la secrétaire générale de la CGT. "La France est maintenant un pays de rentiers dans lequel on taxe toujours moins le patrimoine, dans lequel les dividendes explosent. C‘est là-dessus qu’il faut travailler. Il y a 200 milliards d’aides aux entreprises qui sont consenties chaque année sans condition ni contrepartire quand est-ce qu’on en parle", a-t-elle ajouté.

De son côté, la patronne de la CFDT, Marylise Léon, se réjouit de l'organisation de la conférence des finances publiques qui va permettre de "partager l'état des lieux et des pistes à explorer en termes de protection sociale mais aussi de fiscalité". Car "je sais que cela donne des boutons à beaucoup de politiques, mais on ne peut pas avoir autant de bouleversements et de défis et garder le même discours qu'en 2017: faire des efforts et des réformes sans toucher aux impôts", a-t-elle dit dans Les Échos.

Faire contribuer les hauts patrimoine plutôt que les retraités

Les retraités aisés seront-ils mis à contribution via la suppression de l'abattement fiscal de 10%? Frédéric Souillot y est réticent: "Ils ont cotisé toute leur vie. (...) Ils ont bossé toute leur vie. Ils se sont souvent serrés la ceinture pour payer leur appartement et aujourd'hui on va leur dire 'moins 10%'?". Le leader de FO a toutefois estimé que les retraités aisés seraient "d'accord pour participer à un effort national mais l'exemple vient du haut. À partir du moment où il n'y a pas d'exemple qui vient du haut, pourquoi ce serait les retraiés ou les plus précaires (qui seraient visés)?".

Sophie Binet est à peu près sur la même ligne. Elle qui regrette que la solution envisagée soit de "taper sur les revenus des retraites au lieu de taxer le patrimoine". Or, "il n'y a rien de plus inégalitaire que le patrimoine, et c'est là-dessus que le gouvernement refuser de travailler". Et d'évoquer une "proposition de loi votée à l'Assemblée nationale qui permettrait de faire rentrer 20 milliards d'euros dans les caisses en taxant" les plus hauts patrimoines. Mais "bizarrement, le gouvernement n'en veut pas".

La CFDT est prête, elle, à aborder tous les sujets "sans totem ni tabou". "Tout doit être évoqué, les recettes, et notamment une fiscalité plus juste où chacun contribue vraiment selon ses moyens, et les dépenses", a toutefois prévenu Marylise Léon, déplorant par ailleurs la piste du gouvernement de durcir une nouvelle fois les règles de l'assurance-chômage: "Ce n'est pas en faisant les poches des demandeurs d'emploi que l'on va résoudre les problèmes du pays", a-t-elle rétorqué.

Le RN et LFI prêts à la censure?

Cet effort supplémentaire de 40 milliards d'euros pourrait être un motif de censure du gouvernement pour le RN et LFI, ont prévenu de leur côté leurs responsables.

"Si le projet c'est de demander aux Français de se serrer la ceinture une fois de plus sans que l'État lui-même ne fasse des économies, n'aille sur le chemin des économies en matière d'immigration, de train de vie de l'État, des collectivités, eh bien nous nous emploierons à le censurer", a prévenu le vice-président du RN Sébastien Chenu sur Europe1/CNews.

"Nous sommes prêts, dans les prochains jours, à déposer une nouvelle motion de censure", a renchéri le coordinateur LFI Manuel Bompard sur BFMTV/RMC. "Mais comme on n'a pas des motions de censure de manière illimitée, nous ne sommes prêts à déposer cette motion que si on a une garantie qu'au moins les députés de gauche la votent", a-t-il ajouté, en visant les socialistes.

https://twitter.com/paul_louis_ Paul Louis Journaliste BFM Eco