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Economie et Social

A cause de la "double peine de pauvreté", les ménages modestes perdent 1536 euros chaque année

Les arnaques à la carte bancaire se multiuplient

Les arnaques à la carte bancaire se multiuplient - AFP

Les ménages pauvres payent plus cher les biens et services, que la moyenne des ménages. Un phénomène bien connu décrypté par une étude de La Banque Postale et de l’Action Tank Entreprise.

1500 euros: c'est en moyenne ce qu'un ménage pauvre doit payer en plus chaque année pour accéder aux mêmes biens et services qu'un ménage plus aisé. Ce phénomène à un nom: la double pénalité de pauvreté. C'est-à-dire une perte de pouvoir d'achat qui vient s'ajouter à des ressources déjà plus faibles.

Selon une étude de la Banque Postale et de l’Action Tank Entreprise, 9,2 millions de ménages sont touchés en France et dans tous les secteurs: immobilier, transport, assurances, communication ou encore santé…

Véhicules d’occasion, une addition salée

Pour illustrer ce phénomène, on peut observer qu'un ménage modeste aura tendance à se tourner vers un véhicule d’occasion à l’achat plutôt qu’un véhicule neuf, plus coûteux. Mais derrière, il va devoir plus souvent sortir sa carte bancaire: 17% de carburant supplémentaire, plus de visites chez le garagiste... La facture des dépenses additionnelles va flamber rapidement.

Même, constat pour le logement. Non seulement les ménages les moins aisés bénéficient de 0,7 pièce en moins en moyenne, mais le loyer des petites surfaces est supérieur d’environ 13% au m2. Et pourvus de dossiers moins solides, les familles modestes voient l’accès aux logements qualitatifs restreint. Ils ont donc plus de chance de louers des "passoires thermiques", ce qui engendre 13% de dépenses supplémentaires pour "obtenir le même niveau de confort qu’un ménage vivant dans un espace bien isolé" selon l’Etude.

APL, chèque énergie...

Autre exemple citée dans l'étude, celui de la santé, où d'après une étude Statista 46% des personnes gagnant moins de 20.000 euros par an déclarent avoir une mutuelle contre 70% pour les personnes gagnant plus de 20.000 euros.

L'étude se penche aussi sur les solutions qui existent pour pallier la double peine de pauvreté. Déjà, il est possible de proposer des offres inclusives de la part des entreprises proposant des biens et services, en évitant par exemple pour les assurances habitations des surprimes en fonction du lieu de résidence.

L'Etat a bien entendu un rôle à jouer, via la redistribution en mettant en place des réglementations et des aides ciblées. C’est déjà le cas des APL, de la prime d’activité ou encore du chèque énergie. Des dispositifs qui ciblent justement ces ménages les plus modestes.

La théorie des bottes

Cette double peine de pauvreté est d'ailleurs très bien expliqué dans l'oeuvre de Terry Pratchett, Les Annales du Disque-Monde publiée en 1993. Dans ce roman, le personnage Sam Vimaire explique sa "théorie des bottes" qui extrapole pourquoi les pauvres restent pauvres et les riches restent… riches.

"Tenez, les bottes, par exemple. Il gagnait trente-huit piastres par mois plus les indemnités. Une très bonne paire de bottes en cuir coûtait cinquante piastres. Mais une paire abordable, du genre à tenir une saison ou deux avant de prendre autant l'eau qu'une éponge dès que le carton rendait l'âme, en coûtait à peu près dix. [...] Mais ce qu'il faut dire, c'est que de bonnes bottes duraient des années et des années."

Toujours d’après le capitaine Sam Vimaire, dans un laps de temps de dix ans, alors que l’acheteur qui avait déboursé 50 piastres avait toujours les pieds au sec, le "miséreux qui ne pouvait s’offrir que des bottes bon marché" avait dépensé 100 piastres et "se retrouvait quand même les pieds mouillés".

Eva Serayol