Balnéothérapie, hospitalisations... Ce que prend vraiment en charge l'aide médicale d'État (qui ne représente que 0,4% des dépenses d'Assurance maladie)

Les jours sont comptés avant la fin probable du gouvernement Bayrou... Et les ministères s'empressent d'aboutir plusieurs projets de décrets. Comme ceux qui restreignent l'accès et le panier de soins de l'aide médicale d'État (AME), que BFM Business a consultés et dévoilés mardi 2 septembre. Invité de BFMTV, Thomas Fatôme a confirmé que le conseil de la Caisse nationale de l'Assurance maladie (Cnam) a bien été saisi pour rendre un avis, qui n'a qu'une valeur consultative.
Pour rappel, l'AME permet l'accès aux soins des personnes en situation irrégulière depuis au moins trois mois consécutifs en France et dont les ressources ne dépassent pas un plafond de 862 euros mensuels en 2025. Les bénéficiaires sont remboursés à 100% par la Sécurité sociale, avec dispense d'avance de frais, sur une liste de soins prédéfinie par décret au Journal officiel.
Certains soins sont déjà exclus de l'AME
Mais quels sont les soins remboursables par l'AME? D'abord, ce n'est pas la première fois que son panier de soins est restreint. En 2011 déjà, les parlementaires avaient exclu les cures thermales des actes remboursables par l'AME.
Plus précisément, l'article R.251-1 du code de l'action sociale et des familles liste les catégories de soins exclus de l'AME. On y trouve non seulement les cures thermales, mais aussi les actes techniques et de biologie médicale dans le cadre d'une procréation médicale assistée (PMA), les médicaments utilisés pour les actes et examens en lien avec une PMA ainsi que les médicaments dont le service médical rendu est considéré comme faible par la Haute autorité de santé (HAS) sont déjà écartés du panier de soins de l'AME.
Le gouvernement entend donc créer une cinquième catégorie dans ce texte, en excluant les actes réalisés par des masseurs-kinésithérapeutes en balnéothérapie. Ce type de soins intervient en général dans le cadre d'un parcours de rééducation après un traumatisme, une chirurgie orthopédique, ou une pathologie rhumatologique.
Mais alors que le gouvernement cherche à économiser près de 44 milliards d'euros dès 2026, les économies réalisables en supprimant la balnéothérapie du panier de soins de l'AME semblent très minces. Car les actes de rééducation au sens large, qui incluent la balnéothérapie réalisée à l'hôpital ou en cabinet libéral, représentent moins de 2% des dépenses totales de l'AME. Cela reste donc anecdotique en volume et en coût par rapport aux hospitalisations (60,8 %), aux soins de ville classiques (26,5 %) et à la pharmacie (12,7 %).
Le remboursement de certains soins est déjà soumis à une condition d'ancienneté de bénéfice de l'AME
D'autres soins sont quant à eux remboursables, mais à condition de bénéficier de l'AME depuis au moins neuf mois. La liste des soins concernés est détaillée à l'article R.251-3 du code de l'action sociale et des familles. Actuellement, près de vingt actes y sont listés. Il s'agit notamment de rhinoplasties, d'interventions diverses sur le cristallin, ou encore de prothèses de genou, d'épaule et de hanche.
Cette liste va donc s'élargir à d'autres actes, pour lesquels les patients devront bénéficier de l'AME depuis au moins neuf mois. Sont notamment concernés les interventions et actes dans le cadre du traitement de l'obésité, la chirurgie des varices, des aides auditives, des lunettes de vue ou lentilles, etc. Est aussi visée "la rééducation de la déambulation de la personne âgée, dès lors que l'absence de rééducation n'entraine aucun risque de la perte d'autonomie", peut-on lire dans le décret préparé par le gouvernement.
L'AME ne représente que 0,4% des dépenses d'Assurance maladie
En s'attaquant au panier de soins remboursables de l'AME et aux conditions d'accès à cette aide, le gouvernement semble tendre la main à la droite conservatrice et à l'extrême-droite. En juillet, le sénateur Vincent Delahaye, membre de l'union des démocrates et indépendants et du parti radical a déposé un rapport appelant à réformer l'AME, considérant ce dispositif "trop généreux".
Et pourtant, un rapport réalisé, à la demande du gouvernement, par Claude Évin et Patrick Stefanini et publié le 4 décembre 2023, souligne pourtant le caractère "globalement maîtrisé" de l'AME. L'aide médicale d'État représente en effet environ 1,2 milliard d'euros par an alors que les dépenses de l'Assurance maladie dépassent 230 milliards d'euros. Cela correspond donc à seulement 0,4% des dépenses de l'Assurance maladie.
C'est pourquoi de nombreux médecins considèrent que l'AME est marginale dans le budget de la Sécurité sociale alors qu'elle a un impact important en matière de santé publique, par des actions de préventions et de dépistage afin d'éviter des soins lourds et coûteux sur le long terme. Ce mercredi, l'association Médecins du monde a par exemple déclaré que les mesures envisagées par le gouvernement "auraient des conséquences directes et graves sur la santé des personnes en situation irrégulière les plus précaires" et "pèseraient inévitablement sur les urgences et sur les hôpitaux".