Coronavirus: comment le confinement amplifie les inégalités dans le monde du travail

Un tiers des actifs sont en télétravail - Kaboompics- Pixabay- CC
Confinement oblige, le monde du travail s’adapte. Et cette expérience "ne se décline pas et ne se vit pas de façon homogène dans l’ensemble de la population", souligne la Fondation Jean Jaurès à l’origine d’une enquête en partenariat avec l’Ifop. Ainsi l’épreuve du confinement met en lumière "un certain nombre de lignes de failles préexistantes (…) induites par l’application strictes des consignes gouvernementales".
En témoigne la division en trois tiers de la France du travail. D’abord, 34% des actifs continuent à se rendre sur leur lieu de travail habituel malgré le confinement. Il s’agit des Français en "première ligne", à savoir les personnels soignants mais aussi ceux exerçant dans les secteurs de la grande distribution, la logistique, le transport, le commerce alimentaire, les forces de sécurité, etc.
Vient ensuite la "deuxième ligne" qui regroupe les Français en télétravail. Enfin, les 36% restants représentent la catégorie des actifs en congés ou congés maladie (15%), en chômage partiel ou au chômage (21%). "Ce groupe, déjà nombreux, est en expansion rapide. On peut penser qu'au fur et à mesure que les commandes, missions et contrats enregistrés et reçus avant la mise en place du confinement auront été honorées, la proportion de salariés mis à l'arrêt par leurs entreprises va augmenter", note la Fondation Jean Jaurès.
Inégalité face au télétravail
Cette situation renforce les inégalités et en créer même de nouvelles entre les différentes catégories socioprofessionnelles. Notamment face au télétravail. En effet, deux tiers des cadres et professions intellectuelles travaillent depuis chez eux et 17% sur site. Dans le même temps, 56% des ouvriers et 42% des employés sont certes en congés ou chômage partiel mais 39% se rendent sur leur lieu de travail.
Cette différence dans le vécu du confinement implique de fait une nouvelle inégalité en matière de pénibilité et d’exposition au virus. Pas moins de 73 % des actifs en "première ligne" disent se sentir très ou assez exposés au Covid-19 alors que cette proportion est deux fois moindre parmi les télétravailleurs (38 %) ou les salariés à l’arrêt ou en congé (36 %).
"Si l’inquiétude face à l’épidémie est palpable dans l’ensemble de la société et du monde du travail (41 % des actifs se déclarent très ou assez exposés), l’angoisse est maximale parmi les salariés qui ‘tiennent leur poste’", souligne la Fondation Jean Jaurès.
Les inégalités salariales renforcées
Enfin, les inégalités salariales s’accroissent depuis le confinement et la mise en place des mesures de chômage partiel. 65% des actifs déclarent percevoir l’intégralité de leur revenu tandis que 29% bénéficient de temps partiel, du chômage technique ou d’allocations et 6% ne touchent rien.
Mais "les différences de situation sont très marquées en fonction du statut des individus", poursuit la Fondation Jean Jaurès. Et pour cause, les trois quarts des cadres et professions intermédiaires continuent de toucher 100% de leur salaire. C’est également le cas pour deux tiers des employés.
Surtout, si un ouvrier sur deux n'ont pas vu leur salaire baisser depuis le confinement, ils sont 43% à être rentrés dans le dispositif de chômage partiel et, à l'exception de ceux qui se contentent du Smic, voient donc leur salaire amputer. Et "la situation est nettement plus préoccupante pour les artisans dont près de 4 sur 10 déclarent aujourd’hui ne plus avoir de revenus", conclut la Fondation.