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Les nitrites bannis de la nourriture pour chiens et chats (mais pas dans le jambon)

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Cet additif controversé est pourtant toujours autorisé dans la fabrication de la charcuterie consommée par les humains même si un abaissement des quantités autorisées a été adopté.

En toute discrétion, l'ajout de nitrite de sodium (sels nitrités) dans les croquettes alimentaires, pâtés et friandises destinées aux chiens et aux chats n'est désormais plus autorisé en Europe, relève Le Parisien.

Cette décision n'a pas été prise par la Commission européenne mais par les producteurs eux-mêmes qui ont retiré en 2021 leur demande d'autorisation au titre la catégorie des additifs technologiques, alors que la réévaluation de cet additif était en cours depuis plusieurs années.

Cette demande de retrait pour les chats et chiens s’est traduite par le retrait de l’autorisation provisoire de cet additif puis a été formalisée dans un règlement adopté plus tôt cette année.

Cet additif controversé (connu sous le nom de code E250) offre une meilleure conservation de certains aliments (comme la charcuterie) et permet par exemple au jambon cette couleur rose pas vraiment naturelle mais plus vendeuse.

La chronique d'Anthony Morel : S'occuper des animaux domestiques à distance - 14/05 - 6h50
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Accusé de participer à la formation de certains cancers, le nitrite est l'objet d'un débat acharné entre les partisans de son interdiction et l'industrie alimentaire qui soutient que son utilisation est indispensable pour la bonne conservation de certains aliments, notamment contre le botulisme, une maladie très grave.

Les animaux mieux protégés que les humains?

Mais d'expertises en contre-expertises, de procès en appels, jamais l'Europe n'est parvenue à se mettre d'accord pour généraliser un bannissement dans l'industrie agroalimentaire, seul un abaissement des quantités autorisées dans le cadre de la lutte contre les cancers a été adopté en octobre dernier.

Les animaux domestiques bénéficient donc eux d'un régime plus strict puisque l'additif sera désormais totalement interdit. Les industriels ont jusqu'à octobre 2024 pour écouler leurs stocks.

Le résultat d'un lobby de l'alimentation animale a priori moins puissant à Bruxelles que celui de la charcuterie, estime un député européen français interrogé par nos confrères. "Ce qui a permis aux scientifiques et politiques qui travaillent sur l’alimentation animale, en partant des mêmes études, d’avancer sereinement!", explique Richard Ramos qui se bat depuis plusieurs années pour en finir avec cet additif dans l'alimentation humaine.

Autre raison avancée, l'omniprésence des nitrites dans les croquettes et autres aliments industriels qui constituent quasiment 100% de la nourriture quotidienne des chiens et des chats alors qu'en théorie, la charcuterie nitritée ne représente pas l'essentiel des régimes alimentaires humains.

Vers de nouvelles augmentations de prix?

Reste que sous la pression des consommateurs, de nombreux acteurs de l'agro-alimentaire proposent désormais de la charcuterie sans nitrite. Mais elle est vendue bien plus chère.

Pour Richard Ramos, "il faut penser à la santé de nos concitoyens, particulièrement les plus modestes, car les plus aisés, eux, achètent de plus en plus des [produits, ndlr] sans nitrites. Une alimentation à deux vitesses se crée et avec un risque de cancer pour les pauvres. Comment les animaux peuvent-ils être mieux protégés?", s'interroge-t-il.

Pour les industriels de la nourriture pour animaux, la non-autorisation des sels nitrités va impliquer des changements importants dans les recettes qui pourraient déboucher sur des hausses de prix. Or, l'inflation est déjà passée par là. Sur un an, le prix des croquettes pour chiens et chats a flambé en France de 18% selon NielsenIQ (chiffre d'avril).

En 2022, le marché européen de la nourriture pour animaux domestiques a progressé de 5% à 29,1 milliards d'euros, selon une fédération du secteur.

Contactés par BFM Business, Purina et Mars Petcare, les deux géants qui se partagent le marché de la nourriture pour animaux domestiques, n'ont pas retourné nos demandes de commentaires.

Olivier Chicheportiche Journaliste BFM Business