Législatives: qu'ont démontré les précédents audits des finances publiques?

C'est une promesse du Rassemblement national. S'il accède au pouvoir, dans la foulée des prochaines élections législatives, l'une de ses premières mesures sera d'engager un "audit des comptes de la Nation" avant de mettre en œuvre ses réformes.
De quoi "faire la lumière" sur "les finances publiques et les dérives budgétaires sans précédent du pouvoir sortant", comme l'a promis Jordan Bardella lors de sa dernière conférence de presse, rappelant que Lionel Jospin avait, lui aussi, demandé un audit des finances publiques lors de son arrivée à Matignon en juin 1997.
Une annonce loin d'être inhabituelle: on la retrouve à chaque grande alternative politique si l'on remonte sur les dernières décennies. Lorsque l'on passe d'un bord politique à l'autre, de la droite à la gauche ou inversement, la nouvelle majorité s'appuie généralement sur un examen des comptes publics pour faire le bilan de la situation actuelle, notamment pour "montrer que les prédécesseurs cachent des choses", souligne à BFM Business François Ecalle, fondateur du site Fipeco et ancien magistrat de la Cour des comptes, qui a fait partie de l'équipe des auditeurs de 1997.
"Les audits ont été menés très sérieusement", explique François Ecalle. Outre les prévisions internes de Bercy, les auditeurs s'appuient sur de nombreux documents techniques pour écrire leur rapport, y ajoutant les prévisions économiques d'organisations internationales comme l'OCDE, des notes de l'Insee, des auditions au sein de ministères ou de collectivités locales.
Adoption de l'euro
Retour en 1997. Dans la perspective d'adoption de l'euro, la France est contrainte de maintenir le déficit sous la barre des 3% du PIB, comme requis par le traité de Maastricht. Si le projet de loi de finances pour 1997 table sur un déficit public de 3,0%, des services de Bercy craignent un dérapage budgétaire. Après la dissolution de l'Assemblée nationale par Jacques Chirac, la gauche remporte les élections législatives et impose une cohabitation. Lionel Jospin, nouveau Premier ministre, succède à Alain Juppé et engage un audit des finances publiques.
L'audit est confié à deux magistrats de la Cour des comptes, Jacques Bonnet et Philippe Nasse (qui agissent en leur nom, et non pour l'institution). Selon leur rapport, le déficit public est évalué entre 3,5 et 3,7 % pour 1997, loin des prévisions publiées par le précédent gouvernement de droite.
Dans la foulée, le nouveau gouvernement, représenté par Dominique Strauss-Kahn à Bercy, annonce des mesures de redressement des finances publiques, supprimant des crédits militaires et majorant l'impôt sur les sociétés. Le déficit sera finalement contenu à 3,0% pour l'année concernée.
Rebelote en 2002 avec une nouvelle alternance politique. Avec le retour de la droite au pouvoir, Jean-Pierre Raffarin devient Premier ministre. Le projet de loi de finances pour 2002, porté par la précédente majorité de gauche, prévoyait un déficit public de 1,4 % du PIB, qui a été révisé à 1,9% dans le programme de stabilité transmis en février 2002 à la Commission européenne.
Un audit des finances publiques est confié aux deux mêmes magistrats qu'en 1997, qui estiment dans leur rapport que le déficit public s'installe entre 2,2 et 2,6 % du PIB pour l'année 2002.
Mesures fiscales
Mais pas de changement de trajectoire pour le gouvernement Raffarin, qui ne renonce pas, par exemple, à la baisse d'impôt promise au cours de la campagne électorale – finalement, le déficit public s'établira même à 3,1% du PIB en raison d'une reprise économique moins bonne que prévu lors de l'audit, mettant la France en situation de "déficit excessif" selon les règles européennes.
En 2012, lors du retour de la gauche après la victoire de François Hollande à l'élection présidentielle, l'histoire recommence encore et pousse le gouvernement à adopter des mesures fiscales.